La fonte de la calotte polaire du Groenland s’intensifie dangereusement
La fonte de la surface de la calotte glaciaire du Groenland s’est dangereusement intensifiée et ne montre aucun signe de ralentissement, selon une nouvelle étude américaine.
Image d’entête : l’eau de fonte fond de la calotte glaciaire du Groenland glisse dans l’océan pendant les chaudes journées d’été. (Woods Hole Oceanographic Institution)
Selon la glaciologue Sarah Das de la Woods Hole Oceanographic Institution au Massachusetts :
D’un point de vue historique, les taux de fonte actuels sont hors normes et cette étude fournit les preuves pour le démontrer.
Nous avons constaté une augmentation de 50 % du ruissellement total des eaux de fonte de la calotte glaciaire par rapport au début de l’ère industrielle, et une augmentation de 30 % depuis le XXe siècle seulement.
Les résultats de l’étude (lien plus bas), suggèrent que si la fonte se poursuit à ce rythme sans précédent, que les chercheurs attribuent à des étés plus chauds, elle pourrait accélérer encore le rythme de l’élévation du niveau de la mer.
Pour Luke Trusel, glaciologue à l’Université Rowan, au New Jersey :
Plutôt que d’augmenter régulièrement à mesure que le climat se réchauffe, le Groenland fondra de plus en plus pour chaque degré de réchauffement.
La fonte et l’élévation du niveau de la mer que nous avons déjà observées seront éclipsées par ce à quoi on peut s’attendre à l’avenir alors que le climat continue à se réchauffer.
Un grand glacier de marée rencontre la côte à l’ouest du Groenland, déversant la glace et l’eau de fonte dans l’océan. (Sarah Das/ Woods Hole Oceanographic Institution)
L’équipe de recherche a utilisé une énorme foreuse pour extraire des carottes de glace de la calotte glaciaire et d’une calotte glaciaire côtière adjacente dans le centre ouest du Groenland, à plus de 1800 mètres au-dessus du niveau de la mer. Ils avaient besoin de ces hauteurs pour s’assurer que les carottes contiendraient des données sur l’intensité de la fonte passée, ce qui leur permettrait de remonter au XVIIe siècle.
À basse altitude, l’eau de fonte estivale s’écoule de la calotte glaciaire et contribue à l’élévation du niveau de la mer, mais aucune trace de cette fonte ne subsiste. À des altitudes plus élevées, elle se recongèle rapidement après avoir été en contact avec le manteau neigeux qui la recouvre, formant des bandes de glace distinctes qui s’empilent en couches denses avec le temps.
Les carottes ont été prélevées au laboratoire, où les chercheurs ont mesuré les propriétés physiques et chimiques le long des carottes pour déterminer l’épaisseur et l’âge des couches fondues.
L’auteur principal de l’étude, Luke Trusel, prend des mesures sur le terrain d’une section de carotte de glace du Groenland avant de l’emballer pour la transporter. (Sarah Das/ Woods Hole Oceanographic Institution)
En combinant ces résultats avec les observations de la fonte par satellite et des modèles climatiques sophistiqués, ils ont pu montrer que l’épaisseur des couches annuelles de fonte qu’ils ont observées permettait de suivre clairement l’ampleur de la fonte non seulement aux sites de carottage, mais plus largement au Groenland. Les données des carottes de glace sont inestimables parce que les satellites n’existent que depuis la fin des années 1970.
Cela leur a permis de reconstituer le ruissellement de l’eau de fonte sur les bords inférieurs de l’inlandsis, les zones qui contribuent à l’élévation du niveau de la mer.
Selon Matt Osman, un collègue de Das :
Nous avons eu l’impression qu’il y a eu beaucoup de fonte au cours des dernières décennies, mais nous n’avions auparavant aucune base de comparaison avec les taux de fonte remontant plus loin dans le temps .
En échantillonnant la glace, nous avons pu multiplier par 10 les données satellitaires et obtenir une image plus claire de la fonte extrêmement inhabituelle des dernières décennies par rapport au passé.
Un autre aspect notable et inquiétant des résultats est le peu de réchauffement supplémentaire qu’il faut désormais pour causer d’énormes augmentations de la fonte de l’inlandsis, et toujours selon Das :
Même un très petit changement de température a provoqué une augmentation exponentielle de la fonte au cours des dernières années.
En d’autres termes, la réaction de la calotte glaciaire au réchauffement causé par l’homme fut non linéaire. Le réchauffement a un plus grand impact aujourd’hui qu’autrefois.
L’étude publiée dans Nature : Nonlinear rise in Greenland runoff in response to post-industrial Arctic warming et présentée sur le site de la de la Woods Hole Oceanographic Institution : Greenland Ice Sheet Melt ‘Off the Charts’ Compared With Past Four Centuries.
Récemment, une autre étude sur le sujet :