Les oiseaux dorment tout en volant – Les oiseaux volent tout en dormant
Comme certains oiseaux vol des jours sur des milliers de kilomètres sans s’arrêter, les scientifiques ont spéculé qu’ils étaient capables de dormir pendant leur périple. Une nouvelle étude, réalisée par une équipe internationale de chercheurs, a maintenant prouvé que c’est vrai, démontrant que les oiseaux peuvent faire la sieste tout en planant.
Dans leur étude, Niels Rattenborg de l’Institut Max Planck et ses collègues de plusieurs autres institutions ont apporté la première preuve montrant que les oiseaux volants peuvent dormir avec une seule moitié de leur cerveau en activité, ou sans aucun des deux hémisphères. Remarquablement, ces oiseaux peuvent conserver leur capacité de navigation tout en étant dans la phase de sommeil paradoxal, ce qui implique une perte temporaire du tonus musculaire.
Les scientifiques sont bien conscients que certains oiseaux, comme les martinets (voir : 6 mois d’affilés dans les airs sans atterrir : la vie d’un martinet alpin), les oiseaux chanteurs, les bécasseaux et les oiseaux de mer, dorment vraiment très peu. Pour les aider à rester en l’air pendant des jours, des semaines, voire des mois consécutifs, les scientifiques ont supposé que ces aviateurs de vol long-courrier ont évolué la capacité de dormir pendant le vol en rentrant dans un sommeil unihémisphérique, qui permet à une moitié du cerveau de se reposer alors que l’autre reste active. C’est d’ailleurs ce que font les dauphins pour éviter qu’ils ne se noient, les crocodiles qui ne dorment que d’un oeil,les requins peut-être aussi et d’autres. Cela permet à un animal de se reposer un peu, tout en lui permettant de rester conscient de son environnement et de ses dangers.
Le problème est que le sommeil unihémisphérique, chez les oiseaux volants, n’a pas été étudié, mais il a été observé chez les canards reposant au sol. Avant cette étude, aucune preuve scientifique ne pouvait soutenir une telle revendication. Pour résoudre ce mystère, Rattenborg et ses collègues ont enregistré l’activité cérébrale des oiseaux en plein vol pour voir s’ils entrent dans l’un de ces deux types de sommeil : le sommeil profond et le sommeil paradoxal.
Avec des chercheurs de l’université de Zurich et de l’Institut fédéral suisse de technologie, l’équipe de Rattenborg a développé un petit appareil qui, quand il est attaché à la tête d’un oiseau, est capable de réaliser une électroencéphalographie (EEG) de l’activité du cerveau, tout en vérifiant les mouvements de la tête.
Pour l’expérience, les chercheurs ont choisi d’étudier les Frégates superbes, qui nichent sur les îles Galapagos. Ces oiseaux passent souvent des semaines à voler sans escale, sur l’océan, à la recherche de proies. Avec ce petit appareil attaché sur leur tête, les frégates ont parcouru plus de 3 000 kilomètres sans s’arrêter.
Image d’entête : une Frégate superbe avec le petit appareil d’encéphalographie sur sa tête. (B. Voirin)
Une fois que les données des enregistreurs de vol ont été récupérées et analysées, les chercheurs ont découvert que les oiseaux sont restés éveillés pendant la journée, mais au coucher du soleil, alors qu’ils ont adopté le “mode vol” par opposition au “mode de recherche active de nourriture”, ils sont rentrés dans des phases de sommeil profond pouvant durer plusieurs minutes.
Les chercheurs ne s’attendaient pas à ce que les phases de sommeils profonds se produisent parfois dans un hémisphère à la fois, ou simultanément dans les deux. Les chercheurs ont conclu que les oiseaux n’ont pas besoin d’un sommeil unihémisphérique pour le contrôle aérodynamique. Cela dit, le sommeil unihémisphérique a eu lieu assez souvent et il est arrivé alors que les oiseaux tournoyaient pour s’élever en s’aidant des courants d’air, ce qui suggère qu’ils gardaient littéralement un œil ouvert, ils regardaient où ils allaient.
De temps en temps, les oiseaux sont également rentrés dans un sommeil paradoxal. Cela peut sembler extrême à faire en plein vol, mais il est important de comprendre que le sommeil paradoxal chez les oiseaux n’est pas le même que chez les mammifères. Contrairement à nous, où les phases de sommeil paradoxal sont longues et impliquent une perte complète du tonus musculaire, chez les oiseaux, il ne dure que quelques secondes. Cela dit, la perte de tonus musculaire a fait baisser la tête des oiseaux au cours de leur vol, mais cela n’a pas affecté celui-ci.
Tout cela est fascinant, mais ce qui est peut-être le plus surprenant, c’est le fait que, en dépit de cette capacité unique, les Frégates superbes ont dormi moins d’une heure par jour, ou 42 minutes en moyenne pour être précis, moins de 10 % du temps qu’ils passent normalement à dormir sur terre.
Cela laisse à penser qu’il y a un compromis évolutif à faire une sieste en plein vol. Peut-être que les oiseaux sont plus susceptibles d’avoir des collisions ou de manquer de nourriture pendant le sommeil, mais davantage de recherche devra être réalisés pour comprendre ce qui se passe réellement. Des recherches devront également être menées sur la façon dont les oiseaux se meuvent dans les airs avec si peu de sommeil, ce qui serait désastreux rapporté aux humains.
Ainsi, alors que la nouvelle étude répond à une question, comment les oiseaux restent dans l’air pendant des semaines à la fois sans prendre une pause, elle en ouvre maintenant plusieurs autres…
L’étude publiée dans Nature Communications : Evidence that birds sleep in mid-flight et présentée sur le site de l’institut Max Planck : First evidence of sleep in flight.
Cher Guru,
Une coquille :
« ils sont rentrés dans des phases de sommeil profond pouvant durer plusieurs minutes. »
Merci Etienne, mais le Guru n’arrive pas à la trouver ? Donnez-moi une piste.
La phrase était déjà corrigée dans le commentaire d’Etienne. Il s’agit de cette phrase dans l’article : « pouvant durées plusieurs minutes. »