Fusion nucléaire : le soleil artificiel chinois a atteint des températures 6 fois plus chaudes que celle de notre étoile
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Le rêve d’une source d’énergie propre et illimitée par le biais de la fusion nucléaire a franchi une nouvelle étape grâce au tokamak supraconducteur avancé expérimental de la Chine (EAST pour Experimental Advanced Superconducting Tokamak). Au cours d’une expérience de 4 mois, le « soleil artificiel chinois » a atteint une température au cœur du plasma de plus de 100 millions de degrés Celsius, soit plus de 6 fois plus chaudes que l’intérieur du Soleil et une puissance de chauffe de 10 MW, permettant ainsi de faire des analyses pratiques de divers aspects du processus de fusion nucléaire.
Image d’entête : le tokamak européen JET, avant et pendant son fonctionnement, similaire à celui du EAST (EFDA/ JET). Ci-dessous, la température du plasma électronique à plus de 100 millions de degrés atteinte en 2018 dans le tokamak (encart à droite) EAST. (CASHIPS)
Le précédent article du Guru pour vous familiarisé avec la fusion nucléaire :
Depuis 2006, les Chinois ont conçu et développé EAST, qui est situé dans les locaux de l’Institut des sciences physiques Hefei de l’Académie chinoise des sciences (CASHIPS pour Hefei Institutes of Physical Science of the Chinese Academy of Sciences), et il est considéré comme une installation d’essai ouverte afin de mener des recherches en physique liées à ITER, le réacteur thermonucléaire expérimental situé à Cadarache (Bouches-du-Rhône/ France) et à des opérations dans un état stable, tant de la part de scientifiques chinois qu’internationaux. Et, comme beaucoup d’autres expériences sur la fusion, le but ultime est de produire un réacteur nucléaire à fusion utilisable.
L’extérieur de l’Experimental Advanced Superconducting Tokamak (EAST) à Hefei en Chine. (Institute of Plasma Physics Chinese Academy of Science)
Le réacteur EAST est un tokamak (comme en image d’entête) composé d’un tore métallique (ou donut) qui est purgé sous vide et dans lequel on injecte ensuite des atomes d’hydrogène. Ces atomes sont alors chauffés par différentes méthodes pour créer un plasma qui est ensuite comprimé à l’aide d’une série de puissants aimants supraconducteurs. Finalement, le plasma devient si chaud et si comprimé que les conditions à l’intérieur du réacteur imitent celles que l’on trouve à l’intérieur du Soleil, ce qui provoque la fusion des atomes d’hydrogène et libère d’énormes quantités d’énergie. On espère qu’un réacteur pourra éventuellement être construit là où la réaction de fusion est auto-entretenue et où le réacteur génère plus d’énergie qu’il n’en consomme.
EAST a produit ses températures et densités de pointe pendant environ 10 secondes en combinant 4 méthodes de chauffe différentes pour créer le plasma et provoquer le processus de fusion. Dans ce cas, les méthodes utilisées étaient la chauffe par ondes hybrides inférieures (oscillation des ions et des électrons dans le plasma), la chauffe par ondes cyclotroniques électroniques (utilisant un champ magnétique statique et un champ électromagnétique à haute fréquence), et la chauffe ionique par résonance cyclotron (accélération des ions dans un cyclotron), et par un réchauffement par ondes neutres (par l’injection d’un faisceau de particules neutres accéléré dans le plasma). En somme, la procédure de l’EAST reposait sur de multiples formes de réchauffement avec les bonnes combinaisons, créant ainsi une densité plasmatique optimale.
Cependant, le but n’était pas seulement d’établir un record, mais aussi d’étudier comment maintenir la stabilité et l’équilibre du plasma, comment le confiner et le transporter, et comment la paroi du plasma interagit avec les particules énergétiques. En outre, EAST est utilisé comme démonstrateur sur la façon d’utiliser le réchauffage à dominance d’ondes radiofréquence, de maintenir un haut niveau de confinement du plasma avec un degré élevé de pureté, de maintenir la stabilité magnétohydrodynamique et d’évacuer la chaleur en utilisant un divertor en tungstène refroidi à l’eau.
Selon le CASHIPS, l’EAST est utilisé pour étudier comment maintenir des températures d’électrons supérieures à 100 millions de degrés sur de longues périodes afin d’approfondir les connaissances et d’aider au développement de réacteurs avancés comme le réacteur expérimental thermonucléaire international (ITER) en construction en France, le réacteur chinois CFETR et le projet DEMO proposé (DEMOnstration Power Station). Atteindre des températures supérieures à 100 millions de degrés Celsius, même si ce n’est que pendant environ 10 secondes, prouve qu’il est possible d’atteindre les températures requises pour la fusion nucléaire.
Sur le site du CASHIPS : Chinese Fusion Tool Pushes Past 100 Million Degrees.