À quoi rêvent les pieuvres ?
Lorsqu’elles dorment, les pieuvres changent de couleur. Une étude, publiée dans iScience, montre que ces couleurs représentent leurs cycles de sommeil.
Image d’entête : une pieuvre durant un sommeil actif (paradoxal). (Sylvia L. S. Madeiros)
Il y a deux ans, un documentaire montrait une pieuvre nommée Heidi dans ce qui semblait être un état de rêve actif. Ses bras s’agitaient pendant qu’elle somnolait, et sa peau passait par toutes sortes de textures. Mais le plus spectaculaire, c’est que le céphalopode changeait de couleur, clignotant en vert et rouge.
Une équipe, dirigée par Sylvia Lima de Souza Medieros de l’Université fédérale de Rio Grande do Notre, au Brésil, a constaté que les couleurs changent au cours de deux grands états de sommeil alternatif : lors de la phase de sommeil paradoxal ou REM (Rapid Eye Movement) et en dehors de cette phase ou non-REM.
Auparavant, on pensait que seuls les mammifères et les oiseaux possédaient ces deux états de sommeil, mais il a récemment été démontré qu’ils étaient également présents chez un cousin de la pieuvre, la seiche.
Selon Sidarta Ribeiro, de l’Institut du cerveau de l’Université fédérale de Rio Grande do Norte (Brésil) :
Cela nous a amenés à nous demander si nous pouvions également constater l’existence de deux états de sommeil chez les pieuvres.
Les pieuvres ont le système nerveux le plus centralisé de tous les invertébrés et sont connues pour avoir une grande capacité d’apprentissage.
L’équipe a filmé quatre pieuvres Octopus insularis pendant qu’elles dormaient et elle a constaté qu’elles étaient bleu pâle pendant le sommeil « calme » non-REM, et que leur couleur « pulsait » de manière dynamique pendant le sommeil « actif » REM, tout en faisant bouger leurs yeux, leur corps et leurs ventouses.
Un résumé graphique de l’étude : l’alternance cyclique d’états de sommeil calme et actif chez les pieuvres. (Sylvia Lima de Souza Medeiros et Col./ iScience)
Les céphalopodes sont très différents de l’humain sur le plan de l’évolution, puisqu’ils ont divergé il y a environ 500 millions d’années. Il est donc possible que nous ayons tous deux évolué vers un modèle de sommeil similaire, explique Mederios. Cela signifie que les habitudes de sommeil présentent un avantage évolutif qui reste à établir. Cela pourrait même suggérer que les pieuvres rêvent aussi.
Selon Sylvia Lima de Souza Medieros qui a dirigé l’étude :
Si les pieuvres rêvent effectivement, il est peu probable qu’elles vivent des intrigues symboliques complexes comme nous le faisons. Le « sommeil actif » chez la pieuvre a une durée très courte, généralement de quelques secondes à une minute. Si, pendant cet état, il y a des rêves, ils devraient plutôt ressembler à de petits vidéoclips, voire à des gifs.
Il est pour l’instant très difficile de répondre à ce qui se passe dans leur tête.
Selon Ribeiro :
Il est tentant de spéculer que, tout comme chez les humains, le rêve chez la pieuvre peut aider à s’adapter aux défis environnementaux et favoriser l’apprentissage.
Les pieuvres font-elles des cauchemars ? Les rêves des pieuvres pourraient-ils être inscrits dans les motifs dynamiques de leur peau ? Pourrions-nous apprendre à lire leurs rêves en mesurant ces changements ?
L’étude publiée dans iScience : Cyclic alternation of quiet and active sleep states in the octopus.