Les cellules immunitaires sont remplacées par des versions moins efficaces chez les adultes plus âgés
Des chercheurs qui étudient l’évolution de la vie de cellules immunitaires spécialisées appelées lymphocytes T cytotoxiques ont découvert qu’avec l’âge, ces cellules sont remplacées par des versions moins efficaces qui peinent à lutter contre les envahisseurs viraux. Cette découverte inédite permet de mieux comprendre l’immunité liée à l’âge et pourrait déboucher sur des vaccins et des thérapies mieux adaptés aux différents groupes d’âge.
Image d’entête : micrographie électronique à balayage coloré d’une cellule tueuse naturelle (lymphocytes cytotoxiques naturels) provenant d’un donneur humain. (National Institutes of Allergy and Infectious Diseases)
Les cellules T, également connues sous le nom de cellules T CD8 ou lymphocytes T cytotoxiques, possèdent des armes moléculaires particulières qui leur permettent d’attaquer et de détruire directement d’autres cellules infectées par un envahisseur extérieur tel qu’un virus. À ce titre, elles jouent un rôle essentiel dans le système immunitaire.
De nombreuses études ont été menées sur les actions des cellules T, mais on sait peu de choses sur leur évolution et leur fonctionnement au cours de la vie. Dans le cadre d’une étude dirigée par l’Institut Peter Doherty des maladies infectieuses et immunitaires (Institut Doherty à l’Université de Melbourne) et l’Université de Nouvelle-Galles du Sud à Sydney, des chercheurs ont examiné les différences entre les lymphocytes T chez des nouveau-nés, des enfants d’âge scolaire, des adultes et des adultes de 60 ans et plus, afin de comprendre comment l’âge affecte notre immunité contre les virus de la grippe.
Selon Carolien van de Sandt, auteur principal de l’étude (lien plus bas) :
Sur la base d’études antérieures, nous nous attendions à ce que les cellules T des personnes âgées soient moins efficaces parce qu’elles étaient épuisées ou « endormies ». Toutefois, à notre grande surprise, les très efficaces cellules T que nous avions détectées chez les enfants et les adultes semblaient en fait disparaître et être remplacées par des cellules sous-optimales chez les adultes plus âgés. C’est un peu comme si vous remplaciez l’épée d’un soldat romain par un couteau de cuisine ; ils peuvent apprendre à s’en servir, mais ils ne seront jamais aussi efficaces que l’épée.
Les chercheurs ont constaté que le nombre total de cellules T était le plus faible chez les nouveau-nés, qu’il augmentait chez les enfants et qu’il atteignait son maximum à l’âge adulte. Les cellules T spécifiques du virus de la grippe étaient les moins élevées chez les nouveau-nés et les enfants, atteignaient leur maximum chez les adultes et diminuaient chez les adultes plus âgés.
Les chercheurs ont analysé l’expression génétique des cellules classées par âge et ils ont constaté que les lymphocytes T spécifiques de la grippe chez les nouveau-nés et les enfants étaient génétiquement similaires à ceux observés chez les adultes plus âgés. Mais les marqueurs associés au maintien du contrôle immunitaire, aux cytokines anti-inflammatoires et au contrôle de la différenciation des cellules T étaient fortement exprimés dans les cellules T spécifiques de la grippe chez l’adulte, moins prononcés chez les enfants et les adultes plus âgés, et absents chez les nouveau-nés.
Toujours selon van de Sandt :
L’un des résultats les plus fascinants de l’étude est que ces cellules, moins aptes à reconnaître les virus de la grippe, présentaient des caractéristiques génétiques très proches des cellules T que l’on trouve chez les nouveau-nés.
Les chercheurs affirment que cette découverte inédite contribue grandement à mieux cerner l’évolution de l’immunité au cours de la vie et qu’elle pourrait faire progresser la mise au point de vaccins.
Selon Katherine Kedzierska, auteure correspondante de l’étude :
Nos résultats suggèrent que si nous voulons stimuler les cellules T par la vaccination, le moment choisi peut jouer un rôle essentiel pour les maintenir optimales jusqu’à un âge avancé. Cette étude marque un tournant dans la recherche sur l’immunité au cours du vieillissement. Elle a des implications considérables et ouvre de nouvelles possibilités pour le développement de meilleurs vaccins et de thérapies adaptées aux différents groupes d’âge.
L’étude publiée dans Nature Immunology : Newborn and child-like molecular signatures in older adults stem from TCR shifts across human lifespan et présentée sur le site de l’institut Doherty : Study finds immune cells in older adults resemble those in newborns and children, but fall short in virus detection.