Des éjections de matière pourraient expliquer le mystère d’un pulsar à variation rapide
À environ 4 500 années-lumière de la Terre, nichée dans la constellation du Sextan, se trouve une étoile morte à rotation ultra-rapide, appelée pulsar, dont le comportement erratique échappe depuis longtemps à la compréhension des astronomes. Aujourd’hui, grâce à l’interaction complexe d’une douzaine de télescopes différents répartis sur la Terre et dans l’espace, ce mystère a été résolu.
GIF d’entête, à partir de la vidéo plus bas : représentation artistique du pulsar PSR J1023+0038 en train de voler du gaz à son étoile compagne. Ce gaz s’accumule dans un disque autour du pulsar, tombe lentement vers lui et est finalement expulsé dans un jet étroit. En outre, un vent de particules s’éloigne du pulsar, représenté ici par un nuage. (ESO/M. Kornmesser)
Les pulsars, qui comptent parmi les objets les plus énigmatiques de l’univers, sont des étoiles à neutrons hautement magnétiques (les noyaux effondrés d’étoiles supermassives) qui émettent des faisceaux énergétiques de rayonnement électromagnétique à partir de chacun de leurs pôles magnétiques. Un pulsar en particulier, connu des astronomes sous le nom de J1023, est observé depuis un certain temps et il est connu pour son comportement inexplicable : il passe presque constamment d’un mode de luminosité à un autre.
J1023 est en orbite autour d’une autre étoile et, au cours de la dernière décennie, il a activement « arraché de la matière » à sa compagne, qui s’est accumulée dans un disque autour du pulsar et qui tombe lentement vers lui.
L’Observatoire européen austral (ESO) a réalisé une vidéo montrant ce phénomène :
Lorsque le pulsar est en mode « élevé », il émet des rayons X, des rayons ultraviolets et de la lumière visible. En revanche, lorsqu’il est en mode « faible », les émissions du pulsar sont plus réduites et contiennent davantage d’ondes radio. Le passage d’un mode à l’autre peut se faire en quelques secondes.
Maria Cristina Baglio, chercheuse à l’université de New York à Abou Dhabi, affiliée à l’Institut national italien d’astrophysique (INAF), estime qu’il s’agit d’un « événement cosmique extraordinaire ». Elle est l’auteure principale d’une étude publiée cette semaine sur ce sujet (lien plus bas).
Selon Baglio :
D’énormes quantités de matière, semblables à des boulets de canon cosmiques, sont lancées dans l’espace dans un laps de temps très court de quelques dizaines de secondes à partir d’un petit objet céleste dense tournant à des vitesses incroyablement élevées.
Grâce à l’étude, qui a utilisé trois télescopes différents de l’ESO pour les observations, nous savons maintenant que les éjections soudaines de matière du pulsar sur de très courtes périodes sont responsables de ces commutations particulières.
L’équipe a utilisé le Very Large Telescope et le New Technology Telescope de l’ESO pour détecter la lumière visible et proche infrarouge. Elle a également utilisé le réseau Atacama Large Millimeter/submillimeter Array, plus connu sous le nom d’ALMA, partenaire de l’ESO, pour ses observations.
En deux nuits, en juin 2021, les astronomes ont observé le système effectuer plus de 280 variations entre ses modes élevé et faible.
Bien que cette découverte ait permis de lever le voile sur le mystère entourant le comportement de J1023, de nombreux aspects restent à étudier. La construction au Chili du futur Télescope géant européen (ELT) de l’ESO offrira un point de vue sans précédent pour déchiffrer les mécanismes de commutation de J1023. L’ELT permettra aux astronomes d’obtenir des informations cruciales sur la façon dont le comportement de commutation de mode affecte l’abondance, la distribution, la dynamique et les énergies de la matière entrante.
L’étude publiée dans Astronomy & Astrophysics : Matter ejections behind the highs and lows of the transitional millisecond pulsar PSR J1023+0038 et présentée sur le site de L’Observatoire européen austral : ESO telescopes help unravel pulsar puzzle.