Comment les poils des fourmis argentées sahariennes les préservent de l’extrême chaleur du désert ?
La beauté étincelante de la fourmi argentée saharienne (cataglyphis bombycinus) renferme le secret d’une résistance à certaines des températures les plus élevées trouvées sur Terre. Nous avions déjà pu découvrir ces créatures et leurs fourrures et une nouvelle recherche vient préciser comment, exactement, leurs poils argentés les préservent de la chaleur, en reflétant la lumière du soleil comme un prisme.
Image d’entête : ouvrières et soldats cataglyphis bombycinus (P. Landmann, Willott, et col./ PLOS ONE)
Elles sont dans l’ensemble assez brillantes, mais leurs extrémités arrière brillent comme le chrome poli. Ces fourmis habitent dans les déserts du Sahara et du Sinaï, où les températures diurnes peuvent atteindre de 50 à 70 °C. D’autres animaux du désert se mettront à l’abri dans des grottes ou des terriers pour laisser passer la chaleur de midi, mais pas les fourmis d’argent. Comme tout le monde est au frais, en sou-sol, les ouvrières sortent du nid et se mettent à fouiller les corps des animaux qui n’ont pu supporter la chaleur.
C’est une stratégie assez terrible, notent les chercheurs de l’université Libre de Bruxelles (Belgique) dans leur article :
En restreignant l’activité de récolte de nourriture à la période la plus chaude de la journée, les fourmis réduisent les chances de rencontrer leur plus fréquent prédateur, un lézard qui cesse toutes activités lorsque la température devient insupportable.
Pendant une petite période chaque jour, le désert devient un buffet ouvert de charognes.
Une étude publiée l’année dernière a montré que de minuscules poils triangulaires, sur le corps des fourmis, étaient responsables de l’éclat et que ces poils empêchent la lumière du soleil et la chaleur d’atteindre les insectes.
Mais on ne savait pas exactement comment les poils agissaient. Donc, une nouvelle équipe de chercheurs de l’université Libre de Bruxelles a décidé de résoudre cette énigme en allant collecter quelques spécimens dans les dunes du Maroc. Ils ont ramené des ouvrières dans leur laboratoire et ils ont laissé la moitié des fourmis brillantes et poilues, mais l’autre moitié a été rasée avec de minuscules rasoirs.
Toutes les fourmis ont été euthanasiées et leurs corps examinés sous trois différents types de microscopes (électronique à balayage, électronique en transmission et optiques). Des petits thermomètres rectaux ont été implantés dans certains corps des fourmis et soumis à une forte chaleur à partir d’un simulateur de lumière solaire.
Images tirées de l’étude : poils de fourmis au microscope électronique à balayage et à transmission (Willot et col. / PLOS One)
Les chercheurs bruxellois ont constaté que la forme triangulaire des poils créée un effet de prisme, réfléchissant la lumière à l’intérieur de chaque poil dans un processus appelé la réflexion totale interne (RTI). Leur surface est en dents de scie, ce qui augmente la portée de la réflexion. Sous certains angles, un seul poil était en mesure de refléter presque 100 % de la lumière reçue, ce qui en fait essentiellement un long et mince miroir d’argent.
Le corps des fourmis poilues réfléchit jusqu’à 10 fois plus de lumière que ceux de celles qui avaient été rasés. Par conséquent, les corps des fourmis poilues étaient incroyablement résistants à la chaleur. À la lumière du soleil simulé, elles étaient de 2 °C moins chaudes que leurs homologues chauves.
Les fourmis argentées ne sont pas les premiers organismes à utiliser la réflexion totale interne, mais elles sont les premières à le faire dans le désert.
Selon le coauteur de l’étude, Serge Aron :
La capacité à réfléchir le rayonnement solaire par le moyen de la réflexion totale interne est un nouveau mécanisme d’adaptation chez les animaux du désert, ce qui donne une protection thermique efficace contre le rayonnement solaire intense. C’est également la première fois qu’il est démontré que la réflexion totale détermine la couleur d’un organisme.
L’étude publiée dans PLoS ONE : Total Internal Reflection Accounts for the Bright Color of the Saharan Silver Ant.
» a été rasée avec de minuscules rasoirs »… »Des petits thermomètres rectaux »
La vache, sont patients a Bruxelles 😀
L’article est intéressant mais la première image que j’ai en tête me rapproche plus de « Gaston Lagaff » quand même 😀