Comment le coléoptère bombardier survit à l’estomac du crapaud ?
Les animaux feront tout pour éviter d’être mangés. Dans le cas des coléoptères bombardiers, ces insectes peuvent encore s’échapper après avoir été avalés par des crapauds, en projetant des produits chimiques nocifs et chauds qui forcent le prédateur à vomir. Ce n’est pas très élégant, mais ça marche.
Les petites proies animales ont développé toutes sortes de défenses physiques, comme des épines, des poils et des substances toxiques. En mai 2016, le chercheur de l’université de Kobe (Japon), Takuya Sato, et ses collègues étudiaient les comportements défensifs et les attaques chimiques utilisés par une espèce de scarabée appelé Pheropsophus jessoensis, un insecte commun à la Corée et au Japon. Dans une expérience en laboratoire, les chercheurs ont donné à manger un bombardier à un crapaud pour voir ce qui se passerait.
(Sugiura S et Col./ Biology Letters)
Selon les chercheurs dans leur étude :
Le crapaud a facilement avalé le dendroctone. Cependant, il a vomi le scarabée 44 minutes après l’avoir avalé. Le coléoptère vomi était encore vivant et actif.
Ce coléoptère s’est échappé d’un crapaud 88 minutes après avoir été avalé. (Sugiura S et Col./ Biology Letters)
Les scientifiques n’avaient jamais vu un crapaud ou une grenouille le faire avant, ce qui a poussé les recherches à aller plus loin. L’étude de suivi visait ainsi à clarifier les facteurs écologiques impliqués et à déterminer comment les dendroctones peuvent survivre si longtemps dans le ventre de leurs prédateurs.
Il y a près de 650 espèces connues de coléoptère bombardier, qui produisent toutes des produits chimiques nocifs dans leur intestin. Lorsqu’ils sont menacés, ils mélangent ces produits chimiques et projettent avec puissance un jet chaud du bout de leur abdomen, de leur derrière. Cela se produit généralement lors d’une attaque prédatrice, dissuadant l’ennemi de manger l’insecte. Dans certains cas, ces produits chimiques peuvent atteindre 100 °C. Chez le Pheropsophus jessoensis, les réactions chimiques qui en résultent produisent du peroxyde d’hydrogène et une classe de composés connus sous le nom de benzoquinones, des irritants connus pour endommager les tissus, tels que la peau et les poumons.
Dans leur nouvelle expérience, Sato a nourri les scarabées vivants de deux espèces différentes de crapauds, Bufo japonicus et B. torrenticola, pour voir si le mélange chimique chaud pourrait forcer les amphibiens à régurgiter. Pour tester diverses conditions, les scientifiques ont épuisé les défenses chimiques de certains coléoptères avant qu’ils ne soient exposés aux crapauds et en réalisant des tests avec des coléoptères et des crapauds de différentes tailles.
Tous les coléoptères appauvris de leurs défenses chimiques ont été tués et entièrement digérés dans l’estomac des crapauds. Mais ceux qui ont conservé leurs défenses s’en sont beaucoup mieux sorti : 43% des crapauds ont vomi les coléoptères de 12 à 107 minutes après les avoir avalés. Tous les coléoptères vomis étaient vivants et prêts à reprendre la route.
Fait important, les grands coléoptères s’en sortaient mieux que les petits, s’échappant plus fréquemment, tandis que les petits crapauds régurgitaient les coléoptères plus souvent que les grands crapauds et, selon les chercheurs :
Nos résultats démontrent de l’importance de la relation taille-prédateur-proie dans la fuite réussie de proies à l’intérieur d’un prédateur.
L’étude publiée dans Biology Letters : Successful escape of bombardier beetles from predator digestive systems.