La Lune pourrait s’être formée à partir du magma expulsé par une Terre percutée
Depuis des décennies, les physiciens tentent de résoudre le mystère qui entoure la formation de la lune. Bien que plusieurs modèles plausibles aient été proposés, aucun ne s’est révélé particulièrement satisfaisant jusqu’à présent. Dans une nouvelle étude, des chercheurs affirment que le seul satellite naturel de notre planète s’est formé à la suite de l’impact avec une planète de la taille de Mars qui a éjecté du magma liquide de la surface de la toute jeune Terre dans l’espace. Ce magma s’est solidifié, avec une petite proportion du matériau de l’impacteur, pour former la Lune telle que nous la connaissons aujourd’hui.
La plupart des modèles modernes sur la formation lunaire peuvent au moins convenir d’une chose, que la Terre s’est formée il y a environ 4,5 milliards d’années avec la Lune rejoignant le système peu après la violente collision de deux protoplanètes. L’hypothèse de l’impact géant explique de nombreuses caractéristiques que nous voyons aujourd’hui sur Terre et sur la Lune, telles que leur taille relative et leur vitesse de rotation. Mais il présente une grande lacune qui entache tout le modèle : la composition chimique de la Lune.
Nous savons maintenant que la plupart des corps du système solaire ont des compositions chimiques uniques, et il en est de même pour la Lune. Cependant, les roches lunaires rapportées sur Terre lors des missions Apollo montrent que leur empreinte isotopique est presque identique à celle des minéraux de la Terre.
Pour expliquer cette incohérence majeure, les chercheurs ont imaginé toutes sortes de modèles alternatifs. L’un des modèles les plus extravagants proposés par les physiciens de l’université de Californie, Davis et de l’université Harvard, affirme que la collision ancestrale a transformé la Terre primitive en un donut géant de taille planétaire fait de roche vaporisée appelé « Synestia » (de « syn-« , « ensemble » et « Hestia », déesse grecque du foyer (architecture et structures)). Selon cette théorie, des morceaux de roche en fusion qui ont été éjectés en orbite après l’impact ont formé les semences qui formeront le noyau de la Lune.
Représentation artistique présentant une Lune brulante et fondue émergeant d’un synestia, un donut géant de roche vaporisée qui s’est formé lorsque des objets de la taille d’une planète se sont heurtés. (Sarah Stewart/ UC Davis/ NASA)
Les synestias ne durent probablement pas longtemps, pas plus de quelques centaines d’années, parce qu’elles ne peuvent supporter leur chaleur, se rétrécissant rapidement et s’effondrant finalement en une planète en fusion. Et tandis que la Synestia de la Terre se rétrécissait progressivement, des roches de silicate vaporisées se sont déposées sur la proto-lune, ce qui explique comment celle-ci a hérité de sa composition terrestre. Un autre modèle suggère que la planète qui est entrée en collision avec la proto-Terre tournait rapidement. Les deux modèles sont plausibles, mais peu probables. Elles impliquaient simplement trop de » si « .
Par comparaison, le nouveau modèle proposé par les scientifiques de l’Agence japonaise pour la science et la technologie marines et terrestres à Yokohama et à l’université Yale (Etats-Unis) semble plus proche de la réalité.
Les chercheurs affirment que peu de temps après la formation de la Terre, celle-ci fut recouverte d’une mer de magma chaud, alors que l’objet impactant était probablement fait de matériau solide. L’équipe a effectué une simulation informatique montrant que l’impact aurait chauffé le magma beaucoup plus que les solides de l’objet impactant. Selon cette simulation, le magma se dilate en volume et se met en orbite pour former la Lune, ce qui explique pourquoi il y a beaucoup plus de matière terrestre dans la composition lunaire. Même une simple collision de l’impacteur aurait suffi à faire tomber plus de 70 % des débris qui forment la Lune de l’océan de magma.
Aperçu de la modélisation numérique de la formation de la lune par un impact géant. La partie centrale de l’image est une proto- Terre ; les points rouges indiquent les matériaux de l’océan de magma dans une proto- Terre ; les points bleus indiquent les matériaux de l’impacteur. (Hosono/ Karato/ Makino/ Saitoh/ Université Yale)
Selon Shun-ichiro Karato, un géophysicien de Yale et coauteur de l’étude :
Dans notre modèle, environ 80 % de la lune est faite de matériaux proto-terrestres. Dans la plupart des modèles précédents, environ 80 % de la Lune est constituée de l’impacteur. C’est une grande différence.
Ce nouveau modèle confirme les précédentes théories sur la formation de la Lune, sans qu’il soit nécessaire de proposer des scénarios de collision hors du commun, mais ce n’est pas non plus le dernier mot sur la question. Les chercheurs japonais ont découvert que la quantité de débris provenant de l’impact était comparable à la masse actuelle de la Lune. Cependant, de précédents travaux suggèrent que les débris devraient représenter environ 3 à 4 fois la masse de la lune. À l’avenir, les chercheurs ajusteront d’autres variables, comme la masse de l’élément de frappe et sa rotation, pour voir si la quantité de débris générés est mieux adaptée.
L’étude publiée dans Nature Geoscience : Terrestrial magma ocean origin of the Moon et présentée sur le site de l’université Yale : Magma is the key to the moon’s makeup.