La bière des pharaons : des scientifiques recréent une bière vieille de 5 000 ans avec de la levure provenant d’anciennes jarres
Si vous pensez que la bière de votre bar local est un peu amer, pensez aux chercheurs qui ont brassé une bière à partir de levures dont l’âge est estimé à 5 000 ans.
La levure a été extraite de poteries utilisées dans l’antiquité pour produire de la bière, plus précisément des nanopores (micros infructuosités) de l’argile et transformée en boisson alcoolisée avec l’aide de microbiologistes, d’archéologues et d’experts du brassage. Le résultat final est ostensiblement une bière qui aurait été semblable à celle que l’on buvait à l’époque des pharaons.
Image d’entête : cruche à bière de Tell es-Safi/Gath, Israël. (Yaniv Berman/ Israel Antiquities Authority)
L’équipe pense que c’est la première fois que de l’ancienne levure a été conservée et cultivée pour brasser une nouvelle bière, dans ce cas, une bière à 6 % semblable à une bière d’orge, et à 14 % à un hydromel. Auparavant, une souche génétiquement modifiée de blé de 13 000 ans d’âge à également été utilisée pour brasser de la bière.
Selon l’un des membres de l’équipe, Ronen Hazan, microbiologiste à l’université hébraïque de Jérusalem en Israël :
La plus grande merveille ici est que les colonies de levures ont survécue dans le récipient pendant des milliers d’années, attendant juste d’être excavées et cultivées.
Cette ancienne levure nous a permis de créer une bière qui nous fait découvrir le goût des anciennes bières philistines et égyptiennes. Au fait, la bière n’est pas mauvaise.
Bien sûr, 5 000 ans, c’est long pour une levure de survivre dans un nanopore, l’équipe précise que ce sont les descendants directs de la levure trouvée dans le pot, ce qui fait que la souche de levure elle-même a 5 000 ans.
Pour s’assurer qu’ils ne les confondaient pas avec une souche de levure dans l’environnement, les chercheurs ont également testé 27 autres réceptacles non utilisés pour le breuvage alcoolisé et 53 autres échantillons sur le site des fouilles et ils n’ont trouvé la levure nulle part ailleurs.
La bière était extrêmement importante et régulièrement consommée dans les anciennes cultures, les boissons alcoolisées comme la bière et le vin étaient considérées comme plus sûres à boire que l’eau en raison du processus de fermentation, et ils étaient également liés à des pratiques religieuses et à des soins de santé.
Cette levure provient de poteries extraites sur quatre sites différents en Israël, la plus ancienne datant d’environ 3 000 ans avant notre ère. Basée sur le séquençage génétique, la levure apparaît similaire à celles utilisées dans les brassins africains traditionnels et à la levure de bière moderne.
Selon l’un des chercheurs, l’archéologue Aren Maeir de l’université Bar-Ilan en Israël :
Je me souviens que lorsque nous avons sorti la bière pour la première fois, nous nous sommes assis autour de la table et nous avons bu. Et je me suis dit que soit cela allait bien se passer ou qu’on serait tous morts dans cinq minutes. On a vécu pour raconter l’histoire.
Le professeur Aren Maeir, de l’Université Bar Ilan, tient une ancienne jarre et un verre de bière pendant une conférence de presse à Jérusalem, le mercredi 22 mai 2019. (AP Photo/ Sebastian Scheiner)
Les chercheurs ont même laissé entendre qu’ils pourraient essayer de la mettre en vente un jour, pour s’alcooliser comme les Pharaons. La boisson a reçu l’approbation (le pouce) des dégustateurs de l’International Beer Judge Certification Program.
Mais l’alcool n’a pas exactement le goût qu’il avait dans l’antiquité : seules quelques souches de levures anciennes ont été extraites et des ingrédients et des techniques modernes ont été utilisés pour la produire.
Au-delà du buzz d’une bière de 5 000 ans d’âge, il y a ici une découverte scientifique plus profonde : l’étude montre qu’il est possible d’isoler et d’analyser des microorganismes (en l’occurrence des levures) d’anciennes poteries. Jusqu’à présent, la plupart des analyses d’anciens organismes s’appuyaient sur des études d’ADN.
Quand il s’agit de recréer le passé et de comprendre comment nos ancêtres vivaient, c’est un développement important.
Selon Hazan :
Outre le truc de la bière de l’époque du roi Pharaon, cette recherche est extrêmement importante pour le domaine de l’archéologie expérimentale, un domaine qui cherche à reconstruire le passé.
Nos recherches offrent de nouveaux outils pour examiner les anciennes méthodes et nous permettent de goûter les saveurs du passé.
L’étude publiée dans mBio : Isolation and Characterization of Live Yeast Cells from Ancient Vessels as a Tool in Bio-Archaeology et présentée sur le site de l’université hébraïque de Jérusalem :Cocktails with Cleopatra?