Ig Nobel : les gagnants 2018 de la science qui fait d’abord rire et ensuite réfléchir
La 28e cérémonie, toujours aussi décalée et hilare, de remise des prix Ig Nobel a eu lieu jeudi soir (13.09) au théâtre Sanders de l’université Harvard (Cambridge, Massachusetts, USA). Ces prix sont décernés par les membres de The Annals of Improbable Research, en septembre de chaque année, pour les recherches scientifiques qui nous font d’abord rire, puis ensuite réfléchir.
Les recherches primées cette année nous ont, entre autres, appris comment nous faire une coloscopie, combien de calories consomment les cannibales, comment les montagnes russes peuvent nous aider à évacuer les calculs rénaux, que la salive est un très bon nettoyant de surface… Les scientifiques impliqués ont toujours le sens de l’humour dans leurs travaux de recherche, même s’ils repoussent d’une manière ou d’une autre les limites du savoir humain.
Les gagnants ont reçu, entre autre, un superbe trophée…
… et 10 milliards de dollars… Zimbabwéens.
Le Guru vous présente les gagnants et vous trouverez l’intégralité de la cérémonie dans une vidéo en bas de page :
Prix de Médecine
Décerné à Marc Mitchell et David Wartinger (USA), pour avoir utilisé les montagnes russes pour tenter d’accélérer le passage des calculs rénaux.
Marc Mitchell a découvert qu’un nombre important de ses patients, selon leurs déclarations, avaient réussi à évacuer spontanément des calculs rénaux après avoir fait un tour de montagnes russes du Big Thunder Mountain Railroad (image ci-dessus) dans le parc à thème du Royaume magique de Walt Disney World à Orlando.
Pour le vérifier, les chercheurs ont fabriqué un modèle de rein en silicone, y ont inséré des calculs rénaux et l’ont testé sur des montagnes russes et, effectivement, ça aide….
L’étude publiée en octobre 2016 dans The Journal of the American Osteopathic Association : « Validation of a Functional Pyelocalyceal Renal Model for the Evaluation of Renal Calculi Passage While Riding a Roller Coaster.
Prix d’Anthropologie
Décerné à Tomas Persson, Gabriela-Alina Sauciuc, et Elainie Madsen, (Suède, Roumanie, Danemark, Pays-Bas, Allemagne, Angleterre, Indonésie, Italie) pour avoir recueilli des preuves, dans un zoo, que les chimpanzés imitent aussi souvent les humains, que ces derniers imitent les chimpanzés.
L’étude publiée en janvier 2018 dans la revue Primates : Spontaneous Cross-Species Imitation in Interaction Between Chimpanzees and Zoo Visitors.
Prix de Biologie
Décerné à Paul Becher, Sébastien Lebreton, Erika Wallin, Erik Hedenstrom, Felipe Borrero-Echeverry, Marie Bengtsson, Volker Jorger, et Peter Witzgall (Suède, Colombie, Allemagne, France, Suisse), pour avoir démontré que les œnologues peuvent identifier avec fiabilité, par l’odeur, la présence d’une mouche du vinaigre (Drosophila melanogaster) dans du vin et même de déterminer son sexe.
L’étude publiée en 2017 dans bioRxiv : The Scent of the Fly. Image de mouches du vinaigre tirée de l’étude.
Prix de Chimie
Décerné à Paula Romão, Adília Alarcão et feu César Viana (Portugal), pour avoir mesuré à quel point la salive humaine est un bon agent nettoyant pour les surfaces sales.
L’étude publiée en 1990 dans Studies in Conservation : Human Saliva as a Cleaning Agent for Dirty Surfaces.
Prix de l’Education Médicale
A Akira Horiuchi (Japon), dans l’image ci-dessus en pleine démonstration, qui a découvert que l’ont peut se faire sur soit même une coloscopie, dans son rapport médical : « Colonoscopie en position assise : Leçons tirées de l’autocoloscopie à l’aide d’un côlonoscope à petit calibre et à rigidité variable.”
L’étude publiée en 2006 dans la revue Gastrointestinal Endoscopy : Colonoscopy in the Sitting Position: Lessons Learned From Self-Colonoscopy by Using a Small-Caliber, Variable-Stiffness Colonoscope.
