Quand la pluie apporte la mort dans le désert le plus sec de la Terre
Le désert d’Atacama, au Chili en Amérique du Sud, est non seulement le désert le plus sec, mais aussi le plus ancien de la Terre. Il est si aride que dans certaines zones, comme son centre hyperaride, aucun signe de pluie n’a été enregistré depuis 500 ans. On pourrait penser qu’un peu de pluie serait une bénédiction pour les quelques créatures qui y vivent. Mais pour de nombreuses espèces microbiennes qui se sont adaptées à vivre presque sans eau, les pluies récentes qui ont pénétré dans le centre ont été désastreuses. Cependant, selon une nouvelle étude, nous en savons maintenant un peu plus sur ce que des créatures hypothétiques vivant sur Mars, dans des conditions similaires, ont pu vivre au cours de la riche histoire géologique de la planète rouge.
Le désert d’Atacama est un plateau (typiquement) sans pluie qui couvre près de 100 000 km2. Il est 50 fois plus sec que dans la Vallée de la Mort (Californie/ États-Unis) et les précipitations moyennes n’y sont que d’un millimètre par an. Au début du 20e siècle, pas une seule goutte de pluie n’a atteint la surface d’Atacama pendant 173 mois. En fait, il est si mort, stérile et hostile que la NASA y effectue régulièrement des tests simulant les conditions sur Mars.
Depuis des millions d’années, les régions du désert d’Atacama sont restées hyperarides. Mais même dans des conditions aussi inhospitalières, certaines espèces microbiennes du sol en surface se sont adaptées pour survivre avec de maigres quantités d’eau liquide. Cependant, les chercheurs du Centre d’astrobiologie (CAB) de l’Universidad Autónoma de Chile ont découvert que de récentes pluies inattendues ont provoqué la mort rapide de nombreuses espèces microbiennes suite au choc osmotique (lyse) causé par l’abondance soudaine d’eau.
Selon les chercheurs, l’aire d’extinction atteint 85%, anéantissant toutes les archées et les eucaryotes. Seule une poignée de bactéries, comme une espèce de halomonas récemment identifiée, demeurent métaboliquement actives et capables de se reproduire dans les lagunes.
Selon le Dr Alberto G. Fairén, auteur principal de cette nouvelle étude :
Notre groupe a découvert que, contrairement à ce que l’on pouvait s’attendre intuitivement, les pluies inédites n’ont pas déclenché une floraison de la vie à Atacama, mais que les pluies ont causé d’énormes ravages chez les espèces microbiennes qui habitaient la région avant les fortes précipitations.
Les résultats sont importants dans le contexte de l’exploration astrobiologique de Mars, une planète hyperaride qui a connu des inondations catastrophiques dans des temps anciens. Pendant les premiers jours de la planète rouge, à une époque appelée Noachien (il y a 4,5 à 3,5 milliards d’années), sa surface était richement recouverte d’eau, pas du tout différente de la Terre.
Représentation artistique de ce à quoi pouvait ressembler Mars à l’époque du Noachien, d’après des données géologiques. (Ittiz)
C’est un fait incontesté parmi les chercheurs, si l’on en juge par les preuves hydrogéologiques présentes à la surface de Mars comme les minéraux hydratés et les formations géologiques comme des rivières asséchées, des lacs, des deltas et un immense bassin qui ressemble à un océan dans les plaines du Nord.
Début 2018 :
Après cette période » humide « , qui aurait pu facilement entretenir de la vie, Mars a perdu son atmosphère et son hydrosphère.
Selon M. Fairén :
Mais à certains moments de la période hespérienne (il y a 3,5 à 3 milliards d’années), de grands volumes d’eau ont sculpté sa surface sous la forme de canaux d’écoulement, les plus grands canaux du système solaire. S’il y avait encore des communautés microbiennes résistant au processus de séchage extrême, elles auraient été soumises à des processus de stress osmotique similaires à ceux que nous avons étudiés à Atacama.
Lorsque l’eau liquide a refait surface sur Mars, elle a peut-être tué toutes les poches de vie qui auraient pu survivre submergées profondément sous le sol, ces nouvelles découvertes semblent le suggérer.
L’étude publiée dans Scientific Reports : Unprecedented rains decimate surface microbial communities in the hyperarid core of the Atacama Desert.
Super intéressant ! Comme toujours.
Pour y avoir observé l’alignement du plan de la galaxie avec l’horizon (27 éme parallèle sud) ,le Désert d’Atacama est vraiment aride et extraordinaire. Mais il existe un phénomène naturel durant une période de l’année tout aussi intéressant , le désert fleuri. Sur une centaine de kilomètres le rouleau compresseur de vapeur d’eau venant de l’ocean pacifique hydrate le littoral assez profondément à l’interieur des terres permettant à la flore locale de vivre.
Thierry.