La pollution par le plastique pourrait grimper en flèche pour atteindre 1,3 milliard de tonnes d’ici 2040
Avec une production qui continue d’augmenter à un rythme exponentiel, notre problème de pollution par le plastique ne montre aucun signe d’accalmie. Une nouvelle étude cartographiant le mouvement des déchets plastiques a montré à quel point la situation pourrait devenir dramatique, prévoyant que 1,3 milliard de tonnes de plastique seront rejetées sur terre et dans les océans d’ici 2040, à moins que des mesures significatives ne soient prises pour contrer cette tendance.
Nous produisons environ 300 millions de tonnes de plastique par an dans le monde, dont seulement 10 % environ sont recyclés, pour être utilisés dans des produits aussi divers que les brosses à dents ou les sacs à provisions. Des millions de tonnes sont rejetées dans les océans et se décomposent en petits fragments difficiles à suivre, tandis qu’une grande partie se retrouve dans les décharges ou devient tout simplement des déchets.
Certains experts s’attendent à ce que notre production de plastique double tous les 11 ans, et il s’ensuit qu’une plus grande quantité de ce matériau exercera une pression toujours plus grande sur l’environnement. Une équipe composée de 17 experts mondiaux et dirigée par Costas Velis, de l’université de Leeds (Royaume-Uni), a créé un modèle informatique de ce qui se passe lorsque tous ces déchets plastiques sont mal gérés.
Il s’agissait de cartographier les effets de six scénarios dans lesquels nous intervenons de différentes manières, notamment en réduisant la quantité de plastique produite, en utilisant des matériaux de substitution, en augmentant la capacité de recyclage et en renforçant les systèmes de collecte du plastique. Ces scénarios ont été comparés à un modèle de « statu quo » ou de “poursuite des activités” (business as usual) comme base de référence.
Selon l’analyse, le monde verra 1,3 milliard de tonnes de plastique déversées sur terre et dans les océans entre 2016 et 2040, selon le scénario de « poursuite des activités”. Même avec ce que les chercheurs décrivent comme des efforts immédiats et concertés, ce chiffre ne serait réduit qu’à 710 millions de tonnes de déchets plastiques.
Le devenir du plastique dans un scénario de changement de système : Il existe une voie crédible pour réduire de manière significative le déversement des plastiques dans l’océan, mais seulement si toutes les solutions sont mises en œuvre simultanément, de manière ambitieuse et en commençant immédiatement. (Winnie Lau et Col./ The Pew Charitable Trusts/ SYSTEMIQ)
Selon Velis :
Si le monde n’agit pas, nous estimons que plus de 1,3 milliard de tonnes de pollution plastique se retrouvera sur terre ou dans les plans d’eau d’ici 2040. Aussi énorme que soit ce chiffre, il pourrait être encore plus important si ce n’était du fait qu’une grande quantité de déchets est brûlée à ciel ouvert, mais que cette combustion a également un coût environnemental important.
Ce coût environnemental se présente sous la forme de fumées toxiques provenant de plastiques brûlés à ciel ouvert, par opposition à ceux brûlés dans des installations.
Selon l’auteur de l’étude, Ed Cook, de l’université de Leeds :
Les incinérateurs modernes équipés de technologies de contrôle de la pollution atmosphérique émettent très peu de substances dangereuses. Mais avec la combustion à ciel ouvert, celle-ci est souvent incomplète, et toutes sortes d’émissions potentiellement toxiques sont libérées, ce qui peut entraîner une série de conséquences négatives pour la santé. Ces substances toxiques sont inhalées par les personnes qui travaillent avec les déchets ainsi que par les communautés qui vivent à proximité. Le brûlage est une arme à double tranchant. Il réduit la quantité de plastique qui pourrait éventuellement se retrouver dans les mers et sur terre, mais il pose également de nombreux autres problèmes environnementaux, notamment une contribution importante au réchauffement climatique.
Les scientifiques exposent un certain nombre de stratégies par lesquelles l’humanité peut s’attaquer à ce problème, à commencer par l’amélioration des services de collecte des déchets. Avec environ deux milliards de personnes dans le monde qui n’ont pas accès à de tels services, un chiffre qui devrait atteindre quatre milliards de personnes d’ici 2040, leur donner un moyen adéquat de se débarrasser de leurs plastiques pourrait mettre un coup de frein énorme au problème.
Selon Velis :
En l’absence de services de collecte, les gens doivent faire des choix difficiles sur la façon de gérer eux-mêmes les déchets en les brûlant ouvertement, en les déversant sur la terre ferme ou en les déversant directement dans les rivières et les eaux côtières. Notre modélisation montre que chaque tonne supplémentaire de plastique collectée réduit la pollution de l’environnement aquatique de 0,18 tonne. La collecte des déchets est en effet le moyen le plus efficace de prévenir la pollution. Ainsi, au cœur de toute solution efficace devrait se trouver la mise à disposition de services et d’infrastructures de gestion des déchets solides pour tous, une cible clé de l’objectif 11 des Nations unies pour le développement durable.
Parmi les autres mesures proposées par l’équipe, citons la prise en compte de la croissance de la production et de la consommation de plastique, le remplacement du plastique par le papier et les matériaux compostables, et une plus grande importance accordée au recyclage dès la conception des produits et des emballages.
L’équipe à l’origine de cette nouvelle étude propose un certain nombre de changements au niveau du système qui pourraient réduire notre problème de pollution par le plastique. (The Pew Charitable Trusts/ SYSTEMIQ)
Selon Cook :
Les interventions explorées ici sont toutes réalisables en utilisant des technologies existantes et déjà éprouvées. L’ensemble des approches que nous avons proposées est déjà à notre portée, mais il faut une volonté politique, sociétale et corporative pour y parvenir. Il n’existe pas de solution unique. Nous ne pouvons pas simplement dire que nous allons tout recycler ou utiliser moins de matériaux, nous devons adopter une approche holistique et examiner l’ensemble du système.
L’étude publiée dans Science : Evaluating scenarios toward zero plastic pollution et présentée sur le site de l’université de Leeds : ‘Act now’ to reduce global plastic pollution, say experts et sur le site du Pew Charitable Trusts : Breaking the Plastic Wave: Top Findings for Preventing Plastic Pollution.