Un peu plus près de l’extinction : le champignon ravageur de la banane débarque en Amérique du Sud
La Colombie a déclaré l’état d’urgence à la suite de la découverte de la maladie de Panama.
La bien-aimée banane Cavendish se rapproche un peu plus de l’extinction. La Colombie vient d’apprendre que des plants de bananiers ont été testés positifs à la souche tropical race 4 (TR4) de la maladie de Panama, malgré les efforts déployés depuis des années par l’Amérique latine pour l’empêcher d’atteindre ce continent.
TR4 infecte les plantes avec un champignon appelé Fusarium oxysporum f.sp. cubense qui flétrit les plantes et les empêche éventuellement de produire des bananes. Gert Kema, professeur de phytopathologie tropicale à l’université de Wageningen aux Pays-Bas, a participé à l’analyse des échantillons de sol colombiens qui ont révélé ce champignon et selon lui :
Une fois que vous le voyez, il est trop tard, et il s’est probablement déjà répandu à l’extérieur de cette zone sans être reconnu.
Pour nous, mangeurs occidentaux de bananes, cela pourrait signifier la fin de ces fruits bon marché et familiers que nous tenons pour acquis depuis si longtemps. C’est tragique et dérangeant, mais rien comparé aux ravages causés en Amérique centrale et en Amérique du Sud, où des millions de personnes dépendent des bananes et des bananes plantains pour se nourrir, car les Cavendish ne sont pas les seules bananes qui seront touchées. La maladie de Panama TR4 a une variété d’hôtes notoirement large, ce qui signifie qu’elle menace presque toutes ces variétés. Aucun fongicide ou mesure de biocontrôle n’a prouvé son efficacité contre le TR4.
L’agriculture de la banane est elle-même en partie responsable de la propagation du champignon. Les plantations commerciales produisent presque exclusivement une variété clonale, appelée Cavendish. La génétique identique de ces plantes qui n’évolue plus pour faire face à ce type de maladie signifie qu’elles y sont également sensibles de façon identique. La pratique consistant à produire des cultures à faible diversité génétique, techniquement appelée monoculture, contribue à une agriculture commerciale et à une commercialisation bon marché et efficace, mais elle rend les systèmes alimentaires dangereusement vulnérables aux épidémies de maladies.
Un tract informant sur la manière de reconnaitre un bananier infecté par la souche TR4 de la maladie de Panama. (ICA)
Le problème est aggravé par la façon dont les bananes sont cultivées dans d’énormes monocultures qui manquent de diversité. Cela sape la résilience d’une culture et la rend vulnérable à ce genre de maladie. Nous aurions dû en tirer les leçons il y a des années, car la même situation s’est produite au milieu du XXe siècle, lorsque la banane populaire du Gros Michel, la principale variété exportée en Europe et en Amérique du Nord à l’époque, a failli disparaître d’une souche antérieure de la maladie de Panama, TR1. Elle a été remplacée par la Cavendish, mais cette fois il n’y a aucune souche de banane connue qui puisse résister au TR4.
La Colombie se bat pour contenir le TR4, mais elle a une frontière commune avec l’Équateur, qui est le plus grand exportateur mondial de bananes et très préoccupé par ce qui va inévitablement arriver. La banane est l’une des principales ressources économiques de l’Amérique latine et sa destruction sera dévastatrice pour tout le continent.
Pendant ce temps, les espoirs du monde entier reposent sur les biotechnologistes du Queensland, en Australie, qui réalisent des expériences avec des bananes Cavendish génétiquement modifiées pour résister au TR4. Les essais ont été couronnés de succès jusqu’à présent, mais il reste à voir si les changements peuvent être adoptés au niveau mondial, et si nous accepteront une banane génétiquement modifiée.
Annoncée sur le site Panama Disease : Fusarium wilt TR4 may have reached Latin America et sur le site de l’Institut d’agriculture brésilienne (une version du cache de Google, car l’article sur le site de l’ICA n’est plus accessible) : El ICA en conjunto con el sector privado atiende sospecha de marchitez en cultivos de banano en La Guajira.