Décollage et séparation réussie pour la mission ExoMars qui tentera de détecter des traces de vies sur Mars
Avant hier, le 14 mars, la première phase de la mission ExoMars a été lancée au sommet d’une fusée russe Proton au cosmodrome de Baïkonour au Kazakhstan et aujourd’hui elle signale que tout va bien.
Votre Guru vous avez déjà décrit, il n’y pas si longtemps, cette mission à destination de la planète rouge, et qui doit y chercher des “biosignatures” ou des marqueurs scientifiques de la vie. Nous allons un peu plus rentrer dans le détail de cette mission, mais avant, 3 belles images du décollage (clic pour agrandir). (ESA / Stephane Corvaja)
ExoMars est l’abréviation de « exobiologie sur Mars” et la mission est issue d’une collaboration entre l’Agence Spatiale Européenne (ESA) et Roscosmos, l’Agence spatiale russe. Le lancement comprenait un satellite appelé le Trace Gas Orbiter. Comme son nom l’indique, l’orbiteur est conçu pour étudier les “Trace Gas”, des gaz à l’état de trace qui représentent moins de 1 % de l’atmosphère martienne. L’un de ces gaz, le méthane, est essentiel à la compréhension de la vie sur Mars. Parce que le gaz ne survit que quelques siècles avant de se décomposer, l’ensemble du méthane détecté devra avoir été produit relativement récemment par des volcans actifs ou des micro-organismes. L’une ou l’autre source serait passionnante et les scientifiques planétaires utiliseront d’autres gaz traces dans l’atmosphère afin de déterminer l’origine. Le dioxyde de soufre dans l’air suggérerait du volcanisme et le carbone, la vie.
Cette phase de la mission ExoMars va également lancer un module prototype « d’entrée, de descente et d’atterrissage » nommé Schiaparelli (d’après l’astronome italien du 19e siècle Giovanni Schiaparelli, qui a cartographié Mars basé sur ses observations au télescope).
Schiaparelli est conçu pour tester les technologies permettant de poser en douceur des charges utiles sur Mars. Alors qu’il se rapprochera de la surface en octobre, il va s’orienter et activer ses parachutes et ses moteurs d’atterrissage. Pendant ce temps, un programme à bord de l’atterrisseur, appelé AMELIA (Atmospheric Mars Entry and Landing Investigation and Analysis) permettra de mesurer la vitesse du vent et les variables atmosphériques lors de la descente. Comme le débarquement aura lieu pendant la saison des tempêtes de poussière sur Mars, un autre des instruments se penchera sur le rôle des forces électriques sur la montée de la poussière, le mécanisme qui déclenche les tempêtes. Les informations recueillies seront précieuses pour les futures missions, comme la deuxième phase de la mission ExoMars, qui sera lancée en 2018 et installera une astromobile sur la surface de Mars, en 2019.
Représentation artistique de l’astromobile ExoMars 2018 sur la planète rouge (ESA)
La Trace Gas Orbiter tournera autour de Mars à une altitude de 400 kilomètres et comporte quatre instruments scientifiques. L’Atmospheric Chemistry Suite (ACS) et le Nadir and Occultation for Mars Discovery (NOMAD) qui scanneront les gaz traces. Le Colour and Stereo Surface Imaging System (CASSIS) étudiera les zones identifiées comme sources de gaz traces possibles et aidera les scientifiques à déterminer quels sont les processus géologiques à l’œuvre. Le Fine Resolution Epithermal Neutron Detector (FREND) peut cartographier la teneur en hydrogène des régions de la surface martienne, de un à deux mètres de profondeur.
L’atterrisseur Schiaparelli, quant à lui, a assez de batterie pour deux à huit jours martiens. (Les contrôles à l’exportation ont empêché les concepteurs de l’ESA d’utiliser un générateur thermoélectrique de radio-isotope de fabrication russe, qui aurait pu fournir des années de puissance.) Avec la collecte de données lors de la descente, une fois au sol, il analysera les champs électriques à la surface, une première et étudiera la transparence atmosphérique, l’humidité, la vitesse et la direction du vent.
La séquence de la descente de l’atterrisseur Schiaparelli (ESA)
Une mission semée d’embuches
Avant que l’ESA s’associe à Roscosmos, ExoMars était une mission conjointe ESA-NASA. Cependant, en 2012, la NASA s’est retirée, son budget en science planétaire ayant été réduit. La perte de la NASA fut un coup dur pour la mission et un gros problème pour l’ESA, qui avait déjà investi des centaines de millions d’euros dans le développement de la technologie et comptait sur la NASA pour fournir un véhicule de lancement, les communications, l’instrumentation et finalement, un atterrisseur pour l’astromobile. En fin de compte, la NASA n’a contribué qu’au système de communication. Roscosmos a sauvé la mission avec ses fusées, instruments, et pour la phase suivante, un atterrisseur.
Mais la mission risque d’être difficile, car les deux agences n’ont pas une grande expérience des voyages à destination de Mars ou cela n’a pas toujours été une réussite. Les deux dernières missions Mars-Fobos-Grunt de la Russie en 2011 et Mars 96 en 1996, n’ont jamais quitté l’orbite basse de la Terre. L’atterrisseur Beagle-2, de l’ESA, a disparu avant de rentrer en contact avec la surface en 2003. Elle a été déclarée perdue, bien que la sonde Mars Reconnaissance Orbiter (MRO) de la NASA l’a retrouvé l’année dernière. Et Beagle-2 avait bien atterri, même si une partie de son réseau de panneau solaire n’a pas réussi à se déployer, obstruant ses communications.
Mais soyons positif, tout ce passe bien pour l’instant comme l’ont signalé les instruments de la mission suite à la séparation de la sonde de l’étage supérieur de la fusée.
Le tweet de l’ESA signalant la séparation :
Si tout ce déroule comme prévu, le vaisseau spatial arrivera à Mars en octobre, au moment où le Trace Gas Orbiter et l’atterrisseur se sépareront. Le 19 octobre, le satellite sera placé en orbite martienne et Schiaparelli commencera son entrée, sa descente et son atterrissage. Le Trace Gas Orbiter passera ensuite un peu plus d’un an à freiner pour abaisser son altitude orbitale à prêt de 400 kilomètres. La mission scientifique commencera en décembre 2017.
La Trace Gas Orbiter sera le deuxième vaisseau spatial de l’ESA a être placé en orbite autour de Mars. Le premier a été Mars Express le jour de Noël 2003 de la même mission dans laquelle Beagle-2 a été perdu. Mars Express reste en orbite martienne et étudie actuellement la surface et sous la surface de la planète.
Sur le site de l’ESA : ExoMars launch updates et ExoMars on its way to solve the Red Planet’s mysteries.