Les crabes ont suffisamment de mémoire pour se sortir d’un labyrinthe
La mémoire spatiale est une capacité cognitive importante chez de nombreux animaux. Souvent, les scientifiques incitent les souris à sortir de labyrinthes complexes afin d’étudier leur comportement et d’en apprendre davantage sur la façon dont le cerveau des mammifères gère l’orientation. En fait, ce type de recherche a valu à May-Britt Moser et Edvard Ingjald Moser le prix Nobel de physiologie en 2014 pour leurs découvertes sur les cellules qui permettent au cerveau de se positionner dans l’espace.
Cependant, on n’a pas accordé suffisamment d’attention à l’étude de la mémoire spatial chez les animaux non mammifères. Cherchant à combler cette lacune, Ed Pope et Ross Davies, tous deux de l’université de Swansea au Royaume-Uni, ont cherché à savoir si les crustacés pouvaient s’orienter dans un labyrinthe.
Image d’entête, tirée de l’étude : schéma du labyrinthe expérimental dans lequel les crabes de rivage devaient s’orienter. (Université de Swansea)
Ils ont testé 12 crabes de rivage sur une période de 4 semaines, qui ont dû atteindre une moule à la fin du labyrinthe. Pour atteindre leur but, les crabes devaient faire cinq changements de direction et éviter trois impasses.
Le Pr. Ed Pope et un ders crabes utilisé dans l’étude. (Université de Swansea)
A partir de l’étude, le plan de labyrinthe emprunté par les crabes pour l’expérience.
Selon Pope :
L’apprentissage spatial est très compliqué, alors comprendre comment il fonctionne chez les crustacés nous permet de mieux comprendre à quel point cette capacité, et l’apprentissage en général, est répandue dans le règne animal.
Après une formation initiale, les chercheurs ont remarqué que les crabes montraient des améliorations dans le temps qu’il leur fallait pour trouver la nourriture et qu’ils prenaient moins de mauvais détours. Lorsqu’ils ont été remis dans le labyrinthe deux semaines plus tard, cette fois sans nourriture à l’autre bout pour servir de récompense, les crabes l’ont quand même atteint en moins de 8 minutes.
De toute évidence, les crabes se souvenaient de leur parcours. Par exemple, les nouveaux crabes qui n’étaient pas du tout adaptés à leur environnement ont mis beaucoup plus de temps à atteindre la fin du labyrinthe et certains n’ont pas pu le terminer à la fin de la période d’étude d’une heure.
Selon M. Pope :
Cette étude est importante parce que nous savons que les insectes, surtout les fourmis et les abeilles, ont des capacités mentales impressionnantes, mais nous ne les avons pas vraiment recherchées chez leurs homologues aquatiques. Le fait que les crabes montrent une capacité similaire aux insectes n’est, à certains égards, pas surprenant, mais c’est formidable de pouvoir le montrer aussi clairement. Ce travail ouvre la porte à des expériences plus sophistiquées visant à déterminer comment les conditions océaniques changeantes pourraient affecter la capacité des crabes à apprendre et à s’adapter pour trouver de la nourriture à l’avenir.
Mary Gagen, spécialiste du changement climatique à l’université de Swansea et coauteure de la nouvelle étude, affirme que les résultats sont importants dans le contexte du changement climatique :
Nous savons que tant de choses changent dans nos océans à cause des changements climatiques causés par l’homme. Il est vraiment important d’acquérir une compréhension de base de la vie des animaux qui seront touchés par ces changements qui se produiront dans nos océans à l’avenir. Cela ne signifie pas seulement les grands animaux charismatiques, mais aussi des choses comme les crabes qui sont si importantes pour la chaîne alimentaire.
L’étude publiée dans Biology Letters : Maze learning and memory in a decapod crustacean et présentée sur le site de l’université de Swansea : New study reveals that crabs can solve and remember their way around a maze.