Une intelligence artificielle pour aider à contrôler le plasma de la fusion nucléaire
Au cours de décennies de développement, des scientifiques ont étudié la technologie de la fusion nucléaire par le biais d’expériences, de calculs et de simulations interminables, en essayant de trouver la combinaison optimale de conditions pour que les atomes fusionnent et libèrent continuellement d’énormes quantités d’énergie. La société DeepMind, détenue par Alphabet, a mis son savoir-faire en matière d’intelligence artificielle au service de cet objectif dans le cadre d’un nouveau partenariat avec le Swiss Plasma Center (SPC) de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL/ Suisse), où elle a déjà fait ses preuves.
Image d’entête : plasma à l’intérieur du tokamak au Swiss Plasma Center. ( DeepMind & SPC/ EPFL)
Ces dernières années, DeepMind a réalisé d’impressionnants progrès dans le domaine de l’intelligence artificielle, notamment en battant les meilleurs joueurs aux échecs, au go, au shogi, au jeu vidéo Quake III… en prédisant les précipitations avec une grande précision et même en résolvant un problème scientifique vieux de 50 ans en prédisant les structures 3D de protéines uniques.
En exploitant cette technologie pour la recherche sur la fusion nucléaire, les scientifiques espèrent trouver des moyens de maintenir plus efficacement les flux de plasma, ce qui permettrait de multiplier les possibilités de réactions de fusion critiques. Le type de dispositif utilisé pour ces expériences au SPC est connu sous le nom de tokamak. Il s’agit d’une chambre en forme de beignet qui utilise un puissant champ magnétique pour contenir des flux de plasma super chaud, dans lequel les atomes d’hydrogène fusionnent en un atome d’hélium et libèrent de l’énergie.
Modèle 3D de la chambre à vide du tokamak à configuration variable contenant le plasma, entourée de diverses bobines magnétiques pour maintenir le plasma en place et affecter sa forme. (DeepMind & SPC/ EPFL)
Le tokamak du SPC est connu sous le nom de tokamak à conditions variables (TCV), car il permet de réaliser des expériences en utilisant le plasma dans différents types de configurations. Les chercheurs expérimentent continuellement de nouvelles façons de contrôler le plasma, afin d’éviter qu’il ne s’écrase sur les parois de la cuve et ne s’effondre.
Selon Federico Felici, un scientifique du SPC :
Notre simulateur est basé sur plus de 20 ans de recherche et il est continuellement actualisé. Mais même ainsi, de longs calculs sont encore nécessaires pour déterminer la bonne valeur de chaque variable du système de contrôle. C’est là que notre projet de recherche conjoint avec DeepMind entre en jeu.
DeepMind a développé un nouvel algorithme d’IA qui a été entraîné sur le simulateur du SPC en lui faisant essayer de nombreuses stratégies de contrôle différentes. Au fil du temps, à mesure qu’il gagnait en expérience grâce aux simulations, l’algorithme était capable de calculer des stratégies de contrôle pour produire les configurations de plasma demandées. L’équipe a ensuite demandé à l’algorithme de travailler à l’envers, en identifiant les paramètres corrects pour générer une configuration de plasma spécifique.
Après l’entraînement, l’algorithme a été testé sur le vrai tokamak, où il a pu créer et contrôler un large éventail de formes de plasma, y compris des formes allongées et avancées telles que les configurations de « triangularité négative » et de « flocon de neige ». Une expérience consistait à maintenir simultanément deux plasmas distincts.
Différentes formes de plasma générées grâce à l’apprentissage par renforcement. (DeepMind & SPC/ EPFL)
Selon Martin Riedmiller, responsable de l’équipe de contrôle chez DeepMind :
La mission de notre équipe est de rechercher une nouvelle génération de systèmes d’IA, des dispositifs de contrôle en boucle fermée, capables d’apprendre dans des environnements dynamiques complexes en partant complètement de zéro. Le contrôle d’un plasma de fusion dans le monde réel offre des opportunités fantastiques, bien qu’extrêmement difficiles et complexes.
L’étude publiée dans Nature : Magnetic control of tokamak plasmas through deep reinforcement learning et présentée sur le site de l’École polytechnique fédérale de Lausanne : L’EPFL et DeepMind ont recours à l’IA pour contrôler les plasmas et du Massachusetts Institute of Technology : DeepMind’s AI can control superheated plasma inside a fusion reactor.