L’Univers s’étend beaucoup plus vite qu’il ne le devrait
Des physiciens ont publié la mesure la plus précise de l’expansion de l’univers. Les résultats inattendus suggèrent que le taux d’expansion est plus rapide que la prédiction basée sur la physique de l’univers à ses débuts. En fin de compte, cet écart signifie qu’il nous manque peut-être une pièce importante du grand puzzle sur le fonctionnement de l’univers.
Image d’entête : Cette image montre l’ensemble du Grand Nuage de Magellan, une galaxie satellite de la Voie lactée, avec certains des objets les plus lumineux marqués. La dernière évaluation de la vitesse de l’expansion de l’univers a utilisé 70 étoiles variables Céphéides de cette galaxie. (Robert Gendler/ ESO)
Les cosmologistes caractérisent l’expansion de l’univers dans une loi simple connue sous le nom de loi de Hubble-Lemaître, du nom d’Edwin Hubble, qui a d’abord observé que l’univers est en constante expansion après avoir étudié le décalage/ effet Doppler de nébuleuses en recul. La loi de Hubble est l’observation que les galaxies plus éloignées s’éloignent plus rapidement, ce qui signifie que les galaxies qui sont proches s’éloignent relativement lentement par comparaison. La relation entre la vitesse et la distance d’une galaxie est déterminée par la « constante de Hubble« , qui indique essentiellement le taux d’expansion de l’univers.
L’histoire de la mesure de la constante de Hubble a toujours été pleine de défis et de révélations inattendues. En 1929, Hubble pensait que la valeur devait être d’environ 550 395 kilomètres à l’heure par million d’années-lumière, environ 10 fois supérieure à ce que nous mesurons maintenant. Mais à chaque grand écart, la physique s’enrichissait. C’est grâce à des mesures plus précises de la constante de Hubble au fil des années que l’on a découvert par inadvertance l’énergie noire, un type mystérieux d’énergie que nous ne pouvons pas détecter directement mais qui, selon les physiciens, représente au moins 70% de l’énergie de l’univers.
De nos jours, les astronomes calculent la constante de Hubble à l’aide de ce qu’on appelle des « chandelles standard« , des objets stellaires qui donnent une certaine quantité connue de lumière, également appelées étoiles variables Céphéides. Une étude publiée l’an dernier, basée sur les données de variables Céphéides, suggère que le taux d’expansion est de 73,5 kilomètres par seconde par mégaparsec. Entre-temps, nous avons des mesures très précises du fond diffus cosmologique, la post-luminosité du Big Bang, de la mission Planck, qui a mesuré la constante de Hubble à environ 74 350 kilomètres à l’heure par million d’années-lumière ou 67,4 km/s/Mpc.
Les trois méthodes utilisées pour évaluer la vitesse de l’expansion de l’Univers :
Plus récemment, une équipe de chercheurs dirigée par Adam Riess, professeur de physique et d’astronomie à l’université Johns Hopkins de Baltimore (États-Unis) et lauréat du prix Nobel de physique en 2011, a trouvé un taux encore plus élevé pour la constante de Hubble. En utilisant une nouvelle méthode, l’équipe de recherche a étudié 70 variables Céphéides dans le Grand Nuage de Magellan, arrivant à une constante de Hubble de 74,03 ks/s/Mpc. C’est environ 9% plus rapide que la valeur « attendue » dérivée des données de Planck. Selon les astronomes, la probabilité que ces résultats soient quelque peu erronés est d’environ une sur 100 000.
Vue télescopique du Grand Nuage de Magellan, une galaxie satellite de notre Voie lactée. (NASA/ ESA/ Adam Riess/ Palomar Digitized Sky Survey)
La mesure des distances en astronomie combine des étoiles variables et des supernovae pour mesurer des distances précises dans l’univers. (NASA/ ESA/A. Feild (STScI))
Selon Riess :
Cette inadéquation ne cesse de s’aggraver et elle a maintenant atteint un point qu’il est vraiment impossible d’écarter comme étant un coup de chance. Ce n’est pas ce à quoi on s’attendait.
Il ne s’agit pas seulement de deux expériences en désaccord. Nous mesurons quelque chose de fondamentalement différent.
L’une est une mesure de la vitesse à laquelle l’univers s’étend aujourd’hui, telle que nous la voyons. L’autre est une prédiction basée sur la physique de l’univers primitif et sur des mesures de la vitesse à laquelle il devrait s’étendre. Si ces valeurs ne sont pas concordantes, il y a de fortes chances qu’il nous manque quelque chose dans le modèle cosmologique qui relie les deux époques.
Ces nouveaux résultats suggèrent que notre compréhension actuelle de la physique est inadéquate et qu’il nous manque quelque chose d’important. Une explication possible serait que l’accélération pourrait être due à une augmentation de la densité de l’énergie sombre. Une autre explication pourrait être que la matière noire interagit plus fortement avec la matière ordinaire qu’on ne le pensait auparavant. Une explication moins excitante pourrait être qu’il y a des » inconnues inconnues » dans les données causées par des effets systématiques et qu’une analyse plus attentive pourrait un jour révéler un effet subtil qui a été négligé.
L’étude publiée dans The Astrophysical Journal, en prépublication sur arXiv (PDF) : Large Magellanic Cloud Cepheid Standards Provide a 1% Foundation for the Determination of the Hubble Constant and Stronger Evidence for Physics Beyond LambdaCDM et présentée sur le site du Hubble : Mystery of the Universe’s Expansion Rate Widens with New Hubble Data.