La menace que représente l’extinction des espèces pourrait être beaucoup plus importante que prévu
Une nouvelle étude suggère que la menace d’extinction qui pèse sur toutes les espèces de la Terre pourrait être beaucoup plus élevée qu’on ne le pensait jusque-là. Une enquête sur la biodiversité a en effet révélé qu’environ 30 % des espèces ont été menacées ou poussées à l’extinction au niveau mondial depuis l’an 1500.
Une équipe internationale de chercheurs a interrogé un « groupe important et diversifié » d’experts en biodiversité du monde entier « qui étudient collectivement tous les principaux taxons et habitats dans les écosystèmes d’eau douce, terrestres et marins », selon l’étude publiée cette semaine (lien plus bas).
Les 3 331 experts en biodiversité de 113 pays ont été invités à estimer la perte de biodiversité mondiale passée et future et à classer les facteurs qui poussent les espèces à se retrouver menacées ou à disparaître au niveau mondial.
Les experts, qui ont tous publié des études significatives sur la biodiversité, ont également classé les facteurs de perte de la biodiversité mondiale et estimé son impact sur les écosystèmes et les populations.
Les chercheurs, dirigés par Forest Isbell, professeur associé à l’université du Minnesota (Etats-Unis), ont comparé les résultats de l’enquête à d’autres sources d’information et ils ont souligné l’importance de cette étude, car selon l’étude :
Les décideurs s’appuient souvent sur le jugement des experts pour combler les lacunes en matière de connaissances. Le jugement d’expert a fourni des estimations et des prédictions d’inconnues clés dans des domaines aussi divers que la sécurité de l’énergie nucléaire, les éruptions volcaniques, le changement climatique et la perte de biodiversité.
Les estimations et les prédictions les plus précises proviennent de groupes d’experts importants et diversifiés, en partie parce que l’expertise décline précipitamment en dehors du domaine de spécialisation d’un individu.
Un précédent rapport de 2019 des Nations unies compilé par seulement 145 experts de 50 pays a révélé qu’environ 12,5 % de toutes les espèces sur Terre, soit environ 1 million d’espèces, auraient été menacées ou conduites à l’extinction au niveau mondial depuis l’an 1500.
Pour Forest Isbell, l’estimation fournie par l’enquête peut différer des estimations précédentes parce qu’elle prend en compte des espèces moins étudiées comme les insectes, ajoutant que :
Les experts ont également reconnu l’existence d’une grande incertitude autour de leurs estimations, avec peut-être aussi peu que 16 % ou autant que 50 % des espèces menacées ou en voie d’extinction au cours de cette période.
Pour Akira Mori de l’Université de Tokyo au Japon, coauteur de cette étude, celle-ci est « sans précédent » car elle a rassemblé un groupe aussi important d’experts régionaux du monde entier.
A partir de l’étude : estimations par les experts des changements de la biodiversité mondiale dans les biomes terrestres (colonne de gauche) et les domaines marins (colonne de droite) depuis 1500 (ligne du haut), d’ici 2100 si les tendances actuelles se poursuivent (ligne du milieu) ou d’ici 2100 si les efforts de conservation sont intensifiés (ligne du bas). Les valeurs représentent les médianes de toutes les réponses reçues des experts qui étudient la biodiversité dans chaque biome. (Forest Isbell et col./ Frontiers in Ecology and the Environment)
L’étude a également tiré un certain nombre de conclusions cohérentes avec les précédentes études, notamment en identifiant les changements d’utilisation des terres par l’humain et la surexploitation comme les principaux facteurs de perte globale pour les espèces terrestres communément étudiées, tandis que la surexploitation et le changement climatique étaient les facteurs de perte de la vie marine.
Pour d’autres espèces communément étudiées comme les amphibiens, les reptiles et les oiseaux, les changements dans la façon dont nous exploitons la terre et la mer sont les principaux facteurs de perte de biodiversité.
En revanche, le changement climatique et la pollution sont les principaux facteurs de perte de biodiversité pour les espèces moins étudiées, comme les invertébrés aquatiques et les microbes.
L’étude publiée dans Frontiers in Ecology and the Environment : Expert perspectives on global biodiversity loss and its drivers and impacts on people et présentée sur le site de l’Université du Minnesota : Biodiversity survey reveals that more species are threatened with extinction than previously thought.