Sélectionner une page

oeil-peur-distance

Cette araignée se dirigeant vers vous pourrait être plus loin qu’elle n’y parait. La peur peut fausser notre perception des objets qui s’approchent, nous obligeant à sous-estimer la distance d’un être menaçant, conclut une étude publiée cette semaine (lien plus bas).

Selon la psychologue de l’Université Emory (États-Unis), Stella Lourenco, co-auteur de l’étude :

Nos résultats montrent que l’émotion et la perception ne sont pas entièrement dissociables dans l’esprit. La peur peut même changer des aspects basiques sur la façon dont nous percevons le monde qui nous entoure. Ceci a des implications claires pour comprendre les phobies cliniques.

Lourenco a mené la recherche avec Matthew Longo, un psychologue à l’Université de Londres (Birkbeck College).

Nous avons généralement un sens bien développé pour estimer quand un objet se dirigeant vers nous va nous toucher, pour, en une fraction de seconde, l’esquiver ou le bloquer, si nécessaire. Les chercheurs ont mis en place une expérience pour tester l’effet de la peur sur l’exactitude de cette compétence.

Les participants à l’étude ont effectué des estimations du temps avant collision à partir d’images sur un écran d’ordinateur. Les images s’élargissaient en taille sur plus d’une seconde avant de disparaitre, pour simuler "l’imminence" (looming) : un motif optique utilisé pour juger instinctivement du temps de collision. Les participants à l’étude ont été invités à évaluer quand, chacun des stimuli visuels sur l’écran de l’ordinateur, les aurait heurtés en appuyant sur un bouton.

Les participants ont eu tendance à sous-estimer (sous-évaluer) le temps de collision pour des images d’objets menaçants, comme un serpent ou une araignée, par rapport aux images non menaçantes, comme un lapin ou un papillon.

Les résultats remettent en question la vision traditionnelle de l’approche (looming), comme un signal purement optique d’un objet qui se rapproche.

Selon Longo :

Nous montrons que le type d’objet affecte la façon dont nous percevons son approche. Si nous avons peur de quelque chose, nous le percevrons rentrer plus tôt en contact.

Encore plus frappant, il est possible de prédire le temps avant la collision d’un objet qui a été sous-estimé par le participant, en évaluant l’ampleur de la peur qu’ils ont pour cet objet.

Plus une personne avait signalé être effrayée par les araignées, par exemple, plus elle sous-estimait le temps avant collision pour une araignée qui surgit. C’est une adaptation des sens : si un objet est dangereux, il vaut mieux faire un écart d’une demi-seconde trop tôt, que d’une demi-seconde trop tard.

Les chercheurs notent qu’il est difficile de savoir si la crainte d’un objet nous donne l’impression que celui-ci se déplace plus vite, ou si cette peur amène le spectateur à développer leur sens de l’espace personnel, qui représente généralement une distance d’environ une longueur de bras.

Nous aimerions faire la distinction entre ces deux possibilités dans une future recherche. Cela nous permettra d’approfondir nos connaissances sur les mécanismes de base concernant les aspects de la perception spatiale et les mécanismes de phobies particulières.

L’étude publiée sur Current Biology : Threat modulates perception of looming visual stimuli.

Pin It on Pinterest

Share This