Des scientifiques ont fabriqué la plus petite antenne du monde à partir d’ADN
Des chimistes de l’Université de Montréal, au Canada, ont conçu une antenne à l’échelle nanométrique utilisant de l’ADN synthétique pour surveiller les changements structurels de protéines en temps réel. L’antenne reçoit de la lumière d’une couleur et, selon l’interaction avec la protéine qu’elle détecte, elle renvoie de la lumière d’une couleur différente, qui peut être détectée. Cette technologie pourrait s’avérer utile pour la découverte de médicaments et le développement de nouvelles nanotechnologies.
Image d’entête : illustration d’une nano-antenne fluorescente à ADN. (Caitlin Monney)
L’ADN contient toutes les instructions nécessaires au développement, à la survie et à la reproduction d’un organisme. Ce modèle de vie est également extrêmement polyvalent grâce à l’assemblage automatique des éléments constitutifs de l’ADN.
En utilisant de courts brins synthétiques d’ADN qui fonctionnent comme des briques de Lego emboîtées, les scientifiques peuvent fabriquer toutes sortes de nanostructures pour des applications très sophistiquées. Il s’agit notamment de dispositifs médicaux « intelligents » qui ciblent les médicaments de manière sélective sur les sites des maladies, de sondes d’imagerie programmables, de modèles permettant d’agencer avec précision les matériaux inorganiques dans la fabrication des circuits informatiques de la prochaine génération… etc.
S’inspirant de ces propriétés, les chercheurs canadiens dirigés par Alexis Vallée-Bélisle, professeur de chimie, ont conçu une nano-antenne fluorescente à base d’ADN qui peut caractériser la fonction des protéines.
Selon le professeur Vallée-Bélisle :
À l’instar d’une radio bidirectionnelle qui peut à la fois recevoir et émettre des ondes radio, la nano-antenne fluorescente reçoit la lumière dans une couleur, ou longueur d’onde, et, selon le mouvement de la protéine qu’elle détecte, elle renvoie la lumière dans une autre couleur, que nous pouvons détecter.
Le récepteur de la nano-antenne réagit chimiquement avec les molécules présentes à la surface des protéines cibles. L’antenne de 5 nanomètres de long produit un signal distinct lorsque la protéine remplit une certaine fonction biologique, qui peut être détectée sur la base de la lumière libérée par la structure de l’ADN.
Selon Harroun :
Par exemple, nous avons pu détecter, en temps réel et pour la première fois, la fonction de l’enzyme phosphatase alcaline avec une variété de molécules biologiques et de médicaments. Cette enzyme est impliquée dans de nombreuses maladies, notamment divers cancers et inflammations intestinales.
Ces nano-antennes peuvent facilement être modifiées afin d’optimiser leur fonction et leur taille pour toute une série de fonctions. Par exemple, il est possible d’attacher une molécule fluorescente à l’ADN synthétisé, puis de fixer l’ensemble à une enzyme, ce qui permet de sonder sa fonction biologique. En outre, ces machines basées sur l’ADN sont prêtes à être utilisées par pratiquement tous les laboratoires de recherche du monde. Vallée-Bélisle travaille actuellement à la création d’une start-up pour mettre ce produit sur le marché, il ajoute :
Ce qui nous enthousiasme le plus, c’est de réaliser que de nombreux laboratoires dans le monde, équipés d’un spectrofluoromètre classique, pourraient facilement utiliser ces nano-antennes pour étudier leur protéine favorite, par exemple pour identifier de nouveaux médicaments ou développer de nouvelles nanotechnologies.
L’étude publiée dans Nature Methods : Monitoring protein conformational changes using fluorescent nanoantennas et présentée sur le site de l’Université de Montréal : Chemists use DNA to build the world’s tiniest antenna.