D’ici 2040, au moins 60 % des centaines d’espèces de primates sur Terre pourraient disparaitre ! La faute à…
Au cours des deux dernières années, un groupe mondial de primatologues a évalué l’état de conservation des 504 espèces de primates évoluant sur Terre. Leur étude (lien plus bas) comportant 31 auteurs réparti à travers le monde et publiée cette semaine rapporte de très mauvaises nouvelles, les primates sont en grande difficulté. Environ 60% des espèces sont menacées d’extinction d’ici 2040 et 75% sont déjà en déclin. Sans action entreprise par l’humain, ces nombres vont croître et de nombreuses espèces disparaitront à jamais.
Image d’entête : Les primates non humains en voie de disparition incluent, entre autres, dans le sens des aiguilles d’une montre, au centre en haut, le rhinopithèque brun (photo: Paul Garber), le maki catta (photo: Matthias Appel) le gorille de l’Est (photo: Ruggiero Richard) et le gibbon à joues blanches (photo: Fan Peng-Fei).
Le coupable, pour les chercheurs, est tout trouvé, c’est l’humain. Les primates sont principalement menacés par la perte de leurs habitats qui sont exploités ou transformés en fermes ou en ranchs. Ils peuvent également être chassés pour la viande, ou pour fournir le commerce illégal des animaux de compagnie et même le trafic de leurs organes que cela soit pour la viande de brousse ou pour en faire des pièces ornementales. La construction de routes, l’extraction de pétrole et de gaz, l’exploitation minière, la pollution, les maladies et le changement climatique complètent la liste des menaces, souvent en combinaison.
De toutes les menaces, cependant, la plus grande est l’empreinte agricole sans cesse croissante de l’humanité et selon Paul A Garber de l’université de l’Illinois (Chicago) :
Les pratiques agricoles perturbent et détruisent l’habitat vital pour 76 % de toutes les espèces de primates sur la planète. En particulier, la production d’huile de palme, la production de soja et de caoutchouc, l’exploitation forestière et l’élevage en ferme et en ranch effacent des millions d’hectares de forêt.
Pour Jo Setchell, professeur d’anthropologie à l’université Durham qui a participé à l’étude :
La menace pour les primates résulte de l’incertitude politique, de l’instabilité socioéconomique, du crime organisé, de la corruption et des politiques qui favorisent le profit à court terme par rapport à la viabilité à long terme.
La situation est critique, mais les chercheurs, dirigés par Alejandro Estrada de l’Universidad Nacional Autónoma de México et Paul A Garber de l’université de l’Illinois, estiment qu’elle est encore réversible.
Pour prévenir l’extinction des primates, les besoins humains doivent être abordés de manière durable, que ce soit localement, en trouvant des méthodes pour les agriculteurs de coexister avec les primates qui se nourrissent de leurs cultures ou globalement en stoppant la déforestation. Il n’y a pas de réponse unique. Les politiques de conservation doivent être adaptées pour chaque pays, habitat ou espèce, en fonction de la nature exacte de chaque problème et la tâche ne sera pas aisée.
Toujours selon Jo Setchell :
… notre espérance provient de projets exceptionnels et de personnes extraordinaires dans le monde, comme les gardiens de Virunga qui risquent (et perdent) leur vie pour protéger les gorilles et d’autres primates en République démocratique du Congo ou les membres de la Fondation Pro-Conservation Panamenos, une organisation dédiée à la conservation des singes panaméens.
Les solutions résident dans l’équité globale et la prise en charge des implications de nos actions. Nous ne pouvons pas ignorer les catastrophes politiques et humaines dans d’autres pays.
Nous devons tenir compte des besoins des primates et des populations dans les politiques d’utilisation des terres, surveiller les populations de primates et atténuer le commerce illégal. Les populations captives peuvent être utilisées pour sauver les espèces au bord de l’extinction, mais si leur habitat naturel a disparu, il n’y a pas d’espoir.
Pour réduire la pression sur les primates et leurs habitats, nous devons diminuer la demande de feuillus tropicaux, de boeuf, d’huile de palme, de soja, de caoutchouc, de minéraux et de combustibles fossiles et promouvoir les ressources durables.
Ce n’est pas une nouvelle, mais nous devons rendre inacceptable de prioriser la consommation excessive et inutile par rapport à la persistance d’autres espèces. Chaque décision de consommation que nous prenons a des implications globales.
En outre, nous devons comprendre que les animaux sauvages ne sont pas des animaux de compagnie appropriés (l’indice est dans le mot “sauvage”).
Biologiquement, l’extinction est un phénomène normal. Les espèces évoluent et les espèces disparaissent. De temps en temps dans l’histoire de la terre, les extinctions massives ont effacé un grand nombre d’espèces dans le monde. Cependant, nous ne pouvons pas accepter que nous, en tant qu’espèce primate, nous conduisions les autres à l’extinction alors que nous sommes encore capables de l’empêcher.
L’étude publiée dans Science Advance : Impending extinction crisis of the world’s primates: Why primates matter et présentée sur le site de l’université de l’Illinois : Survival of many of the world’s nonhuman primates is in doubt, expert report.