Le nom que se donnent les dauphins est influencé par leur lieu de vie
Les Grands Dauphins font preuve de créativité dès les premiers mois de leur vie en créant un son unique (ou sifflement) qu’ils utilisent pour s’identifier les uns les autres, on peut considérer qu’il s’agit d’un nom. Mais en quoi ces noms diffèrent-ils les uns des autres ? Il s’avère qu’ils varient en termes de fréquence, de hauteur, de volume et de longueur, et sont largement influencés par l’environnement océanique et la démographie des populations de dauphins.
Les scientifiques étudient le sifflement caractéristique des grands dauphins (Tursiops truncatus) depuis plus de 50 ans et, au fil des décennies, ils ont fait d’importants progrès pour comprendre comment ces sifflements sont utilisés et pourquoi. Mais il y avait un manque dans la compréhension des facteurs exacts qui influencent les sifflements singuliers des dauphins. Aujourd’hui, cette nouvelle étude semble faire la lumière sur cette question.
Gabriela La Manna et son équipe de l’université de Sassari, en Italie, ont étudié les dauphins de la mer Méditerranée. Ils ont constaté que ceux qui vivent dans des zones où il y a plus d’herbes marines, par exemple, ont des sifflements plus aigus et plus courts que ceux des dauphins qui vivent dans des zones de l’océan où les fonds marins sont plus boueux.
Selon La Manna :
Même si le dauphin fait partie des espèces de cétacés les plus étudiées, de nombreux aspects de leur écologie et de leur comportement sont encore inconnus. Étant donné la rapidité avec laquelle les activités humaines modifient les océans, il est important de comprendre les facteurs environnementaux et socio-comportementaux qui permettent aux animaux de s’adapter à leur environnement.
En 2013, des chercheurs ont découvert que les dauphins imitent le sifflement caractéristique de leurs congénères pour rétablir le contact. Entre-temps, en 2018, une étude sur les dauphins a révélé qu’ils conservent « leurs noms » à l’âge adulte. Plus récemment, une autre étude menée la semaine dernière (lien ci-dessous) a révélé que les dauphins peuvent s’identifier non seulement par des sifflements, mais aussi en goûtant leur urine, ce qui peut sembler bizarre, mais montre que les dauphins ont des mécanismes sociaux sophistiqués et accordent beaucoup d’importance à la différenciation entre les individus.
Dans cette nouvelle étude, La Manna et son équipe ont passé en revue 188 heures de données acoustiques enregistrées par des groupes de recherche entre 2006 et 2020. Les sons ont été enregistrés à six endroits de la mer Méditerranée. Les chercheurs ont étudié les sons des dauphins des bassins ouest et est, car il existe une variation génétique entre eux.
Ils ont extrait 168 sifflements individuels des enregistrements et ils ont analysé leurs caractéristiques acoustiques en fonction d’un ensemble de facteurs : la démographie de la population, la génétique, l’environnement océanique local et le lieu où le sifflement a été enregistré. En fin de compte, le lieu a partiellement affecté la variabilité des sifflements, tandis que les différences génétiques n’ont pas eu de forte influence.
En revanche, les caractéristiques démographiques et les conditions environnementales semblent fortement influencer la signature des sifflements. Selon les chercheurs, cela correspond à « l’hypothèse de l’adaptation acoustique », qui est une vieille théorie selon laquelle les animaux adaptent leurs vocalisations aux conditions locales afin de renforcer l’utilité de leurs sons.
Cependant, pour Jason Bruck, professeur adjoint à l’université d’État de Stephen F. Austin (États-Unis), et auteur de la récente étude sur l’urine de dauphin, il pourrait encore y avoir des aspects des dauphins dont nous ne sommes pas conscients. Leurs différences anatomiques pourraient expliquer la variation des styles de sifflement, et la génétique pourrait expliquer ces différences.
L’étude publiée dans Scientific Reports : Determinants of variability in signature whistles of the Mediterranean common bottlenose dolphin.