La plus grande mer de Titan, la mystérieuse lune de Saturne, ferait plus de 300 mètres de profondeur
Titan, la lune de Saturne, est l’un des corps les plus fascinants du système solaire, notamment parce qu’elle abrite d’immenses océans, des lacs et des rivières de méthane liquide. A présent, des scientifiques ont utilisé un radar pour sonder la composition et la profondeur de sa plus grande mer ou lac, Kraken Mare, et l’ont estimée à au moins 300 m de profondeur.
Titan devant Saturne (Cassini/ Nasa)
Titan est enveloppé d’une atmosphère nuageuse d’azote, ce qui complique l’observation de sa surface. La sonde spatiale Cassini de la NASA, qui a orbité autour de Saturne entre 2004 et 2017, a donc été équipée d’un radar pour mieux voir le sol. Les images obtenues ont révélé un paysage étonnamment semblable à la Terre, avec un cycle « d’eau » composé d’hydrocarbures liquides qui s’accumulent dans de grands océans.
Vue en fausses couleurs des lacs du nord de Titan obtenue lors du survol de Titan par Cassini le 22 juillet 2006. (NASA / JPL-Caltech / USGS)
Selon Valerio Poggiali, auteur principal de l’étude :
La profondeur et la composition de chacune des mers de Titan avaient déjà été mesurées, à l’exception de la plus grande mer de Titan, Kraken Mare, qui non seulement porte un grand nom, mais contient également environ 80 % des liquides de surface de la lune.
Dans cette nouvelle étude, des chercheurs de l’université Cornell (États-Unis) ont entrepris de corriger cette erreur. Ils ont utilisé les données recueillies lors du survol de Cassini en 2014, lorsque la sonde a utilisé son altimètre radar pour prendre des mesures en trois points dans la Kraken Mare.
Les altimètres radar fonctionnent en émettant un faisceau d’ondes radio, puis en mesurant le temps qu’il leur faut pour rebondir sur le sol. Comme ces ondes reviennent à des vitesses différentes de celles des liquides et des solides, ils peuvent déterminer la profondeur d’une masse de liquide et donner un aperçu de sa composition.
Issue de précédentes observations : au centre, Titan telle qu’elle apparait à la lumière visible, cachée par un voile opaque, et autour les images obtenues par le spectromètre infrarouge de la sonde spatiale Cassini. (NASA/ JPL-Caltech/ Université de Nantes/ Université d’Arizona)
Les données les plus précises proviennent du Moray Sinus, un estuaire situé dans la partie nord du Kraken Mare. Là, l’équipe a découvert que la mer atteignait une profondeur de 85 m, et l’absorption des ondes radar suggère qu’elle est composée de 70 % de méthane, 16 % d’azote et 14 % d’éthane.
Dans le corps principal du Kraken Mare, cependant, l’équipe n’a pu trouver aucun signal du fond de la mer. Ce résultat pourrait signifier deux choses : soit le liquide a une composition différente et absorbe une plus grande partie des ondes radar, soit il est beaucoup plus profond. L’équipe se penche sur cette dernière possibilité, après tout, le liquide ne devrait pas être trop différent dans un même corps.
Si c’est le cas, les chercheurs estiment que le Kraken Mare doit avoir au moins 100 m de profondeur, et pourrait atteindre jusqu’à 300 m ou plus dans ses zones les plus profondes. Cela le rendrait suffisamment profond pour qu’un sous-marin robotisé puisse l’explorer, ce que la NASA a proposé pour une éventuelle mission en 2040 environ.
Titan attirera sans doute davantage l’attention pour l’exploration spatiale. Il y a même une chance qu’elle puisse abriter une vie non aquatique.
L’étude publiée dans The Journal of Geophysical Research : The Bathymetry of Moray Sinus at Titan’s Kraken Mare et présentée sur le site de l’Université Cornell : Astronomers estimate Titan’s largest sea is 1,000 feet deep.