Il existe non pas une, mais quatre espèces de girafe
Alors que les biologistes supposaient, depuis fort longtemps, que les girafes étaient une seule et même espèce. Et bien il s’avère qu’il y en a en fait 4. Telle est la surprenante conclusion d’une analyse génétique, la première de son genre, qui constate que les populations de girafes de différentes régions du continent africain sont aussi distinctes que les ours polaires et les ours bruns. En tant que telles, elles doivent être traitées comme des espèces distinctes afin que leur patrimoine génétique puisse être conservé.
Plus exactement, les subtiles différences entre les différents groupes de girafes avaient déjà été repérées auparavant. D’abord décrites en 1758 par le célèbre taxonomiste Carl von Linné, qui n’avait jamais vu une girafe dans la nature, les animaux ont été organisés dans onze sous-espèces au fil du temps, sur la base de leur répartition géographique, des marques sur leur manteau et des deux bosses recouvertes de fourrure sur leur tête, appelées ossicônes.
Par exemple, la girafe réticulée de Somalie, avec ses taches brunes polygonales, est facilement différenciable de la girafe de Roshchild de l’Ouganda et du Kenya, dont les tâches sont moins bien définies. Cette dernière, pour sa part, a des marques sur sa fourrure similaires à la girafe Masai du Kenya et de la Tanzanie, mais un examen plus approfondi du crâne révèle cinq ossicônes, au lieu des trois habituels.
Image d’entête girafe Nubienne en Ouganda et ci-dessous girafe réticulée. (Julian Fennessy)
Ce sont ces observations qui ont incité Julian Fennessy et ses collègues du Giraffe Conservation Foundation à aller plus loin en utilisant la génétique. Ainsi, l’organisation de Fennessy, basée en Namibie, en partenariat avec des biologistes allemands (université Goethe) ont réalisé la première analyse génétique complète des girafes. Pendant 7 ans, 190 échantillons de tissus ont été prélevés sur des animaux à travers l’Afrique et représentant les neuf sous-espèces actuellement reconnues. Une série de marqueurs génétiques et d’ADN mitochondrial, souvent utilisés pour distinguer les différentes espèces, ont ensuite été analysés en laboratoire.
L’analyse a révélé quatre espèces très distinctes, qui ne semblent pas se reproduire à l’état sauvage. Deux de ces espèces, la girafe Masai (G. tippelskirchi) et la girafe réticulée (G. reticulata), correspondent à des sous-espèces déjà identifiées. Les deux autres, la girafe du sud (Giraffa giraffa), et la girafe du nord (G. camelopardalis), englobent chacune plusieurs sous-espèces.
Girafes d’Angola (Giraffa camelopardalis angolensis). (Julian Fennessy)
Les implications pour leur conservation sont énormes. L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui reconnait actuellement les girafes comme appartenant à une seule espèce, considère leur préservation comme “moins préoccupante”. Mais parmi les quatre espèces nouvellement proposées, Fennessy estime qu’au moins trois devraient être placés dans la catégorie “menacée”, avec la girafe du nord ne dénombrant que 4 750 individus dans la nature et la girafe réticulée en comptant moins de 8 700, ce qui en fait “certains des grands mammifères les plus menacés dans le monde”.
L’étude publiée dans Current Biology : Multi-locus Analyses Reveal Four Giraffe Species Instead of One.