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souriceaux

Les animaux nocturnes ont besoin de leur nez pour rester en vie. Les souris, entre autres, dépendent de leurs puissants pouvoirs olfactifs pour sentir/ trouver la nourriture ou éviter un danger dans l’obscurité.

Destinées instinctivement à fuir un prédateur ou à se battre contre un rival amoureux en réponse à une odeur d’urine, les souris utilisent un système simplifié qui envoie le repère sensoriel aux centres neuronaux dans le cerveau qui n’ont besoin que de quelques synapses pour lancer rapidement le comportement instinctif. Par comparaison, le système visuel sur lequel s’appuie les humains, pour détecter une menace, doit traiter bien plus de variables : détecter les bords, les couleurs et le contraste de ce tigre menaçant qu’ils voient, plutôt que de renifler l’odeur d’un gros chat, une senteur acre seulement pour les animaux, avant de prendre ses jambes à son coup (ce qui n’est pas forcément la meilleure solution).

Chez la souris, les comportements sociaux sont également entrainés par ces signaux chimiques, appelés phéromones. Les scientifiques ont observé des différences dans la façon dont les souris interagissent avec des souris adultes, juvéniles (souriceaux) ou nouveau-nées, mais ils n’ont pas repéré de signaux sensoriels qui permettent aux souris de déterminer l’âge de leur congénère.

En cherchant de nouvelles phéromones qui pourraient contrôler différents comportements instinctifs chez la souris, les chercheurs, dirigés par Stephen Liberles, professeur agrégé de biologie cellulaire à l’école de médecine d’Harvard, ont découvert une phéromone dans les larmes des jeunes souris. Leurs expériences ont montré que cette molécule, un peptide nommé ESP22 sécrété par une glande exocrine, protège les souris prépubères de l’activité des souris mâles adultes qui voudraient s’accoupler. La recherche publiée le 2 octobre (lien plus bas) fournit la première étape vers une compréhension détaillée de la façon dont un système sensoriel peut réguler le comportement social.

Selon Stephen Liberles :

En identifiant les phéromones spécifiques et les récepteurs qu’ils activent, vous avez une prise sur les circuits neuronaux qui contrôlent ces comportements instinctifs. L’idée est de créer une boîte à outils de différentes phéromones qui contrôlent des comportements différents. Ensuite, vous pouvez disséquer comment le système olfactif canalise de manière sélective ces entrées pour adopter des réponses comportementales appropriées.

Des chercheurs ont étudié le génome de souris pour identifier les gènes qui codent pour des phéromones et à quel moment ils étaient activés chez les souris mâles et femelles de différents âges et états physiologiques. Chez les souris adultes, des phéromones sexuelles produites par des mâles influencent le comportement sexuel chez les femelles adultes et l’agressivité chez les mâles, mais on en savait moins sur les phéromones des souriceaux.
Il a été déterminé, par l’expression des gènes, que l’Esp22 était présente dans les larmes des souriceaux, mais pas dans celles des nouveau-nés.

Pour mieux comprendre le cheminement de la réponse induite par cette molécule, les scientifiques ont suivi sa trace jusqu’aux neurones sensoriels dans l’organe voméro-nasal (OVN), une structure olfactive que les humains n’ont pas. Les scientifiques ont observé que, lorsque cet organe ne fonctionnait pas ou mal, les souris adultes mâles affichaient des comportements sexuels envers les jeunes souris.

Les scientifiques ont également observé des souris adultes présenter le même comportement envers les deux souches de souris juvéniles qui ne produisent pas l’ESP22. Mais quand l’ESP22 a été déposé sur ​​ces souris juvéniles, il y avait une réduction substantielle du comportement sexuel des mâles adultes, ce qui suggère que l’ESP22 est une phéromone de protection.

Une analyse plus poussée a montré que l’ESP22 active les neurones dans le système limbique, une zone du cerveau qui contrôle les comportements instinctifs : comportement sexuel, d’agression et d’autodéfense.

Mais il reste encore beaucoup de zones d’ombre. Les chercheurs aimeraient savoir quels sont ces neurones, comment elles se comparent à d’autres neurones dans le système limbique et comment elles pourraient servir de médiateur de réponses à d’autres types de phéromones et d’odeurs de prédateurs. Ils souhaiteraient aussi trouver le récepteur qui détecte ce signal.

Les souris sont des modèles importants pour la compréhension du comportement chez l’humain, mais il y a d’importantes différences. Nous n’avons pas de phéromone juvénile comme l’ESP22, ni d’organe voméro-nasal. Nous ne reconnaissons pas les odeurs de prédateurs comme une souris le ferait. Mais les humains présentent des comportements sexuels, de peur ou d’agressivité.

Selon Liberles :

De nombreux comportements sont similaires. Nous utilisons la souris comme modèle pour comprendre le comportement humain. Ce travail fournit un moyen d’étudier les mécanismes qui sous-tendent le comportement.

L’ESP22 et d’autres molécules que Liberles a trouvés sont des outils puissants pour comprendre comment des comportements innés sont produits dans le cerveau.

L’étude punliée dans Nature : A juvenile mouse pheromone inhibits sexual behaviour through the vomeronasal system.

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