À cause des radiations, les missions martiennes avec équipage ne pourraient pas durer plus de 4 ans
Une équipe internationale de scientifiques a calculé qu’une mission avec équipage vers Mars ne devrait durer que 4 ans au maximum pour éviter que la santé des astronautes ne soit mise en danger par une exposition prolongée aux rayonnements cosmiques.
Image d’entête : représentation de Mars frappée par des particules solaires. (NASA Scientific Visualization Studio/ MAVEN Science Team)
La planification d’une mission avec équipage vers Mars serait l’un des défis les plus redoutables de toutes les tentatives d’exploration jamais entreprises par l’humanité. Chaque aspect d’une telle aventure sur plusieurs années aurait des répercussions complexes sur tous les autres facteurs, ce qui entraînerait un conflit constant entre les scientifiques et les ingénieurs qui chercheraient à faire des compromis pour répondre aux exigences de la mission.
Outre des éléments tels que le type de moteur, le nombre de membres de l’équipage, le régime alimentaire et un millier d’autres choses, la planification doit également tenir compte du danger omniprésent des radiations. Une fois sortis de l’enveloppe protectrice de l’atmosphère terrestre et de son champ magnétique, les astronautes seraient à la merci des rayons cosmiques du Soleil et de la grande galaxie. La question est donc de savoir comment minimiser une telle menace.
À une époque, Mars possédait un champ magnétique similaire à celui de la Terre, ce qui empêchait son atmosphère d’être décapée par le rayonnement. (NASA)
Selon une étude récente à laquelle ont participé des chercheurs de l’université de Californie à Los Angeles (UCLA), du Massachusetts Institute of Technology (MIT/ Etats-Unis), de l’Institut des sciences et des technologies de Skolkovo (Russie) et du Centre de recherche des sciences de la Terre allemand (GFZ), la clé de la protection des astronautes en route vers la planète rouge est une question de temps et de matériau de protection.
Le point important est que le rayonnement cosmique n’est pas constant. Il varie en fonction de l’activité du Soleil, qui peut sembler immuable, mais qui est en fait une étoile variable avec une période majeure de 11 ans pendant laquelle son activité augmente et diminue.
Il existe deux sources de rayons cosmiques. La première est le Soleil, qui émet des particules énergétiques solaires (SEP pour Solar Energetic Particles). Ces particules sont généralement plus légères et moins énergétiques que les rayons cosmiques galactiques (GCR pour galactic cosmic rays), qui sont générés par les supernovae, les trous noirs, les quasars et d’autres événements similaires à forte énergie. Ces rayons GCR sont souvent constitués de particules très lourdes volant à des vitesses et des énergies qui ne peuvent être approchées que de justesse dans le plus puissant des accélérateurs de particules sur Terre et peuvent, à terme, causer des dommages considérables aux tissus vivants.
La bonne nouvelle est que le Soleil peut agir comme un bouclier temporaire contre les GCR. Lorsque le Soleil est le plus actif, les vents solaires deviennent très forts et peuvent repousser les GCR (rayons cosmiques galactiques), ce qui signifie que les astronautes seraient principalement exposés à des particules énergétiques solaires moins énergétiques, les GCR étant plutôt un rayonnement de fond réduit.
D’après les calculs de l’étude, étant donné que l’activité des GCR est la plus faible dans les 6 à 12 mois qui suivent une activité solaire maximale, une mission martienne de moins de 2 ans serait pratique. En revanche, une mission de plus de 4 ans exposerait l’équipage à des niveaux dangereux de rayonnement avant le retour sur Terre, ce qui fixe une limite supérieure à la durée de la mission.
Une des raisons de cette limite est la nature du risque de radiation. Le pire danger viendrait des GCR, car ils sont si énergétiques que lorsque les chercheurs ont utilisé des modèles d’organes humains et les ont placés derrière différents boucliers, le matériau de blindage lui-même devient un problème.
Il existe de nombreux moyens de protéger un astronaute, notamment de lourdes plaques de métal, des réservoirs d’eau ou des plaques de polymères de faible densité. Le problème est qu’un bouclier suffisamment lourd pour assurer une protection directe ne pose pas seulement des problèmes de poids pour le vaisseau spatial, le bouclier peut également émettre des rayonnements secondaires lorsque les rayons cosmiques divisent les atomes du bouclier.
Selon Yuri Shprits, géophysicien de recherche à l’université de Californie à Los Angeles :
Cette étude montre que, même si le rayonnement spatial impose des limites strictes quant au poids du vaisseau spatial et au moment du lancement, et qu’il présente des difficultés technologiques pour les missions humaines vers Mars, une telle mission est viable.
L’étude publiée dans Space Weather : Beating 1 Sievert: Optimal Radiation Shielding of Astronauts on a Mission to Mars et présentée sur le site de l’université de Californie à Los Angeles : Will it be safe for humans to fly to Mars?