Des outils en pierre découverts en Inde suggèrent une nouvelle fois que l’humain a quitté beaucoup plus tôt le continent africain
Juste une semaine après que des scientifiques aient rapporté des preuves que notre espèce a quitté l’Afrique plus tôt que nous le pensions, une autre découverte pourrait encore faire reculer cette date.
L’Homo sapiens est apparu en Afrique il y a au moins 300 000 ans et l’a plus ou moins quittée pour coloniser le globe. Les scientifiques pensent qu’il y a eu plusieurs “dispersions” en provenance d’Afrique, qui n’ont pas toutes été des réussites. L’étude d’une mâchoire humaine, publiée la semaine dernière, a montré que certains membres de notre espèce avaient atteint Israël il y a entre 177 000 à 194 000 ans.
Cette semaine, c’est une découverte d’outils en pierre en Inde, présentant un style qui a été associé ailleurs avec notre espèce. Ils ont été façonnés il y a entre 385 000 ans et 172 000 ans, accompagnés de signes de continuité et de développement au cours de cette période.
Image d’entête : Outils du Paléolithique moyen trouvés à Attirampakkam. (Sharma Centre for Heritage Education)
En étudiant les outils, les chercheurs ont documenté un éloignement progressif de l’utilisation des bifaces et d’autres technologies acheuléennes (Paléolithique inférieur) et un changement vers des outils plus petits, avec l’utilisation de stratégies distinctes par le biais de la méthode Levallois.
La présence “d’outils Levallois” est particulièrement intéressante car leur fabrication nécessite une grande clairvoyance et une bonne planification. Les haches acheuléennes étaient fabriquées en martelant un morceau de silex dans une forme spécifique, mais les outils Levallois nécessitaient deux étapes : le taillage, ou la sculpture d’un noyau de silex dans une forme spécifique, puis le détachement de celui-ci avec un seul coup décisif. Le constructeur doit imaginer la forme et la taille finale de l’outil dans le noyau de silex avant que la mise en forme puisse commencer… Tout cela demande une certaine intelligence.
Ce style d’outil a également été attribué aux Néandertaliens et éventuellement à d’autres espèces. Selon les chercheurs, il est donc impossible de confirmer que ces outils ont été fabriqués par l’Homo sapiens ou par un cousin.
Selon Shanti Pappu du Sharma Centre for Heritage Education à Chennai en Inde et coauteur de l’étude :
Nous sommes très prudents sur ce point, car aucun fossile humain n’a été trouvé avec les outils.
On ne sait pas dans quelle mesure le développement de l’outil reflète l’arrivée de populations ou d’idées venant de l’extérieur de l’Inde, contrairement à un développement local.
Le style de fabrication de ces outils fut un changement par rapport aux anciens outils de pierre trouvés sur le site.
Des outils du Paléolithique moyen trouvés à Attirampakkam. (Sharma Centre for Heritage Education)
Michael Petraglia de l’Institut Max Planck pour la science de l’histoire humaine à Iéna, en Allemagne, un archéologue spécialisé dans l’évolution humaine en Asie, mais qui n’a pas participé à cette étude, a déclaré qu’il ne pensait pas que les outils montraient que notre espèce avait quitté l’Afrique il y a si longtemps.
Au lieu de cela, selon lui, un de nos cousins évolutionnistes en Inde a développé ce style d’outil indépendamment d’une influence extérieure.
Les outils sur le site au nord-ouest de Chennai dans le sud-est de l’Inde sont étroitement liés à l’ancien style de fabrication d’outils et semblent représenter une transition.
Pour Petraglia, l’idée que ces outils reflètent un savoir-faire venu d’ailleurs serait difficile à prouver en Inde. Le pays a peu de sites archéologiques bien étudiés et une seule découverte de fossiles d’un précurseur de l’Homo sapiens correspondant à cette période qui était associé au précédent style de fabrication d’outils, précise Petraglia.
L’étude publiée dans Nature : Early Middle Palaeolithic culture in India around 385–172 ka reframes Out of Africa models.