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C’est un sort exceptionnellement cruel, même dans les étranges et horribles aventures sexuelles des arachnides : quand les araignées “pêcheuses” mâles, Dolomedes tenebrosus, s’accouplent, elles (ils) meurent. La mort est l’inévitable conséquence du mécanisme par lequel le mâle transfère ses spermatozoïdes dans la femelle.

En image d’entête : une femelle Dolomedes tenebrosus.

Elle est la première araignée ne tissant pas de toile chez laquelle il a été observé une mort obligatoire après l’accouplement, selon une étude publiée cette semaine (lien plus bas). Seules trois autres espèces d’araignées partagent cette caractéristique. L’inéluctable issue fait de ces araignées un rare type d’espèces monogyne, où les mâles ne s’accouplent qu’une seule fois, signifiant qu’il est est essentiel dans le comportement du mâle de maximiser les chances de succès de sa reproduction.

Selon Steven Schwartz, un écologiste comportemental à l’Université du Nebraska (États-Unis) et co autour de l’étude :

L’acte de transfert du sperme déclenche cette escalade dans la mort. Une fois que le bouton est enfoncé, c’est l’extinction des feux.

Il est relativement fréquent, pour les araignées femelles, de tuer et de manger les mâles après l’accouplement, mais Schwartz a pas encore attrapé une Dolomedes tenebrosus le pratiquant.

Schwartz a commencé des études supérieures dans l’espoir de trouver et d’étudier une espèce d’araignée locale avec certains comportements intéressants. En 2006, il a commencé à recueillir des Dolomedes tenebrosus près de son université. Normalement, ces arachnides trainent près de l’eau, où elles attendent les vibrations aquatiques produites par ses proies qui sont des insectes, des têtards et de petits poissons. Elles chassent sur la surface de l’eau, elles peuvent aussi réaliser des plongées lorsqu’elles sont menacées.

Les femelles araignées D. Tenebrosus font environ 7,6 centimètres de diamètre et sont 14 fois plus grandes que les mâles relativement chétifs, qui peuvent s’étendre sur 2,5 cm. Trouver les arachnides est plus facile la nuit, quand leurs huit yeux brillent comme des petites lumières dans l’obscurité, révélant parfois jusqu’à 50 individus dans une zone de la taille d’une place de stationnement.

Ce que Schwartz a vu, encore et encore, c’est que, après une courte phase de séduction et une poussée rapide du pédipalpe (les mandibules de l’araignées sur lesquelles se trouve son organe de reproduction), les mâles meurent, à chaque fois. “Je n’ai pas encore trouvé un mâle qui n’est pas mort quand il copule”, a déclaré Schwartz, estimant qu’il a observé près de 300 de ces accouplements.

La surprise fut totale lorsque Schwartz réalisa que ce n’était pas les femelles qui tuaient les mâles, comme cela a été observé dans d’autres espèces. Au contraire, dès qu’un mâle a commencé à transférer son sperme, il se recroqueville, inerte, suspendu à l’orifice génital de la femelle jusqu’à ce qu’elle l’enlève ou le mange.

Vidéo tirée de l’étude :

La raison vient d’une bizarrerie inhabituelle dans la physiologie de cette araignée mâle.

Pendant l’accouplement, le mâle gonfle ce qui est appelé un bulbe hematodochal à l’intérieur du pédipalpe, l’appendice qu’il utilise pour déposer le sperme dans la femelle. Dans la plupart des espèces, le bulbe peut être dégonflé après l’accouplement. Chez notre araignée, Dolomedes tenebrosus, il est irréversiblement gonflé, ce qui entraine un changement soudain de la pression artérielle qui provoque le recroquevillement du mâle, l’immobilisant et le laissant collé à la femelle, mais pas encore mort.

A partir de l’étude : Après la copulation, le mâle pend à partir de l’ouverture génitale de la femelle par le simple pédipalpe (cerclé) qu’il a inséré pendant la reproduction.

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Quand Schwartz a séparé les mâles accouplés de leurs géantes partenaires, il a constaté que le système circulatoire des mâles continuait de pomper le sang pendant près de trois heures. Pour Scwartz, techniquement, ils ne sont pas encore morts, mais ils sont sur cette voie et ils ne reviendront pas.

Les femelles araignées Dolomedes tenebrosus cannibalisent toujours leurs compagnons, commençant principalement leurs repas 20 minutes après l’accouplement. Schwartz affirme que sa prochaine série de publications décrira la cannibalisation et les avantages potentiels sur la reproduction chez le mâle.

Selon Schwartz :

Nous avons la preuve que, en mourant, puis par cannibalisation sexuelle, [le mâle] augmente le nombre et la taille de sa propre progéniture.

C’est un étrange arrangement, mais qui a évolué à plusieurs reprises, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la famille des araignées tisseuses. Certains des mécanismes employés comprennent les mutilations génitales, où les mâles se débarrassent de leur pédipalpe qu’il laisse à l’intérieur de la femelle (à la suite de cette découverte, il a d’ailleurs été déterminé que le mâle devenait plus fort sans ses imposantes parties génitales).

L’étude publiée cette semaine sur Biology Letters : Spontaneous male death and monogyny in the dark fishing spider.

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