Des fourmis capables de détecter le cancer s’avèrent aussi précises que l’odorat des chiens
Une nouvelle et fascinante étude réalisée par une équipe de chercheurs français suggère que des fourmis entraînées pourraient être en mesure de détecter le cancer chez l’humain. Les chercheurs ont démontré qu’une certaine espèce de fourmis peut être rapidement entraînée à détecter des cellules cancéreuses avec une précision égale à celle observée chez d’autres animaux dotés de capacités de biodétection, comme les chiens.
Image d’entête : fourmis Formica fusca entrainées dans cette étude. (Paul Devienne/ Laboratoire d’Ethologie Expérimentale et Comparée/ Université Sorbonne Paris Nord)
L’extraordinaire capacité olfactive des chiens nous est familière. Utilisés depuis des années pour traquer des éléments tels que les drogues illicites et les explosifs, les chiens ont plus récemment été étudiés pour leur impressionnante capacité à détecter des maladies, comme le cancer, la malaria ou même la COVID-19.
La formation et la garde d’un chien de détection n’est pas tâche facile ou gratuite. Il faut parfois jusqu’à un an pour dresser un chien à des fins de détection. Les chercheurs se sont donc tournés plus récemment vers d’autres organismes, tels que les souris, les abeilles et les criquets.
Cette dernière étude a examiné la possibilité de dresser une espèce de fourmi appelée Formica fusca. Les fourmis se sont déjà révélées capables d’identifier certains composés organiques volatils (COV), et de précédentes études ont montré que les types de cancers peuvent être identifiés par leurs COV uniques. La nouvelle étude a donc cherché à déterminer si les fourmis pouvaient être entraînées à détecter les cellules cancéreuses.
Les tests préliminaires ont porté sur deux types de cellules cancéreuses du sein, toutes deux présentant des profils de COV différents. En seulement trois essais de formation, les chercheurs ont pu apprendre aux fourmis à différencier les cellules cancéreuses de celles non cancéreuses avec une précision similaire à celle observée dans des études récentes utilisant des chiens.
Résumé graphique de l’étude. Origine de l’échantillon de cellules cancéreuses en culture. Comportement des fourmis entrainées par récompense à détecter l’odeur des cellules cancéreuse et un test de mémoire. Analyse chimique pour confirmer la détection. (Baptiste Piqueret et col./ iScience)
Selon les chercheurs
Les fourmis sont donc équivalentes aux chiens, les bio-détecteurs les plus étudiés, en termes de capacités de détection. À certains égards, les fourmis surpassent les chiens car elles ont besoin d’un temps d’entraînement extrêmement court (30 min contre 6-12 mois pour un chien) et d’un coût réduit d’entraînement et d’entretien (miel et insectes congelés deux fois par semaine). Notre protocole de conditionnement simple peut être mis en œuvre par tout le monde, après un temps d’entraînement d’environ 3 jours.
Se référant à de précédentes études sur le dressage des fourmis, les chercheurs supposent qu’individuellement, elles pourraient être utilisées pour détecter des cellules cancéreuses jusqu’à 9 fois avant que leurs réponses conditionnées ne commencent à s’estomper. Cela fait des fourmis un outil de détection plus efficace et plus rentable que tout autre animal ou organisme utilisé à des fins similaires.
Les chercheurs de conclure dans leur étude :
Les fourmis représentent donc un outil de détection rapide, efficace, peu coûteux et hautement discriminant pour la détection des volatiles des cellules cancéreuses. Notre approche pourrait potentiellement être adaptée à une série d’autres tâches complexes de détection d’odeurs, notamment la détection de stupéfiants, d’explosifs, d’aliments avariés ou d’autres maladies (paludisme, infections, diabète par exemple).
L’étude n’est qu’une démonstration préliminaire d’une preuve de concept, il y a donc évidemment un grand nombre d’obstacles qui devront être résolus avant que les fourmis ne soient réellement utilisées pour détecter quoi que ce soit dans le monde réel. Par exemple, des travaux supplémentaires seront nécessaires pour cataloguer et valider les profils de COV spécifiques à certains cancers. De plus, la manière dont les fourmis pourraient être déployées de façon réaliste pour détecter des éléments dans le monde réel, au-delà de l’identification d’échantillons spécifiques dans un laboratoire, n’est pas clairement définie.
L’étude publiée dans iScience : Ants detect cancer cells through volatile organic compounds et présentée sur le site du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) : Des fourmis « renifleuses » de cancers et du Laboratoire d’Ethologie Expérimentale et Comparée.