Les informations les plus complètes à ce jour sur les caractéristiques cliniques du nouveau coronavirus
Trois études fournissent un peu plus de détail sur les symptômes, les personnes les plus affectées et l’origine du coronavirus 2019-nCoV.
Avant d’entamer les hostilitées il est à noter que, après plus d’une semaine de réunions, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, sur les conseils de son comité d’urgence, a déclaré hier soir (30 janvier) que l’épidémie de coronavirus en cours était une urgence de santé publique de portée internationale (PHEIC pour Public Health Emergency of International Concern). C’est la sixième fois qu’une PHEIC est déclarée depuis que cette désignation a été mise au point il y a 15 ans.
I – Une étude récemment publiée offre les informations les plus complètes à ce jour sur les caractéristiques cliniques du nouveau coronavirus. L’étude a examiné 99 des premiers cas détectés, décrivant les symptômes les plus courants et les types de patients les plus susceptibles de contracter le virus.
Suite à une vague de cas inexpliqués de pneumonie virale dans la ville chinoise de Wuhan en décembre 2019, un nouveau coronavirus a été détecté. Baptisé 2019-nCoV, le virus s’est rapidement propagé. Au 29 janvier 2020, il touchait 20 pays avec plus de 6 000 cas confirmés et 133 décès.
Les scientifiques se sont efforcés de comprendre les caractéristiques de ce nouveau virus. Bien qu’il appartienne à la même famille de virus responsable des épidémies du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et de MERS, ses propriétés uniques ne sont toujours pas claires. Une nouvelle étude présente la description clinique la plus complète du virus publiée à ce jour, englobant 99 patients admis avec le virus dans un hôpital local de Wuhan.
L’étude a révélé que l’âge moyen des patients infectés était de 55 ans, et que la majorité (68 %) étaient des hommes. La moitié des patients étudiés souffraient d’une maladie chronique préexistante et 49 % avaient un lien direct avec le marché alimentaire soupçonné d’être à l’origine du virus.
Sur le plan symptomatique, la plupart des patients présentaient de la fièvre et/ou une toux lors de leur admission à l’hôpital. Ce sont les deux symptômes les plus importants et les plus constants que l’on retrouve avec ce virus. Parmi les autres symptômes observés chez certains patients, citons l’essoufflement, les douleurs musculaires et les maux de tête.
Commentant une précédente étude sur les caractéristiques cliniques de ce nouveau virus, Paul Hunter de l’université d’East Anglia (Royaume-Uni) a noté qu’il existe des différences symptomatiques importantes entre ce coronavirus et son homologue notoire, le SRAS.
Selon Hunter :
Ce qui ressort fortement, c’est que les caractéristiques cliniques et l’épidémiologie de la récente épidémie sont très similaires à celles du SRAS avec une grande différence, l’absence relative de symptômes des voies respiratoires supérieures tels que l’écoulement nasal, les maux de gorge et les éternuements par rapport à ce qui a été observé dans le cas du SRAS. C’est très important car les éternuements et l’écoulement nasal sont un des principaux moyens de propagation de l’infection.
Au terme de l’étude, le 25 janvier, seuls 11 patients sont morts du virus, tandis que 31 se sont rétablis et ont été renvoyés chez eux. Les scientifiques à l’origine de cette nouvelle analyse suggèrent que la plupart des patients décédés avaient plus de 60 ans et souffraient de maladies préexistantes. Les patients atteints du virus qui sont décédés l’ont été principalement à cause du syndrome de détresse respiratoire aiguë, ou SDRA, une forme critique d’insuffisance respiratoire.
Alors que le taux de mortalité dans cette cohorte étudiée est d’environ 11 %, les scientifiques affirment que certains patients actuellement hospitalisés peuvent encore succomber au virus. Cependant, on note également que ce taux de mortalité élevé ne tient compte que des cas aigus d’hospitalisation et n’est pas révélateur de la virulence générale du virus dans le monde réel.
L’un des points de données les plus convaincants soulevés dans l’étude est la tendance du virus à présenter un risque d’infection plus élevé chez les hommes que chez les femmes. Cela ressemble à l’un des traits les plus étranges observés lors des précédentes épidémies de SRAS et de MERS.
Dans cette nouvelle étude, les chercheurs supposent que :
La sensibilité réduite des femmes aux infections virales pourrait être attribuée à la protection du chromosome X et des hormones sexuelles, qui jouent un rôle important dans l’immunité innée et adaptative.
Le résultat final de cette analyse, selon les scientifiques, est que les hommes âgés souffrant de maladies chroniques préexistantes sont les plus exposés au nouveau coronavirus.
L’épidémie reste, bien sûr, une urgence mondiale dynamique et rapide, avec une série de questions encore sans réponse. On ne sait pas exactement dans quelle mesure le virus peut être contagieux, ni s’il est transmissible alors que le porteur est encore asymptomatique.
L’étude publiée dans The Lancet : Epidemiological and clinical characteristics of 99 cases of 2019 novel coronavirus pneumonia in Wuhan, China: a descriptive study.
II– Une autre étude de cas récemment publiée dans la même revue décrit comment le virus a infecté une famille entière au début du mois de janvier. En plus de vérifier la transmission de personne à personne, l’étude de cas suggère qu’une transmission asymptomatique du virus est possible. Un enfant de 10 ans de la famille a été diagnostiqué avec le virus tout en demeurant curieusement complètement dépourvu de symptômes. Si des cas asymptomatiques de SRAS ont été détectés dans le passé, ils étaient très rares.
Selon Kwok-Yung Yuen de l’université de Hong-kong (Laboratory of Emerging Infectious Diseases), chercheur principal sur l’étude de cas familiale :
Parce que l’infection asymptomatique semble possible, le contrôle de l’épidémie reposera également sur l’isolement des patients, la recherche et la mise en quarantaine des contacts le plus tôt possible, l’éducation du public en matière d’hygiène alimentaire et personnelle, et la garantie que les travailleurs de la santé se conforment à la lutte contre l’infection.
Egalement publiée dans The Lancet : A familial cluster of pneumonia associated with the 2019 novel coronavirus indicating person-to-person transmission: a study of a family cluster.
III – Et enfin une nouvelle analyse génétique de 10 séquences génétiques du nouveau coronavirus (2019-nCoV) provenant de 9 patients de Wuhan révèle que le virus est plus étroitement apparenté à deux coronavirus de type SRAS dérivés de chauve-souris, selon une recherche internationale. Les chercheurs ont constaté que les séquences génétiques des échantillons étaient presque identiques, ce qui indique une émergence très récente du virus chez l’homme. Les auteurs affirment qu’il semble probable que le 2019-nCoV à l’origine de l’épidémie de Wuhan ait pu être initialement hébergé par des chauves-souris et transmis à l’homme via un animal sauvage actuellement inconnu vendu sur un marché.
L’étude publiée dans The Lancet : Genomic characterisation and epidemiology of 2019 novel coronavirus: implications for virus origins and receptor binding
Deux remarques :
1- En Chine, il n’y a pas de médecine de ville. Il faut se rendre à l’hôpital, qui n’est pas gratuit.
Résultat : les contagions constatées concernent uniquement les patients qui se sont présentés, avec majoritairement des symptômes significatifs et de quoi payer.
2-concernant le génome du virus, le premier article est ici :
https://www.biorxiv.org/content/10.1101/2020.01.22.914952v2.full.pdf
Il fait référence à un virus voisin trouvé sur la chauve-souris.