La tectonique des plaques ne serait pas une condition nécessaire à l’apparition de la vie
Pendant des siècles, des scientifiques ont cherché à percer les mystères entourant les origines de la vie sur Terre. L’une des théories dominantes, étayée par de nombreuses preuves géologiques, est que la tectonique des plaques a joué un rôle essentiel dans la création des conditions nécessaires à l’émergence et à l’épanouissement de la vie. Cependant, une idée adoptant une autre perspective remet aujourd’hui en question cette vieille hypothèse. Des recherches récentes et des découvertes ont mis en lumière la possibilité que la tectonique des plaques ne soit pas une condition préalable à l’origine et à la subsistance de la vie sur notre planète.
Image d’entête : représentation artistique de la tectonique des plaques qui implique le mouvement horizontal et l’interaction de grandes plaques à la surface de la Terre. (Université de Rochester/ Michael Osadciw)
Contrairement aux précédentes théories, la tectonique des plaques, souvent considérée comme essentielle à la vie, n’a pas bougé sur Terre il y a 3,9 milliards d’années, comme l’affirme une nouvelle étude révolutionnaire. Les scientifiques ont utilisé des zircons, de minuscules cristaux minéraux, pour déchiffrer les débuts de l’histoire tectonique de la Terre, dévoilant une relation complexe entre la croûte et le noyau de la planète et l’apparition de la vie.
Les chercheurs ont utilisé des zircons provenant d’échantillons de grès (photo ci-dessus) prélevés en Afrique du Sud. L’encadré montre une photo au microscope du cristal de zircon avec des lignes de champ magnétique hypothétiques créées par des particules magnétiques à l’intérieur du cristal. (Images de l’université de Rochester / photo de J. Adam Fenster / illustration de Michael Osadciw)
La chaleur dégagée par la tectonique des plaques forme les continents et d’autres caractéristiques géologiques, considérées comme essentielles à la vie.
Selon John Tarduno, chercheur à l’université de Rochester (États-Unis) :
Cependant, cette nouvelle recherche remet en question cette idée.
En étudiant une tectonique vieille de 3,9 milliards d’années, l’équipe de Tarduno n’a trouvé aucun signe de plaques en mouvement. Ils suggèrent que la Terre utilisait un « régime de couvercle stagnant » (stagnant lid tectonics) pour libérer la chaleur, soulignant que la tectonique des plaques, bien que vitale pour le maintien de la vie, pourrait ne pas être nécessaire à l’apparition de celle-ci.
*Un régime de couvercle stagnant apparaît lorsque la lithosphère supérieure froide est trop visqueuse pour participer à l’écoulement sous-jacent du manteau. La limite d’élasticité du couvercle est suffisamment élevée pour qu’il ne puisse pas se rompre brusquement. Cette relation dépend fortement du rapport entre la résistance de la lithosphère et les contraintes convectives naturelles. Par conséquent, si la résistance de la lithosphère est supérieure aux contraintes convectives, il y a une tectonique de couvercle stagnante.
Selon Tarduno :
Aucune tectonique des plaques ne s’est produite pendant et des centaines de millions d’années après l’apparition supposée de la vie. Cela suggère que les exoplanètes porteuses de vie ne doivent pas nécessairement présenter une tectonique des plaques.
En retenant l’aimantation de la Terre lors de sa formation, les zircons peuvent aider à retracer l’évolution du champ magnétique terrestre. L’étude a donc commencé par l’examen de la magnétisation des zircons pour étudier le champ magnétique terrestre. L’équipe de Tarduno a constaté qu’entre 3,9 et 3,4 milliards d’années, l’intensité du champ magnétique, et donc les latitudes, n’ont pas changé, ce qui suggère l’absence de tectonique des plaques.
Les auteurs de l’étude ont conforté leurs conclusions en observant les mêmes schémas dans les zircons d’Australie occidentale. La Terre étant un moteur thermique, elle libère de la chaleur par le biais de la tectonique des plaques ou de la tectonique des couvercles stagnants, ce qui provoque des fissures à la surface.
Contrairement à la tectonique des plaques, la “tectonique des couvercles stagnants” (stagnant lid tectonics) n’implique pas de mouvement horizontal actif des plaques. En revanche, la couche externe de la planète reste immobile tandis que l’intérieur se refroidit, formant des continents par le biais de grands panaches de matériaux en fusion qui provoquent la fissuration de la couche externe.
Tarduno de conclure :
Nos recherches suggèrent que nous avons eu suffisamment de cycles géochimiques à travers des processus de couvercle stagnants pour l’origine de la vie. Il ajoute que si la Terre connaît une tectonique des plaques, d’autres planètes comme Vénus connaissent une tectonique des couvercles stagnants.
Avec son environnement inhospitalier, Vénus illustre les conséquences d’une évacuation inefficace de la chaleur. L’étude laisse entendre que la Terre pourrait avoir commencé sa tectonique des plaques peu après 3,4 milliards d’années, mais la date exacte reste un point de désaccord entre les géologues. Tarduno souligne l’importance que revêt sur le long terme la tectonique des plaques pour le maintien de l’habitabilité de la Terre. Toutefois, selon lui, la vie initiale sur Terre « ne nécessitait pas nécessairement l’existence de la tectonique des plaques ».
L’étude publiée dans Nature : Hadaean to Palaeoarchaean stagnant-lid tectonics revealed by zircon magnetism et présentée sur le site de l’Université de Rochester : Plate tectonics not required for the emergence of life.