Telles des éponges, les roches de Mars auraient absorbé une grande partie de son eau
Une nouvelle étude suggère qu’une grande partie de l’eau qui coulait sur la surface de Mars, il y a des milliards d’années, aurait été absorbée par des roches assoiffées, pour ensuite être enfouie profondément sous terre, dans le manteau de la planète rouge.
Ce mécanisme d’assèchement aurait été si puissant, qu’il aurait probablement transformé Mars, même si la planète n’avait pas perdu une partie de son eau liquide dans l’espace et sous sa surface, où elle est emprisonnée sous forme de glace. Pour Jon Wade, géologue à l’université d’Oxford en Angleterre, Mars était condamnée dès le départ.
Peu de temps après sa formation, c’était un monde relativement chaud et humide, avec une atmosphère épaisse, des rivières, des lacs et probablement même des océans. Mais cet environnement favorable à la vie n’a pas duré : il y a 3,7 milliards d’années, la plus grande partie de l’atmosphère de la planète rouge et la quasi-totalité de ses eaux de surface avait disparu.
Les scientifiques pensent que l’évènement clé de cette transition fut l’arrêt de la dynamo interne de Mars, qui a conduit à la perte de son champ magnétique global. Ce champ avait protégé l’atmosphère de la planète rouge contre le vent solaire, le flux de particules déversé par notre étoile. Avec la disparition du champ, l’atmosphère de Mars fut dépouillée et la planète est devenue beaucoup plus froide et sèche.
Ci-dessous, à gauche, l’atmosphère de Mars frappé par le vent solaire et à droite la Terre protégée par son champ magnétique. (NASA)
Une partie de l’eau de surface de Mars est passée sous terre, où elle demeure aujourd’hui sous forme de dépôts de glace. Une autre partie a été divisée en atomes d’hydrogène et d’oxygène par le rayonnement solaire, puis perdue dans l’espace, comme c’est le cas pour la majorité de l’air de la planète. Mais une partie de l’eau de surface originelle de la planète rouge manque toujours à l’appel, même après la prise en compte de ces deux processus et Wade et son équipe pensent qu’ils savent maintenant ce qui s’est passé.
Les chercheurs ont modélisé l’interaction de l’eau liquide avec la lave sur les surfaces de l’ancienne Terre et de Mars. Ils ont déterminé que, sur la planète rouge, ces réactions ont conduit à la formation de minéraux hydratés plus denses et plus riches en fer, ainsi le manteau de Mars est plus de deux fois plus riche en fer que celui de la Terre.
Pour les chercheurs, cette différence a eu d’importantes conséquences :
Sur la Terre primitive, les roches superficielles hydratées ont tendance à « flotter » sur la surface jusqu’à ce qu’elles se déshydratent, fournissant un chemin de retour de l’eau à la surface. Cependant, sur Mars, ces roches hydratées, portant des minéraux denses, peuvent s’enfoncer dans le manteau et agir pour bloquer l’eau, l’enlevant pour de bon.
Si ces réactions étaient efficaces, elles auraient pu séquestrer d’énormes quantités d’eau, l’équivalent du volume d’un océan martien global d’au moins 3 kilomètres de profondeur.
Mars était, depuis le début, destiné à s’assécher selon les chercheurs.
L’étude, publiée hier (20 décembre), pourrait aider les chercheurs à mieux comprendre pourquoi la Terre est capable d’entretenir la vie à sa surface, alors que Mars et Vénus ont emprunté des voies bien différentes. Et elle pourrait s’avérer utile pour les astrobiologistes qui étudient l’habitabilité planétaire en général.
…il est important d’explorer certaines subtilités, telles que l’histoire de l’accrétion et de la chimie du manteau et des roches. Ces subtilités peuvent jouer un rôle important sur la capacité de la surface de la planète à s’accrocher à l’eau pendant de très longues périodes.
L’étude publiée dans Nature : The divergent fates of primitive hydrospheric water on Earth and Mars et présentée sur le site de l’université d’Oxford : Mars: Not as dry as it seems.