Des éléments constitutifs de la vie ont été découverts dans des nuages de poussière formant des planètes
Un groupe d’astronomes de l’Université de Leeds (Royaume-Uni) a identifié de riches réservoirs de molécules indispensables à la vie autour de jeunes étoiles dans notre galaxie, ce qui, pensait-on auparavant, ne se produisait que dans de rares circonstances. Les résultats suggèrent qu’il pourrait y avoir jusqu’à 100 fois plus de ces molécules dans la Voie lactée qu’on ne le pensait auparavant.
Les chercheurs ont publié une série d’études (lien plus bas) dans lesquelles ils détaillent la découverte de ces molécules autour de disques de gaz et de particules de poussière, en orbite autour des étoiles. Ces disques se forment en même temps que les étoiles et peuvent éventuellement former des planètes (disques protoplanétaires). C’est ce qui s’est passé avec le disque proche du Soleil qui a formé les planètes du système solaire.
Selon Karin Öberg du Harvard-Smithsonian Center for Astrophysics (États-Unis), l’une des auteures :
Ces disques de formation de planètes regorgent de molécules organiques, dont certaines sont impliquées dans les origines de la vie ici sur Terre. C’est vraiment passionnant. Les produits chimiques présents dans chaque disque affecteront en fin de compte le type de planètes qui se forment et détermineront si ces planètes peuvent accueillir la vie.
Les chercheurs ont utilisé le radiotélescope Atacama Large Millimetre/submillimetre Array (ou ALMA) au Chili pour examiner la composition des cinq disques. Grâce à ses 60 antennes, ALMA peut détecter les plus faibles signaux émis par les molécules dans l’espace. Chaque molécule émet une lumière à une longueur d’onde différente que les scientifiques peuvent étudier.
Ils ont recherché certaines molécules organiques et les ont trouvées dans quatre des cinq disques, et en nombre beaucoup plus important que prévu. Ces molécules sont considérées comme essentielles à la vie sur Terre. On pense qu’elles ont atteint la planète par l’intermédiaire d’astéroïdes ou de comètes qui se sont écrasés sur la Terre il y a des milliards d’années.
La théorie selon laquelle les molécules voyagent dans des astéroïdes et des comètes a été réaffirmée ici, car elles se trouvaient dans la même région que celle qui produit les roches spatiales. Elles n’étaient pas réparties uniformément dans les disques, chacun contenant un mélange différent de molécules. Pour les chercheurs, cela montre que chaque planète est créée à partir d’un mélange différent d’ingrédients.
Selon John Ilee, de l’Université de Leeds, l’un des auteurs :
Pour la première fois, l’ALMA nous a permis de rechercher ces molécules dans les régions les plus internes de ces disques, à des échelles de taille similaires à celles de notre système solaire. Notre analyse montre que les molécules sont principalement situées dans ces régions internes, avec des abondances entre 10 et 100 fois supérieures à ce que les modèles avaient prévu.
Les chercheurs ont spécifiquement recherché trois molécules, le cyanoacétylène (HC3N), l’acétonitrile (CH3CN) et le cyclopropénylidène (c-C3H2), dans cinq disques protoplanétaires, appelés IM Lup, GM Aur, AS 209, HD 163296 et MWC 480. Les disques ont été découverts à une distance de 300 à 500 années-lumière de la Terre, et chacun d’entre eux présente des signes de formation de planètes en cours.
Les images du bas montrent la présence de chaque molécule dans les disques protoplanétaires. (J Ilee/ Université de Leeds)
Suite à cette remarquable découverte, les chercheurs veulent continuer à rechercher des molécules plus complexes dans les disques protoplanétaires. Ils attendent avec impatience le lancement du télescope James Webb, prévu pour l’instant le 18 décembre, car il permettra d’examiner les molécules de manière beaucoup plus détaillée qu’auparavant, ont-ils ajouté.
Toujours selon Ilee :
Si nous trouvons des molécules comme celles-ci en si grande abondance, notre compréhension actuelle de la chimie interstellaire suggère que des molécules encore plus complexes devraient également être observables. Si nous les détectons, alors nous serons encore plus proches de comprendre comment les ingrédients bruts de la vie peuvent être assemblés autour d’autres étoiles.
La série d’études publiée dans l’Astrophysical Journal Supplement Series et disponible en prépublication dans arXiv : Molecules with ALMA at Planet-forming Scales, présentée sur le site de l’Université de Leeds : How planets may be seeded with the chemicals necessary for life.