“On est bientôt arrivé ?” : des astronomes déterminent la distance de 56 000 galaxies par rapport à la Terre
Il n’est pas facile de déterminer à quelle distance de la Terre se trouve une galaxie. Dans l’immensité de l’espace, il peut être difficile de dire si une galaxie est très éloignée, mais très grande, ou proche mais petite.
Image d’entête, à partir de l’étude : une carte du ciel montrant les 56 000 galaxies du projet Cosmicflows-4 avec les mesures de distance. Chaque point représente une galaxie, et la couleur du point indique sa distance par rapport à nous, avec des tons bleus à proximité et des tons vers les rouges pour les galaxies plus éloignées. (R. Brent Tully et col./ Astrophysics)
Toutefois, connaître la distance à laquelle se trouvent ces galaxies (ainsi que leur vitesse) peut contribuer à déterminer la taille de l’Univers et le temps qui s’est écoulé depuis sa naissance.
Une équipe de chercheurs a récemment compilé une énorme liste de distances entre galaxies, 55 877 pour être exact. Ces distances ont été mesurées à l’aide de huit méthodes différentes, allant de l’observation de minuscules changements de couleur aux fluctuations de luminosité, en passant par de minuscules modifications des propriétés cinématiques (mouvement).
Selon Brent Tully, astronome à l’Université d’Hawaii :
Depuis que les galaxies ont été identifiées comme distinctes de la Voie lactée il y a une centaine d’années, les astronomes ont essayé de mesurer leurs distances.
Maintenant, en combinant nos outils plus précis et plus nombreux, nous sommes capables de mesurer les distances des galaxies, ainsi que le taux d’expansion de l’Univers qui y est lié et le temps écoulé depuis la naissance de l’Univers avec une précision de quelques pour cents.
Toutes ces mesures ont pour but de comprendre un aspect particulier de l’Univers : la vitesse d’expansion de l’espace-temps. C’est ce qu’on appelle la constante de Hubble et elle n’est malheureusement pas aussi constante que les astronomes pourraient l’espérer.
Différentes méthodes de mesure de la vitesse d’expansion de l’Univers ont donné des résultats contradictoires.
Si l’on se base sur le rayonnement de fond laissé par les premiers jours de l’Univers, le fond diffus cosmologique (ci-dessous), on obtient une constante de Hubble de 67,5 km par seconde et par mégaparsec, avec une petite marge d’erreur de plus ou moins 1 km par seconde et par mégaparsec.
La carte ci-dessous présente la plus ancienne lumière dans notre univers, comme elle a été détectée avec la plus grande précision par la mission Planck. La lumière antique, appelée le fond diffus cosmologique, a été imprimée sur le ciel quand l’univers avait 370 000 ans. Elle montre les minuscules fluctuations de température qui correspondent aux régions aux densités légèrement différentes, représentant les graines de toute la future structure : les étoiles et les galaxies d’aujourd’hui. (ESA / Planck Collaboration)
Mais nous pouvons également mesurer la constante de Hubble en observant ce que l’on appelle des chandelles standard, c’est-à-dire des explosions en supernovæ dans des galaxies relativement proches. En utilisant ces chandelles standard, nous pouvons savoir à quelle distance elles se trouvent, et en combinant cela avec la vitesse à laquelle les galaxies s’éloignent de nous, nous pouvons également obtenir une constante de Hubble. Si l’on exclut cette méthode, on obtient environ 74 km par seconde et par mégaparsec.
Ce schéma illustre deux façons de mesurer la vitesse à laquelle l’univers est en expansion : la méthode de la « chandelle standard » , qui implique l’explosion d’étoiles dans les galaxies et la « règle standard « , qui implique des paires de galaxies. (NASA)
La différence entre les valeurs mesurées et prédites est beaucoup plus importante que ce à quoi on peut s’attendre compte tenu des incertitudes statistiques. Cette situation a créé une sorte de tension dans le domaine. Mais aujourd’hui, nous devrions peut-être dire qu’il y a une crise.
Soit il existe un problème fondamental dans notre compréhension de la physique du cosmos, soit il y a une erreur systématique cachée dans les mesures des distances entre galaxies.
Malheureusement, l’examen de la distance de ces 55 877 galaxies n’a pas beaucoup aidé à résoudre ce problème non plus. L’équipe de chercheurs a réussi à obtenir une valeur de 75 km pour la constante de Hubble, à 3 km près.
Mais malgré cela, le calcul de milliers de distances avec autant de méthodes est important. L’ensemble de ces données est appelé Cosmicflows-4 et constitue le plus grand catalogue de distances de galaxies de haute précision jamais réalisé.
L’utilisation de tant de méthodes différentes est également importante. De nombreuses études de ce type n’utilisent qu’une seule méthode, mais si l’équipe utilise autant d’options différentes, cela devrait réduire les erreurs importantes dues à l’inexactitude d’une des méthodes.
L’étude publiée dans la revue Astrophysics et disponible sur arXiv : Cosmicflows-4 et présentée sur le site de l’Université d’Hawaii : UH astronomers map distances to 56,000 galaxies, largest-ever catalog.