Les rayons X révèlent des secrets cachés dans les œuvres de Pablo Picasso
Grâce, notamment, au pouvoir pénétrant des rayons X des scientifiques ont révélé certains secrets cachés dans les peintures et les sculptures de Pablo Picasso.
Une nouvelle recherche révèle ainsi que Picasso a peint sur une autre œuvre d’un artiste inconnu de Barcelone pour créer une de ses œuvres les plus célèbres de sa « période bleue« .
Une équipe de chercheurs canadiens révèle que la « Miséreuse accroupie » (en image d’entête) est peinte sur un paysage fait par une autre main. Picasso a fait pivoter le tableau original de 90° et a incorporé certains de ses éléments dans le fond de son chef-d’œuvre. Il a ainsi incorporé les formes du paysage dans le visage de la femme. Vous pouvez voir le paysage en retournant la peinture de 90° vers la gauche.
La découverte a d’abord été faite par Sandra Webster-Cook, principale restauratrice au Musée des beaux-arts de l’Ontario, qui est propriétaire du tableau de 1902. En regardant de près la surface, elle a remarqué des textures et des couleurs inhabituelles qui traversaient les fissures de la surface du tableau. L’œuvre a ensuite été soumise à une technique non invasive, la radiographie aux rayons X pour révéler le paysage caché.
Mais ce ne fut pas la seule surprise qui se cachait sous la Miséreuse accroupie. John Delaney, chercheur en imagerie au Musée des beaux-arts du Canada, a ensuite soumis la peinture à une autre procédure non invasive, appelée imagerie hyperspectrale par réflectance infrarouge, qui détecte la transparence variable des couches de peinture.
Ce faisant, il a trouvé des images d’un disque et d’un bras cachés sous la surface. Picasso a modifié sa peinture en cour de route : il a peint le bras de la femme, puis l’a couvert avec le manteau. Ce bras s’est avéré particulièrement intéressant, c’était une réplique exacte d’un Picasso peint dans une aquarelle de 1902 appelée « Femme assise à capuchon ».
A partir de l’étude : cartes de distribution de quelques éléments caractéristiques des pigments présents dans les différentes couches de peinture de La Miséreuse accroupie. (Université Northwestern/ Art Institute of Chicago Center for Scientific Studies in the Arts)
Quel tableau a été réalisé en premier, l’huile ou l’aquarelle ? Et quelle est l’identité du créateur du paysage recouvert ? Des questions qui ne devraient pas tarder à trouver une réponse.
Selon Webster-Cook :
Nous sommes maintenant en mesure d’élaborer une chronologie au sein de la structure picturale pour raconter une histoire sur le style de l’artiste et ses influences possibles.
Une autre équipe a mis littéralement en lumière quelques-unes des sculptures de l’artiste. Auparavant, les chercheurs ne connaissaient pas la fonderie d’où venaient cinq de ses moulages. Ils ont utilisé la spectrométrie de fluorescence des rayons X pour créer des empreintes digitales des métaux dans les sculptures. Cela a permis de révéler que le métal provenait de la fonderie d’Emile Robecchi, collaborateur de Picasso dans le sud de Paris, vers 1941-1942.
Tête de femme de profil (Marie-Thérèse), Boisgeloup, 1931, bronze, sculpture de Pablo Picasso, Musée national Picasso – Paris, (C) RMN-Grand Palais (Musée national Picasso-Paris)
La physique des particules et l’art semblent aller de pair, étonnamment. Même le Louvre a un accélérateur de particules sur place pour analyser les œuvres. Mais cette recherche est surtout passionnante pour ce qu’elle révèle sur Picasso lui-même.
Selon Julio Ottino de la McCormick School of Engineering and Applied Sciences de l’université Northwestern :
S’il y a quelque chose qui devrait se présenter, c’est bien la débrouillardise des artistes. Ils utiliseront tout ce qui est à leur disposition. Ils savent comment opérer avec des contraintes.
Ces découvertes ont été présentées lors de la réunion annuelle de l’American Association for the Advancement of Science (AAAS) et décrite sur le site de l’université Northwestern, pour la toile analysée : Research team uncovers hidden details in Picasso Blue Period painting et pour le bronze : Unprecedented study of Picasso’s bronzes uncovers new details.