En Finlande, une découverte fortuite montre qu’un enfant de l’âge de pierre aurait été enterré aux côtés de son chien
Une surprenante découverte en Finlande offre une image unique des peuples de l’âge de pierre de la région. Cette trouvaille concerne un site funéraire contenant les restes d’un enfant ainsi que des objets funéraires, des plumes d’oiseaux, de la fourrure canine et des fibres végétales.
Image d’entête : représentation artistique du site funéraire. (Tom Björklund/ Université d’Helsinki)
Ce qui distingue ce site, c’est l’état de conservation extrêmement bon des fourrures et des plumes de la sépulture par rapport à d’autres découvertes faites en Finlande. Les sols finlandais sont, dans l’ensemble, très acides, dégradant rapidement toute matière organique qui y est enfouie.
Ces découvertes donnent un aperçu unique des pratiques funéraires des peuples de l’âge de pierre qui vivaient sur les terres de l’actuelle Finlande orientale. Le site a été découvert par hasard en raison de la présence d’ocre rouge, un sol riche en fer étroitement associé aux sites funéraires et à l’art rupestre, qui avait taché une route en gravier près de la ville d’Outokumpu.
Selon l’auteur principal de l’étude (lienj plus bas), Tuija Kirkinen, chercheur postdoctoral au département des cultures de l’université d’Helsinki :
Le travail est vraiment lent et cela m’a vraiment fait bondir lorsque j’ai trouvé de minuscules fragments de vêtements et de mobilier funéraire du passé, surtout en Finlande, où tous les os non brûlés ont tendance à se décomposer. Tout cela nous donne un aperçu très précieux des pratiques funéraires à l’âge de pierre, indiquant comment les personnes avaient préparé l’enfant pour le voyage après la mort.
Le site a été découvert pour la première fois en 1991 à Majoonsuo, un site proche de la ville d’Outokumpu dans l’est de la Finlande, par des archéologues de l’Agence du patrimoine finlandais. La tombe contenait les dents d’un enfant dont on estime, d’après l’analyse dentaire, qu’il est mort entre l’âge de 3 et 10 ans. Sur la base d’examens de suivi sur le site en 2018, l’Agence du patrimoine finlandais a déterminé qu’il était « à risque de destruction », ce qui a entraîné son excavation.
Le site funéraire rouge-ocre de l’enfant à Majoonsuo. (Kristiina Mannermaa/ Université d’Helsinki)
Le site a été daté à la période du Mésolithique, âge moyen de la pierre, sur la base de la forme de deux pointes de flèches en quartz trouvées à l’intérieur. Cela signifie que la tombe a été creusée il y a environ 8 000 ans. Dans les échantillons de sol prélevés sur le site, l’équipe a découvert des barbules de plumes de gibier d’eau, des plumes qui, selon elle, ont servi à créer une couche sur laquelle l’enfant était allongé. Un seul fragment de plume provenant d’un faucon a également été trouvé. Il peut s’agir de la plume d’une flèche ou d’une décoration sur un vêtement.
Outre ces morceaux de plumes, l’équipe a également découvert 24 fragments de fourrure de mammifères à la base de la fosse funéraire. Bon nombre d’entre eux étaient très dégradés, mais au moins trois étaient suffisamment préservés pour permettre une identification. Selon l’équipe, ces morceaux de fourrure provenaient d’un canidé tel qu’un loup ou un chien. Cet animal a probablement été déposé aux pieds de l’enfant dans le cadre du rituel funéraire. Cela dit, l’équipe n’exclut pas la possibilité que ces poils proviennent de vêtements tels que des chaussures, qui auraient pu être façonnées en peau de chien ou de loup.
Image au microscope électronique d’un éventuel poil canin trouvé sur le site. (Tuija Kirkinen/ Université d’Helsinki)
Selon Kristiina Mannermaa, chercheuse et professeure associée au département des cultures de l’université d’Helsinki :
Des chiens enterrés avec les défunts ont été trouvés, par exemple, à Skateholm, un célèbre site funéraire du sud de la Suède datant de quelque 7 000 ans. La découverte à Majoonsuo est sensationnelle, même s’il ne reste que des poils de l’animal ou des animaux, pas même des dents. On ne sait même pas s’il s’agit d’un chien ou d’un loup.
La méthode utilisée démontre que des traces de fourrure et de plumes peuvent être retrouvées même dans des tombes vieilles de plusieurs milliers d’années, y compris en Finlande.
Enfin, les fibres végétales retrouvées sur le site proviennent de saules et d’orties. Ces fibres étaient probablement utilisées pour fabriquer des vêtements ou des équipements spécialisés tels que des filets de pêche.
Le trésor de données que les archéologues ont pu récupérer sur ce site contribuera grandement à améliorer ce que l’on sait des pratiques funéraires mésolithiques dans cette région. Elles aident également à mieux comprendre comment les habitants abordaient la fabrication de divers biens tels que les vêtements ou les outils.
Ces données sont d’autant plus importantes que cette région de Finlande n’a, jusqu’à présent, livré que très peu de preuves archéologiques en raison de la nature chimique de ses sols. L’équipe explique qu’il est très surprenant de constater que la matière organique s’est si bien conservée au fil des siècles dans les sols très acides de la région.
L’étude publiée dans PlosONE : Preservation of microscopic fur, feather, and bast fibers in the Mesolithic ochre grave of Majoonsuo, Eastern Finland et présentée sur le site de l’université d’Helsinki : Artefacts made of bird feathers, plant fibres and fur buried with a child in the Mesolithic Stone Age.