Une moisissure révèle les filaments sombres de la toile cosmique
Des chercheurs ont fait preuve de créativité en essayant de reconstituer l’insaisissable toile cosmique, l’épine dorsale à grande échelle du cosmos.
Ils se sont tournés vers une moisissure/ champignon gluant (myxomycètes), le Physarum polycephalum surnommé “le Blob”, un organisme unicellulaire présent sur Terre, pour aider les astronomes à dresser une carte des filaments de l’univers local (dans un rayon de 500 millions d’années-lumière de la Terre) et à trouver le gaz qui s’y trouve.
La moisissure/ myxomycètes Physarum polycephalum développe un réseau de canaux interconnectés alors qu’elle explore l’environnement pour se nourrir. (Frankenstoen)
Inspirés par le comportement de cet organisme, ils ont conçu un algorithme informatique et l’ont appliqué aux données contenant les positions de 37 000 galaxies (la « nourriture » pour la moisissure) cartographiées par le relevé astronomique du programme Sloan Digital Sky Survey. L’algorithme a produit une carte tridimensionnelle du réseau de filaments galactique complexe de la toile cosmique sous-jacente, la structure violette dans l’image d’entête.
Toujours dans l’image d’entête, les trois séries d’encadrés montrent quelques-unes des galaxies individuelles qui ont été « nourries » par la moisissure et la structure filamenteuse qui les relie. Les galaxies sont représentées par les points jaunes dans trois des encarts. À côté de chaque cliché de galaxie se trouve une image des galaxies avec les brins de connexion du réseau cosmique (en violet) superposés.
La toile cosmique est principalement constituée d’une substance mystérieuse appelée matière noire et elle est également recouverte de gaz de faible densité.
Modèle simulé de la distribution extrapolée des galaxies à travers l’Univers, issue de la Millennium Simulation.
La matière noire est invisible, mais elle constitue la majeure partie de la matière de l’univers. La toile constitue l’échafaudage cosmique sur lequel les galaxies sont construites, et le gaz à l’intérieur de la toile fournit le combustible à partir duquel les galaxies forment de nouvelles étoiles.
L’équipe de recherche a constaté une similitude frappante entre la façon dont la moisissure construit des filaments complexes pour capturer de nouveaux aliments, et la façon dont la gravité, en façonnant l’univers, construit les brins de la toile cosmique entre les galaxies et les amas de galaxies.
Après avoir utilisé leur algorithme pour trouver les filaments de la toile cosmique, les astronomes ont utilisé les observations du télescope spatial Hubble pour détecter et étudier le gaz qui traverse la toile.
Faut-il s’étonner que quelque chose d’aussi basique et humble que l’instinct de cette moisissure puisse nous orienter vers des structures cosmiques qui ont par ailleurs échappé à la découverte scientifique ? Oui et non, pour les chercheurs.
Selon Burchett :
C’est un peu une coïncidence que cela fonctionne, mais pas entièrement.
Une moisissure visqueuse crée un réseau de transport optimisé, en trouvant les voies les plus efficaces pour relier les sources de nourriture. Dans la toile cosmique, la croissance de la structure produit des réseaux qui sont également, dans un sens, optimaux. Les processus sous-jacents sont différents, mais ils produisent des structures mathématiques qui sont analogues.
En tout cas, les résultats pourraient nous fournir une toute nouvelle façon de comprendre les structures du réseau cosmique, et ce en grande partie grâce à l’existence de la moisissure.
Toujours selon Burchett :
Pour la première fois maintenant, nous pouvons quantifier la densité du milieu intergalactique, depuis les périphéries éloignées des filaments du réseau cosmique jusqu’aux intérieurs chauds et denses des amas de galaxies.
Ces résultats confirment non seulement la structure du réseau cosmique prédite par les modèles cosmologiques, mais ils nous donnent également un moyen d’améliorer notre compréhension de l’évolution des galaxies en la reliant aux réservoirs de gaz à partir desquels se forment les galaxies.
L’étude publiée dans The Astrophysical Journal Letters : Revealing the Dark Threads of the Cosmic Web et présentée sur le site de l’université de Santa Cruz : Astronomers use slime mold model to reveal dark threads of the cosmic web.