Des algues pourraient être cultivées sur Mars pour entretenir une colonie humaine
Le Guru revient demain (19.02), peut-être même ce soir, pour faire notamment un point atterrissage de l’astromobile Perseverance sur Mars, une étape qui se déroulera ce soir à partir de 21h00. Le Live de la NASA disponible ici.
L‘envoi d’une mission autonome vers Mars progresse avec une nouvelle expérience de chercheurs allemands, qui ont découvert que les cyanobactéries peuvent se développer dans les conditions atmosphériques martiennes. C’est une grande nouvelle et cela signifie que les algues pourraient être cultivées pour créer de l’oxygène et du carburant pour d’autres formes de vie sur la planète rouge.
Image d’entête : une culture d’algues (cyanobactéries) en laboratoire. (Wikimedia)
Les agences spatiales telles que l’agence spatiale américaine NASA, l’Agence spatiale européenne (ESA) et les russes de Roscosmos ont pour objectif de retourner sur la Lune d’ici 2024 et d’y établir une présence durable d’ici 2028. Ceci est également considéré comme un palier important dans un programme plus vaste menant à des missions avec équipage vers Mars, provisoirement prévues pour 2030. Des entreprises privées telles que SpaceX souhaitent également se poser sur la planète rouge, mais envisagent une date encore plus rapprochée si tout se passe comme prévu.
Bien que les plannings soient susceptibles d’être révisés, les missions avec équipage vers Mars pourraient bien avoir lieu dans les prochaines décennies. Parmi les défis cruciaux de ces missions figure la nécessité de fournir aux équipages des consommables de survie. La première mission peut être envoyée depuis la Terre, mais au final, les coûts et les risques associés au transport de matériel de la Terre vers Mars signifient que nous devrons également produire certains éléments sur place, c’est-à-dire sur Mars.
C’est là que les sciences de la vie pourraient nous aider. Des systèmes biologiques pour la production et le recyclage de ressources essentielles ont été proposés pour des vols spatiaux et des avant-postes/ stations planétaires, dont certains comprennent des cyanobactéries. Les algues seraient alimentées avec des matières sur place, comme des eaux souterraines, et en retour, elles produiraient des consommables comme de l’oxygène et des protéines alimentaires, ce qui favoriserait également la croissance d’autres organismes.
Selon Cyprien Verseux, du Centre de technologie spatiale appliquée et de microgravité de l’Université de Brême (Allemagne) et auteur principal de la nouvelle étude (lien plus bas) :
Nous montrons ici que les cyanobactéries peuvent utiliser les gaz disponibles dans l’atmosphère martienne, à une faible pression globale, comme source de carbone et d’azote. Dans ces conditions, les cyanobactéries ont conservé leur capacité à se développer dans une eau ne contenant que de la poussière de type martien et pourraient encore être utilisées pour nourrir d’autres microbes.
Cyprien Verseux travaillant sur l’Atmos. (Université de Brême)
Les arbres ont tout le mérite, mais les cyanobactéries sont en grande partie responsables de l’atmosphère respirable de la Terre. Toutes ses espèces produisent de l’oxygène comme sous-produit photosynthétique, et elles en sont une source inestimable. Pourtant, il a été difficile de reproduire ce phénomène sur Mars, car sa pression atmosphérique ne représente que 1 % de celle de la Terre. C’est trop faible pour la présence d’eau liquide. On a alors suggéré de recréer les conditions de l’atmosphère terrestre sur Mars, mais cela reste difficile en raison de la pression.
Un groupe de chercheurs allemands a maintenant trouvé une solution. Ils ont créé un bioréacteur, nommé Atmos (Atmosphere Tester for Mars-bound Organic Systems) avec une pression atmosphérique d’environ 10% de celle de la Terre, mais en utilisant uniquement ce que l’on peut trouver sur Mars. Il comprend de l’azote, du CO2, de l’eau obtenue à partir de la glace fondue et un “stimulant de régolite”, un mélange de minéraux. En d’autres termes, il pourrait être construit sur Mars avec une relative facilité et favoriser la croissance des cyanobactéries.
A : Bioréacteur Atmos (« Atmosphere Tester for Mars-bound Organic Systems« ). B : Un seul réacteur reproduisant les conditions atmosphérique martienne dans l’ATMOS. C : Schéma de conception. (C. Verseux / ZARM)
L’équipe a testé le réacteur avec une espèce spécifique de cyanobactéries fixatrices d’azote qui est susceptible de se développer dans ces conditions. Les résultats ont été très optimistes, les algues se développant assez bien dans toutes les conditions testées. Les chercheurs ont également découvert qu’elles peuvent fournir des nutriments pour alimenter d’autres cultures, qui peuvent ensuite être utilisées à d’autres fins, comme la production de médicaments.
Il reste encore beaucoup de travail à faire avant de sortir cette idée du laboratoire. Le bioréacteur a été conçu pour tester si les algues pouvaient se développer dans certaines conditions atmosphériques et non pour maximiser leur efficacité. De plus, les paramètres du bioréacteur dépendront de nombreux facteurs de la mission sur Mars, notamment la charge utile et l’architecture de la mission.
Toujours selon Verseux :
Notre bioréacteur, Atmos, n’est pas le système de culture que nous utiliserions sur Mars : il est destiné à tester, sur Terre, les conditions que nous y offririons. Mais nos résultats aideront à guider la conception d’un système de culture martien… Nous voulons passer de cette preuve de concept à un système qui peut être utilisé sur Mars de manière efficace.
L’étude publiée dans Frontiers : A Low-Pressure, N2/CO2 Atmosphere Is Suitable for Cyanobacterium-Based Life-Support Systems on Mars et présentée sur le site de l’Université de Brême : Staying long-term.