Pourquoi Jupiter ne possède pas de grands et majestueux anneaux comme Saturne ?
Qu’il s’agisse d’un astronome amateur ou d’un observateur d’étoiles chevronné, la planète la plus observée du système solaire est probablement Saturne. Ses célèbres anneaux et ses lunes visibles en font un objet de prédilection, surtout pour les nouveaux utilisateurs de télescopes. Après tout, elle est surnommée « le joyau du système solaire ». Jupiter vient probablement en deuxième position en raison de son incroyable taille et de sa fameuse Grande Tache rouge. Cependant, on peut se demander pourquoi, puisqu’elle est plus grande, n’a-t-elle pas aussi de grands anneaux ?
Il s’avère que la réponse se trouve dans ses lunes.
Image d’entête : l’un des anneaux ténus de Jupiter est visible sur cette image infrarouge. (NASA/ ESA/ CSA/ STScI/ Judy Schmidt)
Selon Stephen Kane, astrophysicien de l’Université de Californie à Riverside (Etats-Unis), qui a dirigé une nouvelle étude pour répondre à cette question :
Je me suis longtemps demandé pourquoi Jupiter n’avait pas d’anneaux encore plus étonnants qui feraient honte à Saturne. Si Jupiter en avait, ils nous sembleraient encore plus brillants, car la planète est beaucoup plus proche que Saturne.
Des planètes présentent des anneaux pour un certain nombre de raisons différentes. Une partie de la glace qui compose les anneaux de Saturne pourrait provenir de comètes, qui sont elles-mêmes principalement composées de glace. Jupiter, qui n’est pas totalement dépourvue d’anneaux (pour les voir de près, il faudrait probablement disposer d’un appareil tel que la sonde Voyager ou le télescope spatial James Webb), possède un système peu lumineux entièrement composé de particules de poussière projetées en orbite par des micrométéorites entrant en collision avec les petites lunes intérieures de la planète.
Cette image datant de novembre 2010 et obtenue par la sonde Cassini, présente de grandes structures de 3,5 km de haut sur le bord extérieur de l’anneau B de Saturne. (NASA)
L’anneau de Phœbé de Saturne, faible et diffus, est également formé par des particules éjectées de la lune du même nom. L’anneau le plus externe de Neptune n’est même pas un anneau, mais plutôt cinq arcs distincts, dont les particules sont très probablement retenues par l’attraction gravitationnelle de la lune Galatée.
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Certains anneaux sont particulièrement énigmatiques. Deux des plus extérieurs d’Uranus, par exemple, sont rouges et bleus, ce qui indique une composition différente de celle des anneaux intérieurs gris de la planète et de ceux de Saturne. Nous ne savons pas pourquoi le plus grand d’Uranus, l’anneau epsilon, est des dizaines ou des centaines de fois plus mince que celui de Saturne. Certains astronomes pensent qu’Uranus est basculée sur le côté à la suite d’une collision avec un autre corps céleste. Ses anneaux pourraient être les vestiges de cette collision.
Pour comprendre la raison de l’aspect actuel de Jupiter, Kane et son équipe ont utilisé une simulation informatique dynamique pour prendre en compte les orbites des quatre principaux satellites de Jupiter, l’orbite de la planète elle-même et des données sur le temps nécessaire à la formation des anneaux.
Il s’avère que si les lunes sont suffisamment grandes, leur attraction gravitationnelle peut être assez forte pour rejeter la glace hors de l’orbite d’une planète ou pour déplacer l’orbite de la glace afin qu’elle entre en collision avec les lunes. Tout grand anneau qui pourrait se former serait rapidement détruit par les lunes galiléennes de Jupiter (Io, Europe, Ganymède et Callisto). Il est donc peu probable que Jupiter ait eu des anneaux importants.
Il s’avère donc que les planètes massives produisent des lunes massives, ce qui les empêche d’avoir de gros anneaux.
Représentation artistique de Jupiter avec des anneaux qui rivalisent avec ceux de Saturne. (Stephen Kane/UCR)
Outre leur beauté, les anneaux aident les astronomes à comprendre l’histoire d’une planète en fournissant des preuves de collisions passées avec des lunes ou des comètes. Leur forme et leur taille, ainsi que la composition de leurs matériaux, fournissent des informations sur le type d’événement qui les a formés.
Selon Kane :
Pour nous, astronomes, ils sont les éclaboussures de sang sur les murs d’une scène de crime. « Quand nous regardons les anneaux des planètes géantes, c’est la preuve que quelque chose de catastrophique s’est produit pour y placer ce matériau.
L’étude sera publiée dans le Planetary Science Journal et disponible en prépublication dans arXiv : The Dynamical Viability of an Extended Jupiter Ring System et présentée sur le site de l’Université de Californie à Riverside : Why Jupiter doesn’t have rings like Saturn.