Prix de Littérature
Décerné à Thea Blackler, Rafael Gomez, Vesna Popovic et M. Helen Thompson (Australie, El Salvador, Angleterre), pour avoir documenté que la plupart des personnes qui utilisent des produits compliqués ne lisent pas la notice.
Ils ont ainsi découvert que la plupart des humains n’utilisent pas toutes les fonctions de leurs produits de consommation et sont peu enclins à consulter leurs instructions de montage quand ils sont coincés. L’étude suggère que les manuels sont désormais dépassés et qu’il est venu le temps d’adopter un nouveau système qui puisse être intégré dans les appareils eux-mêmes.
L’étude publiée en 2014 dans la revue Interacting With Computers : Life Is Too Short to RTFM: How Users Relate to Documentation and Excess Features in Consumer Products. Image dasBild.
Prix de Nutrition
Décerné à James Cole (Zimbabwe, Tanzanie, Angleterre), pour avoir calculé que l’apport calorique d’un régime à base de viande humaine (cannibalisme) est nettement inférieur à celui de la plupart des autres régimes traditionnels à base de viande.
L’archéologue a remporté le prix de la nutrition pour avoir calculé qu’il n’y a rien de vraiment nutritif chez un être humain, et que manger un régime traditionnel est supérieur au cannibalisme. « Vous obtiendrez plus de calories d’un cheval », a déclaré Cole.
L’étude publiée en avril 2017 dans Scientific Reports : Assessing the Calorific Significance of Episodes of Human Cannibalism in the Paleolithic. Image Cannibalisme au Brésil en 1557 comme décrit par Hans Staden. Gravure de Théodore de Bry, 1562.
Prix de la Paix
Décerné à Francisco Alonso, Cristina Esteban, Andrea Serge, Maria-Luisa Ballestar, Jaime Sanmartín, Constanza Calatayud et Beatriz Alamar (Espagne, Colombie), pour avoir mesuré la fréquence, la motivation et les effets des cris et des jurons au volant.
Ils ont notamment constaté que plus d’un quart des personnes interrogées le font à un moment donné, et seulement 2 % admettent qu’ils le font tout le temps.
La dernière étude publiée en 2017 dans le Journal of Sociology and Anthropology : Shouting and Cursing While Driving: Frequency, Reasons, Perceived Risk and Punishment et en 2005 dans la revue Cuadernos de Reflexión Attitudes : La Justicia en el Tráfico : Conocimiento y Valoración de la Población Española. Image : Mad Max 2.
Prix de Médecine Reproductive
Décerné à John Barry, Bruce Blank et Michel Boileau (USA, Japon, Arabie Saoudite, Égypte, Inde, Bangladesh), pour avoir utilisé des timbres-poste pour vérifier si l’organe sexuel masculin fonctionne correctement la nuit. Une bande de timbres entoure le pénis du cobaye. Si l’organe entre en érection, la bande de timbre sera séparée au niveau des micro-perforations… Tout marche bien navette !
L’étude publiée en 1980 dans Urology : Nocturnal Penile Tumescence Monitoring With Stamps.
Prix Économique
Décerné à Lindie Hanyu Liang, Douglas Brown, Huiwen Lian, Samuel Hanig, D. Lance Ferris et Lisa Keeping (Canada, Chine, Singapour, États-Unis), pour leur enquête sur l’efficacité des poupées Voodoo utilisées par les employés pour se “venger” des patrons abusifs.
L’étude, qui cherchait à comprendre pourquoi des employés mécontents se vengent contre de mauvais supérieurs, malgré le risque d’aggraver les choses, a révélé que le fait de martyriser une poupée avec des épingles et autres objets a permis à l’employé de retrouver son sens de la justice dans le monde.
L’étude publiée en février 2018 dans The Leadership Quarterly : Righting a Wrong: Retaliation on a Voodoo Doll Symbolizing an Abusive Supervisor Restores Justice.
L’intégralité de la 28e cérémonie des Ig Nobel :
A partir d’Improbable Research : Announcing the 2018 Ig Nobel Prizes winners.
Et si vous voulez découvrir les gagnants de l’année 2017 :
je crois qu’il y a une erreur, il s’agit de 10.000 milliards de dollars 😉
Petite erreur : le billet affiché, il fait 10 MILLE milliards de dollars (zimbabwéens) ; le comité Ig Nobel ne mégotte pas, nanmého.