La lune de Saturne, Titan est désormais le troisième objet du système solaire à présenter des tempêtes de poussière
Bien que Titan soit une lune, sa géologie est intrigante et, à bien des égards, très semblable à celle de la Terre. Titan a une atmosphère conséquente et il est le seul corps du système solaire, autre que la Terre, à contenir un liquide stable (dans son cas, du méthane) à sa surface. Maintenant, les chercheurs ont identifié des tempêtes de poussière géantes dans les régions équatoriales de la lune de Saturne. Cela fait de Titan le troisième objet du système solaire, avec la Terre et Mars, où un tel phénomène météorologique a été observé.
Image d’entête : représentation artistique d’une tempête de poussière sur Titan. (IPGP/ Labex UnivEarthS/ Université Paris Diderot/ C. Epitalon & S. Rodriguez)
Titan a une météo active qui change d’une saison à l’autre, en particulier à l’équinoxe, le moment où le soleil traverse l’équateur de Titan, où des nuages massifs de méthane et d’éthane peuvent provoquer de puissantes tempêtes dans les régions tropicales de la Lune.
Titan est la seule lune connue dont l’atmosphère est complètement développée et qui ne se compose pas seulement de gaz à l’état de traces. La température de Titan est d’environ -179 °C à sa surface. À cette température, la glace d’eau ne se sublime pas de l’état solide en gaz, ainsi l’atmosphère est presque exempte de vapeur d’eau.
Au cours de ses nombreux survols de Titan, la sonde Cassini de la NASA a enregistré de nombreuses tempêtes de ce type. Cependant, à une occasion, elle a repéré trois illuminations équatoriales inhabituelles avec ses instruments infrarouges. À l’époque, en 2009, les scientifiques pensaient qu’il s’agissait d’une sorte de nuage de méthane, mais un examen ultérieur a révélé qu’il s’agissait de quelque chose de totalement différent.
Taches lumineuses enregistrées dans l’infrarouge par la mission Cassini de la NASA entre 2009 et 2010. (NASA/ JPL-Caltech/ Université d’Arizona/ Université Paris Diderot/ IPGP/ S. Rodriguez et col.)
Il ne s’agissait pas non plus de pluie de méthane gelée ou de laves glacées, car elles ne correspondaient pas à la signature chimique et auraient dû rester visibles beaucoup plus longtemps que les éléments lumineux observés dans l’étude. Celles-ci ne sont apparues que pendant 11 heures à cinq semaines.
La modélisation des caractéristiques lumineuses a également montré que les éléments doivent être atmosphériques, mais encore près de la surface, formant une mince couche de particules organiques solides. Enfin, comme les caractéristiques étaient situées juste au-dessus des champs de dunes sur l’équateur de Titan, les auteurs de la nouvelle étude ont conclu que la seule explication viable était que les taches étaient en fait des nuages de poussière.
Selon Sébastien Rodriguez, astronome à l’Université Paris Diderot (France) et auteur principal de l’étude :
Titan est une lune très active. Nous le savons déjà pour sa géologie et son cycle d’hydrocarbures inhabituels. Maintenant, nous pouvons ajouter une autre analogie avec la Terre et Mars : le cycle actif de la poussière, dans lequel la poussière organique peut être soulevée des grands champs de dunes autour de l’équateur de Titan.
La poussière de Titan se forme probablement lorsque les molécules organiques, résultant de l’interaction du méthane avec la lumière du soleil, deviennent assez grosses pour tomber à la surface. En fait, selon Rodriguez, l’une des sondes de la NASA qui s’est posée sur Titan a soulevé de la poussière à son atterrissage, une première indication que des tempêtes de poussière se produisaient sur la lune de Saturne.
Toujours selon Rodriguez :
Nous pensons que la sonde Huygens, qui a atterri à la surface de Titan en janvier 2005, a soulevé une petite quantité de poussière organique à son arrivée en raison de son puissant sillage aérodynamique. Mais ce que nous avons vu ici avec Cassini est à une plus grande échelle. Les vitesses de vent près de la surface nécessaires pour soulever une telle quantité de poussière que nous voyons dans ces tempêtes de poussière devraient être très fortes, environ cinq fois plus fortes que les vitesses de vent moyennes estimées par les mesures de Huygens près de la surface et avec les modèles climatiques.
Les tempêtes de poussière sur Titan impliquent que les dunes géantes de la lune sont toujours actives et changent continuellement. Le vent pourrait transporter de la poussière de régions éloignées, ce qui déclencherait un cycle global de poussière organique sur la lune.
L’étude publiée dans Nature Geoscience :
Observational evidence for active dust storms on Titan at equinox et présentée sur le site de la NASA : Dust Storms on Titan Spotted for the First Time.