Les gènes des loups sinistres montrent qu’ils ne sont en fait pas des loups
Les loups sinistres (Canis dirus) ont dominé la vie écologique de l’Amérique du Pléistocène. Les scientifiques en savent encore très peu sur ce grand carnivore disparu, mais une nouvelle étude vient combler certaines lacunes. Cette étude, qui a séquencé cinq génomes à partir d’échantillons datant de 13 000 à plus de 50 000 ans, a révélé que les loups sinistres étaient très différents des loups gris (Canis lupus) actuels, malgré leur apparence similaire.
Image d’entête : deux loups gris (en bas à gauche) affrontent une meute de loups sinistres pour une carcasse de bison dans le sud-ouest de l’Amérique du Nord, il y a 15 000 ans. (Mauricio Anton)
Les loups sinistres ont été découverts pour la première fois dans les années 1850. Leurs abondantes dépouilles, qui se comptent par milliers, ont été dispersées sur les deux continents américains, du Canada à la Bolivie. C’étaient des prédateurs très efficaces qui pouvaient mesurer jusqu’à deux mètres de long et dont les adaptations de leur squelette les rendaient aptes à abattre l’énorme mégafaune qui parcourait les terres avant la dernière période glaciaire.
En raison de leur morphologie, les scientifiques ont toujours présumé que les loups sinistres et les loups modernes devaient être étroitement liés. Mais une nouvelle étude publiée cette semaine (lien plus bas) semble nous rappeler que des squelettes similaires et d’autres caractéristiques morphologiques ne reflètent pas nécessairement une parenté.
Un squelette de loup gris (à gauche) comparé à un squelette de loup sinistre. (Wikimédia)
L’équipe de chercheurs, à laquelle ont participé des scientifiques de l’université de Durham aux États-Unis et de l’université d’Adélaïde en Australie, a séquencé l’ADN de cinq os de loups sinistres. Les scientifiques se sont lancés dans cette étude pour en savoir plus sur la biologie des loups, mais ils ont été surpris de découvrir, grâce au séquençage du génome, que ces créatures éteintes ont partagé un ancêtre commun avec des chiens vivants ressemblant à des loups il y a environ 5,7 millions d’années. Les loups sinistres ont en fait divergé des chacals africains il y a environ 5,1 millions d’années.
La forte ressemblance, aussi étrange que cela puisse paraître, est donc simplement fortuite, un bel exemple d’évolution convergente, où deux espèces non apparentées développent des adaptations similaires. Dans ce cas, une apparence similaire, probablement en raison d’habitats et de niches écologiques similaires.
Et malgré la fréquence des hybridations entre les membres des Canidés, les loups sinistres et les ancêtres des loups et des coyotes modernes ne se sont jamais croisés, ce qui doit signifier qu’ils vivaient isolés géographiquement les uns des autres. Pourtant, une seule des deux lignées a survécu, et ce manque de brassage a peut-être contribué à leur disparition.
Il est possible que l’ancêtre des loups gris et des coyotes ait eu des variantes de gènes plus avantageuses dans l’environnement changeant qui empêcha les loups de s’adapter aux extinctions de la mégafaune du Pléistocène supérieur.
L’étude publiée dans Nature : Dire wolves were the last of an ancient New World canid lineage et présentée sur le site de l’université de Durham : Ancient DNA reveals secrets of Game of Thrones wolves.