La pollution plastique des océans tue les bactéries qui produisent 10 % de l’oxygène de la Terre
Une nouvelle étude suggère que l’organisme photosynthétique (qui pratique la photosynthèse) le plus abondant sur Terre, qui joue un rôle majeur dans la production mondiale d’oxygène, la fixation du carbone et le cycle biogéochimique, pourrait être affecté par les lixiviats du plastique.
Les débris plastiques sont un problème croissant pour les écosystèmes marins, menaçant d’innombrables espèces. La plupart de notre attention se concentre sur les plus grandes espèces telles que les tortues ou les oiseaux marins qui peuvent s’étouffer ou s’emmêler dans des sacs en plastique. Cependant, on ne sait pas grand-chose sur les effets de la pollution plastique sur les plus petits organismes, mais aussi les plus nombreux dans l’océan : le phytoplancton.
Des scientifiques australiens dirigés par Sasha Tetu, chercheur à l’université Macquarie de Sydney (Australie), ont étudié l’effet de l’exposition au lixiviat de plastique sur deux souches de Prochlorococcus, représentant deux écotypes distincts de cyanobactéries.
Image d’entête : Prochlorococcus MED4 EM se divisant. (Wikimédia)
Le prochlorocoque a été découvert en 1986 par Sallie Chisholm du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et Robert J. Olson de l’Institut océanographique de Woods Hole (États-Unis). Il s’agit de l’un des plus petits types de bactéries marines dans les océans de la Terre. Ce sont aussi les cellules photosynthétiques les plus nombreuses de l’océan, avec une population estimée à environ 1027 cellules.
Le prochlorocoque par les chiffres. (N. Watson/ L. Thompson/ MIT)
De précédents travaux de recherche suggèrent que le prochlorocoque peut être vulnérable aux polluants organiques, aux rayons UV et aux concentrations élevées de cuivre.
Les chercheurs ont exposé des bactéries Prochlorococcus communément trouvées dans les océans tropicaux et subtropicaux à des lixiviats provenant d’articles en plastique courants comme les sacs en polyéthylène haute densité (PE-HD) et les tapis en polychlorure de vinyle (PVC).
Les lixiviats ont entravé la croissance in vitro des deux souches de Prochlorococcus (MIT9312 et NATL2A) dans toute la gamme des dilutions testées (50, 25, 12,5, 6,25 et 3,125% pour le PE-HD ; 10, 2, 1, 0,5 et 0,25% pour le PVC). Plus la concentration du lixiviat était élevée, plus la réduction de la densité de population était importante, ce qui indique un effet proportionnel à la dose.
L’exposition au PE-HD et au PVC a également entraîné une nette baisse des taux de production d’oxygène. De plus, la transcription d’environ 500 gènes bactériens a également été altérée par le contact avec les lixiviats.
Selon les chercheurs dans leur étude :
L’exposition aux deux lixiviats a entraîné une augmentation de la transcription des gènes communs de réponse au stress.
Parmi les deux lixiviats, le PVC s’est avéré produire de loin les pires effets. Cela peut s’expliquer par la proportion relativement plus élevée d’additifs utilisés dans la fabrication du PVC, notamment les plastifiants, les stabilisants thermiques et les biocides.
L’exposition aux lixiviats de PVC a affecté le Prochlorocoque dans une plus grande mesure que les lixiviats de PE-HD, ce qui s’est traduit par une réduction considérable du lixiviat de PVC nécessaire pour affecter négativement la croissance du Prochlorocoque et les réponses photophysiologiques.
Ces résultats inquiétants suggèrent que la pollution plastique peut sérieusement affecter la capacité des bactéries photosynthétiques à fixer le carbone, à récolter la lumière et à produire de l’oxygène. De futures études pourraient répondre à la question de savoir comment le prochlorocoque réagit aux conditions réelles de l’océan, où les concentrations de lixiviat sont probablement beaucoup plus faibles que les dilutions testées dans cette étude. Selon toute vraisemblance, cette cyanobactérie n’est pas sérieusement menacée, du moins pas encore. Comme de plus en plus de plastique est produit et déversé dans les cours d’eau, cela pourrait facilement devenir un problème majeur.
Les chercheurs australiens de conclure :
Par conséquent, l’exposition au lixiviat de plastique pourrait influer sur la composition des communautés de chlorocoques marins et potentiellement sur la composition et la productivité des communautés de phytoplancton océanique en général.
L’étude publiée dans Communications Biology : Plastic leachates impair growth and oxygen production in Prochlorococcus, the ocean’s most abundant photosynthetic bacteria et présentée sur le site de l’université Macquarie : It’s not just fish, plastic pollution harms the bacteria that help us breathe.
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