Comment notre cerveau traite-t-il les odeurs ?
Que se passe-t-il dans votre tête quand vous sentez l’odeur du café fraichement moulu ? Ou une bouche d’égout bouchée ? Selon une équipe de chercheurs japonais, votre cerveau traite malheureusement la seconde plus rapidement que la première.
Des chercheurs, qui ont publié leurs résultats dans une étude publiée récemment (lien plus bas), ont mis au point un appareil capable de créer dix odeurs différentes, de l’agréable au putride.
Image d’entête : participant à l’étude portant un bonnet d’électroencéphalogramme et utilisant un dispositif de diffusion des odeurs afin d’évaluer le caractère agréable de ces dernières. (Mugihiko Kato/ Université de Tokyo)
Ils ont ensuite demandé à des volontaires d’utiliser cet appareil tout en portant des casques d’électroencéphalogramme (EEG), qui enregistraient les signaux électriques de leur cerveau au fur et à mesure de l’administration des odeurs. Les données EEG ont ensuite été transmises à un programme d’apprentissage automatique afin de déterminer quand et où le cerveau traitait les odeurs.
Selon le premier auteur, Mugihiko Kato, étudiant en doctorat à la Graduate School of Agricultural and Life Sciences de l’Université de Tokyo, au Japon :
Nous avons été surpris de constater que nous pouvions détecter les signaux des odeurs présentées à partir de réponses EEG très précoces, jusqu’à 100 millisecondes après l’apparition de l’odeur, ce qui suggère que la représentation des informations olfactives dans le cerveau se produit rapidement.
Les chercheurs ont constaté que le cerveau des participants réagissait plusieurs centaines de millisecondes avant qu’ils ne perçoivent consciemment l’odeur.
Toujours selon Kato :
Notre étude a montré que les différents aspects de la perception, en particulier le caractère agréable, désagréable et la qualité de l’odeur, sont le fruit d’un traitement cortical spatial et temporel différent.
Les odeurs de pourriture et de rance provoquent également des réponses plus rapides que les odeurs florales ou fruitées proposées, le cerveau des participants les différenciant des odeurs neutres 300 millisecondes après leur apparition, contre 500 millisecondes pour les odeurs plus agréables.
Images des odeurs traitées par le cerveau. Les relevés EEG ont permis à l’équipe de recherche de déterminer quelles parties du cerveau traitaient les odeurs. (Mugihiko Kato/ Université de Tokyo)
Selon Masako Okamoto, également de l’Université de Tokyo et coauteur de l’étude :
La représentation du caractère désagréable dans le cerveau est apparue plus tôt que le caractère agréable et la qualité perçue.
Les chercheurs pensent que ce phénomène est lié à notre capacité à réagir au danger, une mauvaise odeur étant plus susceptible d’annoncer une mauvaise nouvelle qu’une bonne odeur.
Selon Okamoto :
L’élucidation du moment et de l’endroit du cerveau où apparaît la perception olfactive nous aide à comprendre le fonctionnement du système olfactif.
Nous pensons également que notre étude a des implications méthodologiques plus larges. Par exemple, on ne savait pas que l’EEG enregistré sur le cuir chevelu nous permettrait d’évaluer la représentation des odeurs à partir de périodes de temps aussi courtes que 100 millisecondes.
Les chercheurs affirment que leur méthode a des implications pour l’étude des maladies neurodégénératives, telles que les maladies de Parkinson et d’Alzheimer, qui comptent souvent la perte de l’odorat ou du goût parmi leurs symptômes.
Ensuite, les chercheurs veulent voir comment leurs données olfactives fonctionnent de concert avec d’autres stimuli sensoriels.
Pour Kato :
Dans notre vie quotidienne, les odeurs sont perçues en même temps que d’autres informations sensorielles comme la vision, et chaque sens influence la perception de l’autre.
Bien que nous ayons présenté des stimuli olfactifs seuls dans l’étude actuelle, nous pensons qu’il est important d’analyser l’activité cérébrale dans des conditions plus naturelles, par exemple en présentant des odeurs avec un film.
L’étude publiée dans PNAS : Spatiotemporal dynamics of odor representations in the human brain revealed by EEG decoding et présentée sur le site de l’Université de Tokyo : Seeing how odor is processed in the brain.