Géochimie : des microbes pourraient peupler le sous-sol de Mars
L‘un des principaux objectifs de l’astromobile Perseverance de la NASA est de fouiller la surface de Mars à la recherche de signes d’une ancienne vie microbienne. Mais une nouvelle étude de la géochimie de la planète rouge suggère que la vie pourrait encore prospérer sous sa surface aujourd’hui.
Image d’entête : des tunnels de lave à Hawaï, qui pourraient être similaires aux grottes martiennes, où de nouvelles recherches suggèrent que la vie microbienne pourrait être présente aujourd’hui. (Wikimedia)
Pour nous, Terriens, la planète Mars moderne peut sembler être une terre désolée, mais cela n’a pas toujours été le cas. Au fil des décennies, les astromobiles et les orbiteurs ont trouvé des montagnes de preuves (parfois littéralement) que la planète rouge était autrefois beaucoup plus bleue, couverte d’océans et de rivières. La vie aurait pu s’installer à cette époque favorable, puis s’éteindre avec l’assèchement de la planète, avant de se développer dans la variété complexe que nous connaissons sur Terre.
Partant de cette hypothèse, la NASA a recherché des preuves de cette ancienne vie, et Perseverance vient de commencer sa mission de traque aux fossiles microbiens. Mais n’accordons-nous pas assez de crédit à la vie ?
Des déserts les plus arides aux lacs souterrains situés sous des centaines de mètres de glace polaire, des microbes apparaissent régulièrement dans des environnements que l’on croyait auparavant trop hostiles pour la vie.
Et si cela se produit ici sur Terre, il s’ensuit que cela devrait être possible sur d’autres planètes également. D’autant plus que des études menées sur la Station spatiale internationale ont montré que les microbes peuvent même survivre dans l’environnement sans air et fortement irradié de l’espace.
Cela suggère que des formes de vie résistantes pourraient encore prospérer sur Mars à l’heure actuelle. Après tout, la Terre possède son propre écosystème gigantesque de microbes qui vivent dans les fissures et les crevasses entre les roches, survivant grâce à l’énergie produite par les réactions géochimiques entre la roche et l’eau. Pour cette nouvelle étude, des chercheurs de l’université Brown ont cherché à savoir si Mars pouvait avoir un écosystème souterrain similaire.
Une réaction chimique particulière pourrait alimenter les organismes. La radiolyse se produit lorsque des éléments radioactifs présents dans les roches décomposent l’eau en ses atomes d’hydrogène et d’oxygène, que les microbes peuvent ensuite récolter pour en tirer de l’énergie. Sur Terre, on a découvert que des microbes dotés de cette capacité vivaient jusqu’à 1,6 km sous la surface, et un phénomène similaire pourrait se produire sur la planète rouge.
Selon Jesse Tarnas, auteur principal de l’étude :
La grande implication ici pour la science de l’exploration souterraine est que partout où vous avez de l’eau souterraine sur Mars, il y a une grande probabilité que vous ayez assez d’énergie chimique pour entretenir une vie microbienne souterraine. Nous ne savons pas si la vie a commencé sous la surface de Mars, mais si c’est le cas, nous pensons qu’il y aurait suffisamment d’énergie pour la maintenir jusqu’à aujourd’hui.
Nous savons déjà que des eaux souterraines sont présentes sur Mars, et des lacs souterrains ont même été détectés sous les calottes polaires. De plus, une grande partie de son ancienne eau pourrait s’être infiltrée vers le bas, plutôt que de s’échapper dans l’espace. Mars est également beaucoup moins active sur le plan tectonique que la Terre, ce qui signifie que les microbes pourraient subsister en sous-sol sans être dérangés pendant des milliards d’années.
Pour déterminer si la radiolyse pourrait effectivement se produire sur Mars, les chercheurs de l’université Brown ont étudié les données de l’astromobile Curiosity et de plusieurs orbiteurs, ainsi que la composition d’une série de météorites martiennes découvertes sur Terre. Les signes de ce processus comprennent la présence de minéraux sulfurés, d’éléments radioactifs comme le thorium, l’uranium et le potassium, et de pores susceptibles de retenir l’eau.
Dans plusieurs types de météorites, l’équipe a trouvé ces trois ingrédients dans des quantités susceptibles de favoriser les écosystèmes microbiens. Un type de roche appelé brèche régolithique, dont l’âge est supérieur à 3,6 milliards d’années, était l’environnement le plus prometteur pour la vie.
C’est une découverte intrigante, mais qui ne pourra pas être confirmée de sitôt dans le monde réel. Les profondeurs impliquées seraient bien au-delà de la portée du Perseverance ou de tout autre robot martien. Mais s’il y a de la vie sur Mars, peut-être que d’autres instruments pourront la détecter d’une autre manière. D’autres études ont suggéré que les microbes vivant sur ou près de la surface pourraient trouver de l’énergie dans la poussière spatiale qui tombe.
L’étude publiée dans la revue Astrobiology : Earth-like Habitable Environments in the Subsurface of Mars et présentée sur le site de l’Université Brown : Mars has right ingredients for present-day microbial life beneath its surface, study finds.