Une réaction physique disproportionnée à la COVID-19 tire ses origines de l’Homme de Neandertal
L‘écrasante majorité des personnes qui ont contracté ou qui contracteront un jour la COVID-19, résultant de la troisième pandémie de coronavirus, appelée SRAS-CoV-2, de ce siècle, ne le sauront pas. La plupart de ceux qui ne sont pas asymptomatiques (sans symptômes) souffriront des mêmes symptômes qu’un rhume.
Image d’entête : crâne fossilisé reconstitué de néanderthalien. (Institut Max-Planck d’anthropologie évolutionniste)
Pourtant, quelques-uns réagiront sévèrement et devront être hospitalisés. Tout comme pour la grippe ou toute autre cause de détresse respiratoire, l’âge est le plus grand facteur de risque, tout comme les affections préexistantes qui peuvent aggraver de nombreux problèmes de santé, mais les recherches menées par le projet COVID-19 Host Genetics Initiative ont montré que les variantes génétiques d’une région du chromosome 3 font courir un plus grand risque à leurs porteurs de développer une forme grave de la maladie. À tous les âges et dans toutes les strates de santé.
On peut en attribuer la responsabilité à notre héritage Néandertalien. Pour certains, la forme grave de la COVID-19 est inscrite dans leurs gènes.
La région du chromosome 3 est presque identique à celle d’un homme de Néandertal de 50 000 ans originaire du sud de l’Europe. Une analyse plus approfondie a montré que, par croisement, les variantes sont parvenues aux ancêtres de l’homme moderne il y a environ 60 000 ans.
Les chromosomes sont de minuscules structures que l’on trouve dans le noyau des cellules et qui portent le matériel génétique d’un organisme. Ils se présentent sous forme de paires dont un chromosome de chaque paire est hérité de chaque parent. L’homme possède 23 de ces paires. Ainsi, 46 chromosomes portent l’intégralité de notre ADN, soit des millions et des millions de paires de bases. Et bien que la grande majorité soit identique chez les humains, des mutations se produisent et des variations persistent au niveau de l’ADN.
Les recherches menées par le projet COVID-19 Host Genetics Initiative ont porté sur plus de 3 000 personnes, dont certaines ont été hospitalisées pour une COVID-19 grave et d’autres ont été contaminées par le virus sans avoir été hospitalisées. Ils ont identifié une région sur le chromosome 3 qui influence la gravité de la maladie d’une personne infectée par le virus et qui doit être hospitalisée.
La région génétique identifiée est très longue, couvrant 49,4 milliers de paires de bases, et les variantes qui présentent un risque plus élevé de COVID-19 grave sont fortement liées. Si une personne présente l’une des variantes, il est très probable qu’elle soit atteinte des treize variantes. On a déjà constaté que des variantes comme celles-ci provenaient de Néandertaliens ou de Dénisoviens. Le professeur Pääbo, en collaboration avec le professeur Hugo Zeberg, premier auteur de cette étude et chercheur à l’Institut Max Planck d’anthropologie évolutionniste (Allemagne) et au Karolinska Institutet (Suède), a donc décidé d’examiner si c’était le cas.
Ils ont découvert qu’un Néandertalien du sud de l’Europe était porteur d’une région génétique presque identique alors que deux Néandertaliens du sud de la Sibérie et un Dénisovien ne l’étaient pas.
Ensuite, ils se sont demandé si les variantes provenaient de Néandertaliens ou si elles avaient été héritées à la fois par des Néandertaliens et des personnes d’aujourd’hui par un ancêtre commun.
Si les variantes étaient issues de croisements entre les deux groupes de personnes, cela se serait produit il y a 50 000 ans à peine. En revanche, si les variantes étaient issues du dernier ancêtre commun, elles auraient existé chez l’homme moderne depuis environ 550 000 ans. Mais des mutations génétiques aléatoires, et une recombinaison entre les chromosomes, se seraient également produites pendant cette période et parce que les variantes entre les Néandertaliens du sud de l’Europe et les humains d’aujourd’hui sont si similaires sur une si longue période d’ADN, les chercheurs ont montré qu’il était beaucoup plus probable qu’elles proviennent de croisements.
Les variantes génétiques sont presque totalement absentes en Afrique et leur fréquence est la plus élevée au Bangladesh. (Svante Pääbo/ Hugo Zeberg)
Les porteurs de ces variantes de Néandertal ont jusqu’à 3 fois plus de risques de devoir recourir à une ventilation mécanique, si l’on tient compte de l’âge, du tabagisme, de l’obésité, des caillots sanguins, etc. Les chercheurs ont également constaté qu’il existe de grandes différences dans la fréquence de ces variantes dans les différentes parties du monde. En Asie du Sud, environ 50 % de la population en est porteuse. En revanche, en Asie de l’Est, elles sont presque absentes.
L’étude publiée dans Nature : The major genetic risk factor for severe COVID-19 is inherited from Neanderthals et présentée sur le site de l’Institut Max-Planck d’anthropologie évolutionniste : Neandertal gene variant increases risk of severe Covid-19.