Une protéine de synthèse permet à des souris paralysées de marcher à nouveau
Dans une nouvelle étude, des scientifiques allemands ont restauré la capacité à marcher chez des souris paralysées après une lésion complète de la moelle épinière. L’équipe a créé une protéine de signalisation « de conception (humaine) » et l’a injectée dans le cerveau des animaux, stimulant leurs cellules nerveuses à se régénérer et à partager la recette pour fabriquer la protéine.
Image d’entête : des souris auparavant paralysées (en haut) ont retrouvé leur aptitude à marcher deux à trois semaines après le traitement. (
Lehrstuhl für Zellphysiologie)
Les lésions de la moelle épinière sont parmi les plus invalidantes. Les fibres nerveuses endommagées (axones) peuvent ne plus être capables de transmettre les signaux entre le cerveau et les muscles, ce qui entraîne souvent une paralysie des membres inférieurs. Pire encore, ces axones ne peuvent pas se régénérer.
De précédentes études ont montré qu’il était possible de restaurer certaines fonctions des membres grâce à une thérapie par stimulation de la colonne vertébrale ou en contournant complètement le site de la blessure. D’autres recherches prometteuses dans des domaines similaires ont consisté à utiliser des composés qui rétablissent l’équilibre des signaux inhibiteurs/ excitateurs dans les neurones de souris partiellement paralysées, et à transplanter des cellules régénératrices des nerfs du nez dans la colonne vertébrale de chiens blessés.
La moelle épinière. (Université du Queensland)
Mais dans cette nouvelle étude, des chercheurs de l’Université de la Ruhr à Bochum (RUB) en Allemagne ont pris une voie différente, visant à réparer les axones endommagés avec une protéine qu’ils appellent hyper-interleukine-6 (hIL-6). Comme son nom l’indique, il s’agit d’une version synthétique d’un peptide naturel, qui a été modifié pour stimuler la régénération des cellules nerveuses.
Il s’agit d’une cytokine dite « de synthèse », ce qui signifie qu’elle n’existe pas sous cette forme dans la nature et qu’elle doit être produite par le biais du génie génétique », explique Dietmar Fischer, un des auteurs de l’étude.
Dans le cadre de l’étude, l’équipe a testé l’hIL-6 sur des souris qui avaient subi un écrasement complet de la moelle épinière, entraînant une perte de fonction dans les deux pattes arrière. Ils ont conditionné les instructions génétiques pour produire de l’hIL-6 dans un vecteur viral commun, et les ont injectées dans le cortex sensorimoteur des souris.
Non seulement les motoneurones situés près du site d’injection ont commencé à produire eux-mêmes la hIL-6, mais ils l’ont transmise par les branches latérales axonales à d’autres neurones responsables d’actions comme la marche. Et bien sûr, en quelques semaines, les souris ont retrouvé les fonctions de leurs pattes arrière, même après une seule injection.
Selon Fischer :
Ainsi, le traitement par thérapie génique de quelques cellules nerveuses seulement a stimulé simultanément la régénération axonale de diverses cellules nerveuses du cerveau et de plusieurs voies motrices de la moelle épinière. En fin de compte, cela a permis aux animaux précédemment paralysés qui ont reçu ce traitement de commencer à marcher après deux à trois semaines. Cela nous a beaucoup surpris au début, car cela n’avait jamais été possible auparavant après une paraplégie complète.
Aussi incroyables que les résultats puissent paraître, il est évident que la recherche n’en est qu’à ses débuts. L’équipe indique que les prochaines étapes consistent à étudier chez la souris si des résultats similaires peuvent être obtenus si le traitement est administré quelques semaines après la blessure, plutôt que juste après. Il faut espérer qu’à long terme, les résultats pourront être appliqués à l’humain, mais ce ne sera pas avant de nombreuses années, voire jamais.
L’étude publiée dans Nature Communications : Transneuronal delivery of hyper-interleukin-6 enables functional recovery after severe spinal cord injury in mice et présentée sur le site de la Ruhr-Universität Bochum : Designer cytokine makes paralyzed mice walk again.