Détection de la signature apparente de la vie dans l’atmosphère de Vénus
Alors que la plupart des yeux sont tournés vers Mars où nous pourrions trouver, le plus probablement, de la vie au-delà de la Terre, nous devrions peut-être nous tourner vers une autre voisine. Dans l’atmosphère de Vénus, des astronomes ont fait l’étonnante découverte d’un gaz appelé phosphine, un candidat sérieux pour un signe de la présence d’une vie microbienne.
Image d’entête : une image récemment améliorée des nuages recouvrant Vénus, obtenue par la sonde Mariner 10 de la NASA en 1974. (NASA/ JPL-Caltech)
La phosphine est une molécule relativement rare sur Terre, et lorsqu’elle apparaît dans la nature, elle est généralement expulsée par les bactéries et autres microbes qui ne respirent pas d’oxygène. Comme elle ne peut pas être produite en quantité significative par d’autres processus connus, les chercheurs du Massachusetts Institute of Technology (MIT/ États-Unis) ont suggéré l’année dernière que la phosphine pourrait être une biosignature/ signe biologique très pertinent pour la présence d’une vie sur d’autres planètes :
Et maintenant, il semble que la quête ait déjà porté ses fruits, tout près de chez nous. Une équipe d’astronomes , dont certains sont les mêmes chercheurs que ceux de l’étude précédente, ont maintenant trouvé de la phosphine dans l’atmosphère de Vénus.
Représentation artistique de Vénus présentant en encart une illustration de la molécule de phosphine. (ESO/ M. Kornmesser/ L. Calçada & NASA/ JPL/ Caltech)
Avec des températures de surface atteignant les 464 °C et une pression atmosphérique près de 100 fois supérieure à celle de la Terre, Vénus est loin d’être un paradis. Mais on a longtemps émis l’hypothèse qu’une vie microscopique pourrait trouver refuge dans les hauteurs de l’atmosphère, à des altitudes comprises entre 53 et 62 km environ, où les températures sont beaucoup plus fraîches. Cette nouvelle détection de phosphine renforce l’hypothèse, mais l’inconvénient est que les nuages sont constitués d’acide sulfurique, ce qui pourrait être un défi pour le développement de tout type de vie tel que nous le connaissons.
Graphique présentant la zone atmosphérique tempérée dans laquelle des microbes aériens pourraient exister sur Vénus. (Jane S. Greaves et col.)
Selon Clara Sousa Silva, une chercheuse de l’étude :
Trouver de la phosphine sur Vénus fut un bonus inattendu. Cette découverte soulève de nombreuses questions, comme par exemple comment un organisme pourrait y survivre. Sur Terre, certains microbes peuvent supporter jusqu’à 5 % d’acide dans leur environnement, mais les nuages de Vénus sont presque entièrement constitués d’acide.
En utilisant le télescope James Clerk Maxwell (JCMT) et le réseau Atacama Large Millimeter/submillimeter Array (ALMA), l’équipe a repéré la signature spectrale de la phosphine, et elle a estimé sa concentration à environ 20 parties par milliard.
Cette vidéo montre comment le méthane a été détecté dans l’atmosphère de Mars. Le processus est le même pour trouver du phosphine sur Vénus.
Fait intrigant, l’équipe affirme que l’acide sulfurique présent dans ces nuages devrait constamment ronger la phosphine, ce qui signifie qu’un mécanisme quelconque permet de reconstituer régulièrement les réserves. Mais pourrait-il s’agir de la vie ? Les chercheurs ont exploré une série de processus naturels potentiels qui pourraient produire de la phosphine, notamment la lumière du soleil, la foudre, l’activité volcanique ou les minéraux qui remontent de la surface. Mais d’après leurs calculs, aucun d’entre eux ne peut expliquer la quantité de gaz détectée, il y avait 10 000 fois plus de phosphine que ce que l’on pourrait attendre de ces processus.
Vénus, vue par l’orbiteur Venus Express. (NASA)
D’autre part, l’équipe a estimé que des organismes pourraient produire ce volume de phosphine en “travaillant” à seulement 10 % de leur productivité prévue.
Aussi passionnante que soit cette découverte, elle est loin de confirmer l’existence d’extraterrestres.
Selon Danny Price, un scientifique australien du projet Breakthrough Listen qui n’a pas participé à l’étude :
C’est énorme : cela pourrait être la première détection de vie au-delà de la Terre. Si la vie peut naître dans les nuages hyperacides de Vénus, il se peut que la vie soit répandue dans toute la galaxie. Mais avant d’être trop excités, nous devons prendre une profonde respiration de cet air vénusien et exclure les voies moins excitantes par lesquelles la phosphine pourrait se faufiler.
Il pourrait y avoir des mécanismes complexes de réapprovisionnement en phosphine dans l’atmosphère de Vénus, que nous n’avons pas vu se produire ici sur Terre. Nous devons faire d’intenses observations de suivi pour fournir des preuves supplémentaires.
Et il ne fait aucun doute que ce genre d’enquêtes suivra. Espérons que nous aurons bientôt une réponse à cette vieille question.
L’étude publiée dans Nature Astronomy : Phosphine gas in the cloud decks of Venus, présentée sur le site du James Clerk Maxwell : JCMT finds hints of life on Venus et sur le site de l’ESO : Possible Marker of Life Spotted on Venus.