Le seul primate venimeux au monde pourrait expliquer pourquoi les humains sont allergiques aux chats
Pour les personnes souffrant d’une allergie aux chats, tout endroit abritant un félin de compagnie peut devenir une zone toxique. Les recherches sur un autre mammifère tout aussi terriblement mignon suggèrent maintenant que ce n’est peut-être pas une erreur de la nature, les chats essaient vraiment de nous tenir à l’écart…
Une étude sur le seul exemple connu au monde de primate venimeux a révélé une similitude surprenante entre une protéine clé de ses glandes situées sous ses aisselles et l’allergène présent chez les chats, ce qui laisse penser que si l’un a évolué en tant qu’arme défensive, l’autre pourrait en avoir fait autant.
C’est une découverte qui non seulement place les allergies aux chats dans un nouveau contexte, mais qui pourrait conduire à des traitements pour ceux qui souffrent des effets d’une rencontre désagréable avec l’un ou l’autre animal.
Les loris lents (Nycticebus coucang) appartiennent à une espèce de primate que l’on trouve couramment dans les régions sauvages d’Asie du Sud et du Sud-Est. Ne vous laissez pas tromper par son apparence, dans la bouche du loris se trouvent des rangées de dents minuscules et acérées comme des rasoirs, qui servent à la fois à déchiqueter les petites proies et à tenir les prédateurs et les rivaux à distance.
Loris lents (Nycticebus coucang). (Wikimédia)
Comme si une morsure ne suffisait pas, lorsqu’ils sont menacés, ces monstres en peluche lèvent les pattes et lèchent les glandes qui se trouvent sous leurs aisselles, en rajoutant à leur salive un riche éventail de composés pour aider à transformer une minuscule coupure en un trou de chair morte en décomposition.
Selon le biologiste Bryan Fry de l’université du Queensland en Australie :
En général, les loris lents utilisent leur venin pour se battre avec d’autres loris, ce qui provoque des blessures très lentes à cicatriser.
Mais, lorsque les humains sont mordus, la victime présente des symptômes comme si elle était en état de choc allergique.
Ces symptômes peuvent inclure des difficultés respiratoires, du sang dans les urines, des douleurs extrêmes et, dans le pire des cas, un choc anaphylactique.
Les sécrétions responsables des effets toxiques de la morsure de l’animal sont connues pour inclure plus de 200 composés aromatiques, dont beaucoup ont déjà été caractérisés. Mais parmi eux, il y a un tas de protéines qui demeurent un mystère, et ce sont ces composés chimiques que Fry et son équipe ont séquencés pour en savoir plus sur leurs origines et leur toxicité.
Étonnamment, ces protéines n’étaient pas entièrement nouvelles pour la science. En fait, beaucoup d’entre nous les connaissent déjà douloureusement.
Selon Fry :
Nous avons analysé la séquence d’ADN de la protéine dans du venin de loris lent, découvrant qu’elle est pratiquement identique à la protéine allergène des chats.
Les chats sécrètent cette protéine et s’en enduisent, et c’est à cela que vous réagissez si vous y êtes allergique.
Selon l’endroit où vous vivez dans le monde, entre 1 personne sur 10 et 1 sur 4 doit faire face à des reniflements, des démangeaisons oculaires ou à un gonflement des voies respiratoires potentiellement mortel, dû à l’inhalation des protéines allergènes contenues dans la salive des chats. Ces statistiques ne sont pas insignifiantes, ce qui suggère qu’il pourrait y avoir quelque chose de moins qu’aléatoire dans la façon dont ces protéines ont évolué chez les chats et les loris lents pour repousser les menaces potentielles.
Toujours selon Fry :
L’allergie humaine aux chats est si répandue que ce serait une coïncidence remarquable s’il ne s’agissait pas d’une arme défensive évoluée, comme la même protéine utilisée par les loris lents.
Votre chat de compagnie ne le saurait pas, mais il peut avoir développé une défense toxique pour éloigner le plus possible les prédateurs.
A partir de l’étude : Comparaison, par modélisation moléculaire, de l’allergène Fel d1 des phanères du chat (Felis catus) (en haut, A-C) et de la protéine de sécrétion de la glande brachiale du loris lent (Nycticebus javanicus) (en bas, D-F). A et D montrent la surface électrostatique des deux protéines. (Holger Scheib et Coll./ Toxins)
Le lien est assez hypothétique et nécessite une étude plus approfondie. En tout cas, la découverte a des implications importantes pour la cartographie des processus immunologiques qui empêchent les morsures de loris lents de guérir, ce qui pourrait conduire à de meilleurs traitements contre les allergies ou même à de nouveaux médicaments.
Malheureusement, les adorables petits visages d’Ewok de ces primates en ont fait des marchandises attrayantes pour les marchés asiatiques des animaux de compagnie, où leur morsure est traitée en leur arrachant les dents sans ménagement.
Aussi tragiquement populaires qu’ils aient été dans le commerce des animaux exotiques, les chercheurs n’ont pas été aussi prompts à étudier les capacités uniques des animaux, ce qui rend ces derniers résultats d’autant plus fascinants.
Les loris lents sont les seuls primates connus à posséder du venin et ils n’ont pratiquement pas été étudiés. Les animaux que l’équipe a étudiés ont été amenés au Centre de sauvetage de la faune sauvage du Cikananga en Indonésie, profitant ainsi d’une triste situation.
L’étude publiée dans Toxins : The Toxicological Intersection between Allergen and Toxin: A Structural Comparison of the Cat Dander Allergenic Protein Fel d1 and the Slow Loris Brachial Gland Secretion Protein et présentée sur le site l’université du Queensland : Primate venom sheds light on why so many people suffer cat allergies.
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