Négocier, persuader et coopérer : Une intelligence artificielle est capable de battre les humains au jeu Diplomatie
Un agent d’intelligence artificielle créé par Meta, la société mère de Facebook, est devenu le premier à atteindre des « performances de niveau humain » dans un jeu de stratégie en ligne qui met l’accent sur la négociation en langage naturel et la coordination tactique entre les joueurs, des résultats publiés dans une étude et qui constituent une nouvelle référence pour le domaine de l’Intelligence Artificielle.
Image d’entête : capture d’écran d’une partie de Diplomacy jouée par l’IA Cicero. (Meta Ai)
L’IA, nommée Cicero (référence anglaise au romain Cicéron), est capable d’imiter le langage humain naturel dans ses négociations avec les 6 autres joueurs d’une partie et peut même analyser les objectifs, les intentions et les opinions de ses partenaires humains pour déterminer les plans à suivre pour réussir dans le jeu de stratégie en ligne Diplomacy (une version en ligne ici : webDiplomacy).
Meta a inscrit Cicero de manière anonyme dans un tournoi de Diplomacy en ligne au début de l’année, et lors de 40 parties rapides contre des concurrents humains, selon l’étude (lien plus bas), l’IA a obtenu plus du double du score moyen et s’est classé dans les 10 % des meilleurs joueurs ayant pris part à plusieurs parties.
Cicero a pu se faire passer pour un joueur humain face aux 82 participants auxquels l’agent a été confronté, et les chercheurs de Meta précisent qu’ils n’avaient trouvé aucune preuve suggérant que les joueurs humains se doutaient qu’ils étaient en compétition avec l’IA.
Cette découverte représente une nouvelle avancée pour la technologie de l’IA, car les agents ont déjà réussi à jouer à des jeux compétitifs comme les échecs, le GO, Starcraft II, le poker, Quake 3, le foot… mais des jeux comme Diplomacy ont posé des problèmes en raison des niveaux élevés de négociation, de coopération et de compétition nécessaires pour gagner.
Diplomacy est ce que les chercheurs en IA appellent un « jeu à sept joueurs, à somme nulle et déterministe, à l’information imparfaite ». Un jeu à sept joueurs est beaucoup plus difficile à gérer qu’un jeu à deux joueurs comme les échecs ou le go. Vous devez prendre en compte les nombreuses stratégies possibles de non pas un, mais six autres joueurs. Il est donc beaucoup plus difficile de développer une IA pour jouer à ce jeu.
C’est également un jeu à“l’information imparfaite”, car les joueurs effectuent leurs mouvements simultanément. Contrairement à des jeux comme les échecs ou le go, où vous savez tout des mouvements de votre adversaire, les joueurs de Diplomacy font des mouvements sans savoir ce que leurs adversaires sont sur le point de faire. Ils doivent donc prévoir les prochaines actions de leurs concurrents. Cela ajoute également à la problématique de développer une IA pour y jouer.
Enfin, Diplomacy est un jeu à somme nulle dans lequel si vous gagnez, les autres perdent. Et le résultat est déterministe et ne dépend pas du hasard. Néanmoins, avant la victoire ou la défaite, il est toujours payant pour les joueurs de former des alliances et de se liguer les uns contre les autres. En effet, l’un des véritables défis du jeu consiste à gérer les négociations informelles avec les autres joueurs avant d’effectuer des mouvements simultanés.
La principale raison pour laquelle les performances de Cicero constituent une percée scientifique est qu’il peut à la fois bien jouer au jeu et mener ces négociations informelles. Cette combinaison de traitement du langage naturel et de raisonnement stratégique est une première pour une IA jouant à un jeu.
Tout cela laisse un étrange arrière-gout de Wargames…
L’étude publiée dans Science : Human-level play in the game of Diplomacy by combining language models with strategic reasoning et le projet sur le site Meta Ai (Facebook) : Meta AI presents Cicero, Diplomacy and Meta AI’s CICERO et CICERO: An AI agent that negotiates, persuades, and cooperates with people.